Imaginez le patron de la plateforme qui héberge les débats les plus chauds du monde déclarer ouvertement que toute une union politique continentale devrait disparaître. C’est exactement ce qu’a fait Elon Musk ce week-end, quelques heures après que Bruxelles a sorti le carnet de chèques… à l’envers.
Une amende de 120 millions d’euros qui met le feu aux poudres
Vendredi, la Commission européenne a annoncé une sanction historique contre X : 120 millions d’euros. Le motif officiel ? Plusieurs violations du règlement sur les services numériques, plus connu sous le sigle DSA. Mais pour Elon Musk, cette décision va bien au-delà d’une simple question technique.
Dans la foulée, l’homme le plus riche du monde a publié un message sans détour : « L’UE devrait être abolie et les États recouvrer leur souveraineté pleine et entière. » Une phrase qui a immédiatement enflammé la toile et relancé le débat sur la place des géants américains face à la régulation européenne.
Les trois griefs principaux de Bruxelles contre X
Pour comprendre la colère de Musk, il faut revenir aux reproches précis formulés par la Commission.
- Le système des coches bleues payantes mis en place après le rachat de Twitter en octobre 2022
- Un manque de transparence sur l’identité réelle des annonceurs publicitaires
- L’impossibilité pour les chercheurs agréés d’accéder aux données publiques de la plateforme
Le point le plus sensible reste incontestablement la célèbre vérification. Avant 2022, la petite coche bleue était un gage d’authenticité obtenu après un processus strict. Depuis l’arrivée d’Elon Musk, n’importe qui peut l’obtenir… contre 8 dollars par mois. Résultat : des comptes parodiques ou malveillants ont parfois trompé des millions d’utilisateurs.
« Ce qui était autrefois un symbole de crédibilité est devenu un simple produit commercial.
Une réaction politique immédiate venue des États-Unis
Dès jeudi soir, alors que la rumeur de l’amende circulait déjà, le vice-président élu JD Vance s’était emparé du sujet. Sur X, il avait accusé Bruxelles de sanctionner la plateforme « pour ne pas avoir censuré assez » – mélangeant visiblement cette procédure avec une autre enquête en cours sur la modération des contenus illégaux.
Elon Musk a lui-même enchaîné samedi avec une série de messages très virulents. Outre sa phrase choc sur l’abolition de l’UE, il a dénoncé dans une vidéo live « une surrégulation qui tue l’innovation » et accusé l’Europe de « se laisser aller vers le néant ».
Ces déclarations arrivent dans un contexte particulier : l’entrepreneur sud-africain naturalisé américain est devenu ces derniers mois l’un des plus proches soutiens de Donald Trump. Sa présence régulière aux côtés du président élu renforce l’idée d’un front commun des conservateurs américains contre les institutions européennes.
Le DSA, bouclier ou arme politique ?
Adopté en 2022, le Digital Services Act vise à responsabiliser les très grandes plateformes. Transparency, lutte contre la désinformation, protection des mineurs : les objectifs affichés sont louables. Mais certains y voient une tentative de contrôle idéologique déguisée.
L’amende infligée à X est la première du genre depuis l’entrée en vigueur pleine du texte. Elle pourrait créer un précédent pour Meta, TikTok ou Google, tous dans le collimateur de Bruxelles. D’ailleurs, une autre enquête, bien plus explosive, vise toujours X pour sa gestion des contenus haineux et de la désinformation – celle-là pourrait coûter jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise.
En résumé, trois visions s’opposent :
• Pour l’UE → protéger les citoyens européens
• Pour Musk → défendre la liberté d’expression absolue
• Pour une partie de la droite américaine → contrer ce qu’ils appellent le « socialisme numérique » européen
Vers une guerre froide numérique entre Washington et Bruxelles ?
Ce n’est pas la première fois qu’Elon Musk s’en prend directement aux institutions européennes. Il y a un an déjà, il avait menacé de retirer X du marché européen plutôt que de se plier à certaines exigences de modération. La plateforme reste toutefois disponible dans les 27 États membres.
Au-delà du cas X, cette affaire cristallise un différend plus profond. Les États-Unis défendent un modèle de liberté quasi absolue sur internet. L’Europe privilégie une approche plus protectrice, parfois perçue comme paternaliste outre-Atlantique.
Avec le retour annoncé de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier 2025, nombreux sont ceux qui craignent une escalade. Des représailles commerciales contre les entreprises européennes ? Des pressions sur les alliés de l’OTAN ? Les scénarios les plus sombres circulent déjà dans les couloirs bruxellois.
Et les utilisateurs dans tout ça ?
Car au milieu de ce bras de fer entre titans, il y a vous et moi. Ceux qui scrollent chaque jour. Ceux qui ont vu des comptes vérifiés diffuser de fausses informations parce qu’ils avaient payé leur badge. Ceux qui se demandent parfois si la plateforme est encore fiable.
La question est simple : préfère-t-on un Far West numérique où tout est permis, ou un jardin clos où quelqu’un décide ce qui est acceptable ? Elon Musk a choisi son camp. L’Europe a choisi le sien. Reste à savoir lequel finira par l’emporter… ou si, plus probablement, si un compromis fragile tiendra encore quelques années.
Une chose est sûre : tant que des amendes de cette ampleur pleuvront et que des phrases comme « l’UE devrait être abolie » seront lancées par des personnalités aussi influentes, le débat est loin d’être clos.
Et vous, de quel côté êtes-vous ?









