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Djouhri Libéré : Fin de Détention dans l’Affaire Libyenne

Alexandre Djouhri, dernier détenu du procès sur le présumé financement libyen de la campagne de Sarkozy en 2007, vient d’être remis en liberté sous très strict contrôle judiciaire. Va-t-il enfin pouvoir préparer sereinement son appel prévu en mars ? La justice a tranché, mais le feuilleton est loin d’être terminé…

Imaginez un homme de 66 ans, costume impeccable, qui franchit enfin les portes d’une prison parisienne après des mois de détention. Derrière lui, l’ombre écrasante d’une affaire d’État qui empoisonne la politique française depuis plus de quinze ans. Mercredi, Alexandre Djouhri vient de vivre ce moment.

Une libération très attendue dans le dossier libyen

La cour d’appel de Paris a décidé, ce mercredi, de remettre en liberté sous contrôle judiciaire l’intermédiaire franco-algérien Alexandre Djouhri. Il était, jusqu’à présent, le dernier prévenu encore incarcéré dans le tentaculaire dossier du supposé financement libyen de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.

Condamné en première instance à six ans de prison ferme le 25 septembre dernier, l’homme d’affaires avait vu toutes ses précédentes demandes de mise en liberté rejetées. La justice craignait alors un risque de fuite, notamment vers l’Algérie où la coopération judiciaire reste complexe.

Des conditions de libération extrêmement strictes

Cette fois, la chambre de l’instruction a estimé que les garanties de représentation étaient suffisantes. Mais la liberté accordée reste encadrée par des obligations particulièrement lourdes.

  • Interdiction de quitter l’Île-de-France
  • Assignation à résidence avec sortie autorisée uniquement entre 8h et 20h
  • Remise de ses deux passeports (français et algérien)
  • Pointage hebdomadaire à la gendarmerie
  • Interdiction totale d’exercer toute activité d’intermédiation économique
  • Interdiction de contacter les autres prévenus du dossier

Autant de mesures qui montrent que, même libre, Alexandre Djouhri reste sous une surveillance étroite de la justice française.

« La cour d’appel a enfin reconnu qu’il n’y avait ni risque de fuite ni risque de pression sur les témoins », s’est félicité Me Pierre-Henri Bovis, son avocat.

Un revirement judiciaire notable

Il y a à peine un mois, début novembre, la même cour d’appel rejetait pourtant une première demande de libération. Les magistrats estimaient alors que les garanties présentées étaient « particulièrement faibles » et que la double nationalité de l’intéressé faisait peser un risque sérieux de départ vers l’Algérie.

Le parquet général s’était d’ailleurs fermement opposé à cette remise en liberté, reprenant les mêmes arguments lors de l’audience de mercredi. Mais la défense a visiblement réussi à convaincre les juges que son client ne chercherait pas à se soustraire à la justice.

Selon son conseil, Alexandre Djouhri n’a « jamais cherché à se dérober à ses obligations » tout au long de la procédure, malgré la complexité du dossier et les années d’instruction.

Tous les protagonistes désormais libres pour l’appel

Avec cette décision, l’ensemble des principaux condamnés du procès de première instance se retrouvera libre lors du futur procès en appel, prévu du 16 mars au 3 juin prochains.

Nicolas Sarkozy lui-même n’avait passé que vingt jours à la prison de La Santé avant d’obtenir sa remise en liberté sous contrôle judiciaire. Le banquier Wahib Nacer, condamné à quatre ans avec mandat de dépôt, avait également été libéré quelques semaines plus tard.

Dix personnes au total seront rejugées dans ce dossier explosif, parmi lesquelles deux très proches de l’ancien président : Claude Guéant et Brice Hortefeux. Tous comparaîtront donc libres devant la cour d’appel.

Un dossier qui continue de hanter la Ve République

L’affaire du financement libyen reste l’un des scandales politico-financiers les plus retentissants de ces dernières décennies. Elle repose sur l’hypothèse selon laquelle le régime de Mouammar Kadhafi aurait versé plusieurs dizaines de millions d’euros pour soutenir la campagne victorieuse de Nicolas Sarkozy en 2007.

Des valises de billets, des intermédiaires douteux, des témoignages de dignitaires libyens, des carnets secrets… Pendant plus de dix ans, les enquêteurs ont accumulé les indices troublants, même si les preuves formelles manquent encore aux yeux de certains.

Alexandre Djouhri, personnage central et mystérieux de ce réseau d’influence, a toujours nié avoir transporté des fonds libyens vers la France. Il se présente comme un simple homme d’affaires ayant facilité des contrats, notamment dans l’aéronautique et le pétrole.

La prison de La Santé, théâtre des grandes affaires

C’est dans les murs de la célèbre prison parisienne de La Santé qu’Alexandre Djouhri aura passé les derniers mois. Un établissement qui a vu défiler son lot de personnalités dans des dossiers sensibles.

L’ancien chef de l’État y a lui-même séjourné brièvement, une situation inédite sous la Ve République. L’image de Nicolas Sarkozy franchissant le portail de la prison avait fait le tour du monde et marqué durablement l’opinion.

Aujourd’hui, c’est au tour d’Alexandre Djouhri de retrouver l’air libre. Selon son avocat, il devrait quitter La Santé « dans les prochaines heures » suivant la décision de la cour d’appel.

Vers un procès en appel sous haute tension

Le procès en appel s’annonce déjà comme un moment crucial. Tous les protagonistes seront présents, libres mais toujours sous la menace de peines lourdes. Les débats risquent d’être particulièrement âpres.

La défense d’Alexandre Djouhri compte bien faire valoir de nouveaux éléments pour démontrer l’innocence de son client. Elle critique depuis le début une instruction à charge et des accusations reposant sur des témoignages indirects ou intéressés.

Du côté de l’accusation, on maintient que les flux financiers suspects et les déclarations concordantes de plusieurs témoins libyens constituent un faisceau d’indices accablant.

Une affaire qui dépasse largement les individus

Au-delà des personnes mises en cause, c’est toute la question des relations troubles entre la France et le régime Kadhafi qui resurgit périodiquement. Des contrats d’armement aux négociations sur les otages, en passant par les bombardements de 2011, les zones d’ombre restent nombreuses.

La libération d’Alexandre Djouhri, aussi technique soit-elle, ravive inévitablement le débat sur l’indépendance de la justice face aux affaires politico-financières touchant les plus hautes sphères de l’État.

Alors que l’ancien président clame toujours son innocence et dénonce une persécution judiciaire, ses adversaires y voient la preuve que l’argent sale a pu influencer le cours de la démocratie française.

Quel que soit le verdict final de la cour d’appel, cette affaire continuera longtemps de hanter le paysage politique français. Elle incarne, pour beaucoup, les dérives possibles du financement de la vie politique et les dangers des compromissions internationales.

En attendant les audiences de mars à juin prochains, Alexandre Djouhri va pouvoir préparer sa défense chez lui, en région parisienne, sous le regard attentif de la justice. Un répit bienvenu avant la prochaine bataille judiciaire.

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