Les catastrophes aériennes marquent durablement les esprits. Lorsque deux appareils Boeing 737 MAX se sont écrasés à quelques mois d’intervalle en 2018 et 2019, faisant 346 victimes, l’onde de choc a été immense. Après des mois d’enquête, le constructeur aéronautique américain vient de conclure un accord avec la justice de son pays. Une étape importante, mais qui est loin de refermer ce douloureux chapitre.
Boeing admet des erreurs et accepte de payer
Selon les termes de l’accord dévoilé ce jeudi, Boeing va plaider coupable pour avoir induit en erreur les régulateurs lors du processus d’approbation du 737 MAX. Le géant de Seattle devra aussi payer une amende de 243 millions de dollars et se soumettre à la supervision d’un contrôleur indépendant pendant 3 ans.
C’est un revirement pour Boeing, qui avait jusqu’ici toujours nié toute responsabilité directe dans les accidents des vols Lion Air 610 et Ethiopian Airlines 302. Des défaillances du système anti-décrochage MCAS avaient été mises en cause, ainsi que des manquements dans la formation des pilotes.
Des familles de victimes déçues
Si cet accord permet à Boeing d’éviter un procès pénal, il est loin de satisfaire les proches des victimes. Leur avocat, Robert A. Clifford, a déclaré qu’ils étaient “très déçus” et que l’accord renforçait l’impression que la culture de Boeing, “privilégiant les profits à la sécurité”, n’avait pas changé malgré les drames.
Beaucoup plus de preuves ont été présentées au cours des cinq dernières années qui démontrent que la culture de Boeing privilégiant les profits à la sécurité n’a pas changé.
Robert A. Clifford, avocat des familles de victimes
Quelles leçons pour la sécurité aérienne ?
Au-delà du volet judiciaire, les crashes du 737 MAX ont mis en lumière de graves failles dans les procédures de certification des avions. Sous pression pour rivaliser avec Airbus, Boeing a pris des raccourcis et manqué de transparence envers la FAA, le régulateur américain.
Depuis, les processus ont été renforcés, avec une implication plus grande des pilotes et des experts indépendants. Mais pour beaucoup, la confiance en Boeing et dans les autorités a été durablement ébranlée. Il faudra du temps et des preuves concrètes d’une véritable remise en question pour la rétablir.
Un accord, et après ?
Cet accord amiable ne met pas fin aux déboires judiciaires de Boeing. Le constructeur fait toujours face à de nombreuses plaintes au civil de la part des familles de victimes, notamment pour obtenir des indemnisations.
De plus, l’accord prévoit que les poursuites pénales pourraient reprendre si Boeing ne respecte pas toutes ses obligations, y compris en termes d’indemnisation et de coopération avec les autorités. Le Département de la Justice aura donc un œil attentif sur l’avionneur dans les années à venir.
Enfin, il reste à voir si ce dénouement judiciaire permettra au 737 MAX, cloué au sol pendant de longs mois avant une remise en service progressive, de redécoller véritablement. De nombreuses compagnies ont annulé ou converti leurs commandes vers d’autres modèles.
Boeing jouait gros dans ce dossier du 737 MAX, crucial pour son avenir. Avec cet accord, il limite les dégâts sur le plan pénal. Mais le chemin sera encore long pour regagner la confiance des passagers, des compagnies et des autorités. Les leçons de ces tragédies devront impérativement être retenues pour éviter qu’elles ne se reproduisent.