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Milei Supprime les Vacances du Parlement pour Imposer ses Réformes

Imaginez : le Parlement argentin n’aura même pas le temps de défaire ses valises après les législatives que Javier Milei le rappelle déjà à Buenos Aires. Du 10 au 30 décembre, il veut faire passer en force réformes du travail, code pénal et budget. Les syndicats sont déjà sur le pied de guerre… Que va-t-il vraiment se passer ces prochaines semaines ?

Et si les vacances d’été n’existaient plus pour les députés argentins ? C’est exactement ce qui se profile à Buenos Aires depuis l’annonce choc du gouvernement : Javier Milei a décidé de convoquer le Parlement en session extraordinaire dès le 10 décembre, soit immédiatement après l’installation de la nouvelle composition issue des législatives d’octobre.

Traditionnellement, les parlementaires profitent de près de trois mois de répit entre la prise de fonction et la reprise ordinaire des travaux le 1er mars. Cette année, ce luxe appartient au passé. Le président ultralibéral veut profiter de son capital politique fraîchement regonflé pour faire adopter une série de textes décisifs avant la fin 2025.

Une offensive législative express avant Noël

Le décret présidentiel, qui doit être signé ce vendredi, fixe la session extraordinaire du 10 au 30 décembre. Vingt jours seulement, mais vingt jours qui pourraient marquer un tournant majeur dans la seconde moitié du mandat Milei.

Le chef du cabinet des ministres, Manuel Adorni, a détaillé sur les réseaux sociaux les grands dossiers qui seront mis sur la table. Et la liste est lourde.

Les cinq chantiers prioritaires du gouvernement

Parmi les textes soumis au vote figurent des réformes structurelles que Javier Milei porte depuis sa campagne de 2023. Voici les principaux sujets qui seront débattus sous les lustres du Congrès argentin :

  • Le budget national pour l’exercice 2026, pièce maîtresse de la politique économique.
  • La « modernisation du travail », euphémisme pour une refonte profonde du droit du travail.
  • Une réforme ambitieuse du code pénal avec un durcissement notable des peines.
  • L’« innocence fiscale », dispositif visant à alléger les contrôles sur l’origine des fonds d’épargne.
  • La modification de la loi sur les zones périglaciaires, afin de faciliter l’activité minière, notamment dans le lithium.

Cette liste n’a rien d’anodin. Chaque point touche directement soit le modèle économique, soit les équilibres sociaux, soit les ressources naturelles du pays.

La réforme du travail, le dossier explosif

C’est sans doute le texte qui concentre toutes les craintes des syndicats et de l’opposition péroniste. Bien que le gouvernement n’ait pas encore publié la version officielle, plusieurs éléments ont filtré ces dernières semaines.

On parle notamment d’une flexibilité accrue sur les horaires, d’une prolongation possible de la période d’essai, d’une refonte du régime d’indemnités en cas de licenciement et même de l’introduction de salaires « dynamiques » indexés sur la productivité individuelle ou collective.

« Ce n’est plus une réforme, c’est une démolition du droit du travail tel qu’on le connaît depuis Perón », a déjà prévenu un dirigeant syndical de premier plan.

Dans un pays où le mouvement ouvrier reste puissant et où les manifestations peuvent paralyser Buenos Aires en quelques heures, ce projet s’annonce comme le premier véritable test de force du Milei version 2.0.

Un rapport de forces complètement bouleversé

Il y a encore un an, Javier Milei dirigeait un groupe parlementaire minuscule. Les législatives de mi-mandat d’octobre ont tout changé. Avec près de 40 % des voix au niveau national, son parti La Libertad Avanza a réalisé une percée spectaculaire.

Mieux encore : plusieurs députés de la droite traditionnelle ont rallié individuellement le bloc libertarien au cours des dernières semaines. Résultat ? La Libertad Avanza est devenue la première minorité à la Chambre des députés, dépassant même le bloc péroniste historiquement dominant.

Personne n’a la majorité absolue, mais Milei dispose désormais d’une base solide et de la possibilité de nouer des alliances ponctuelles avec les secteurs les plus à droite du spectre politique.

Le calendrier : une course contre la montre

Le timing choisi n’est pas anodin. En convoquant le Parlement juste après son installation, le gouvernement espère profiter de l’effet de surprise et de l’état de grâce post-électoral.

Les nouveaux députés n’auront même pas le temps de s’installer vraiment dans leurs fonctions qu’ils devront déjà voter des textes complexes, souvent de plusieurs centaines d’articles. Les commissions parlementaires risquent de travailler jour et nuit.

Et pour cause : la session extraordinaire s’achève le 30 décembre. Après cette date, il faudra attendre mars 2026 pour reprendre les débats en session ordinaire, sauf nouvelle convocation exceptionnelle.

Les autres réformes qui font débat

Au-delà du travail, deux autres projets cristallisent les tensions.

La réforme du code pénal prévoit un alourdissement général des peines, notamment pour les délits liés à la sécurité publique. Dans un contexte où l’insécurité reste une préoccupation majeure des Argentins, ce durcissement pourrait rencontrer un écho favorable dans l’opinion.

Le projet dit d’« innocence fiscale » vise, lui, à cesser de considérer tout épargnant comme un fraudeur potentiel. L’idée : simplifier drastiquement les justifications d’origine des fonds au-delà d’un certain montant. Un vieux serpent de mer cher aux libéraux argentins.

Enfin, la modification de la loi sur les zones périglaciaires touche directement au développement minier, notamment dans les provinces andines riches en lithium et en cuivre. Un dossier stratégique alors que l’Argentine cherche à attirer massivement les investissements étrangers dans les métaux critiques.

Vers une fin d’année sous haute tension

En résumé, les prochaines semaines s’annoncent décisives pour l’avenir du modèle Milei. Réussira-t-il à transformer l’essai électoral en victoire législative avant les fêtes de fin d’année ?

Les syndicats, eux, préparent déjà la riposte. Plusieurs centrales ont d’ores et déjà annoncé des mobilisations dès les premiers jours de décembre. La rue argentine pourrait bien retrouver ses habitudes de contestation massive.

Entre un président qui n’a plus rien à perdre et des forces d’opposition affaiblies mais toujours combatives, Buenos Aires s’apprête à vivre un mois de décembre politique comme elle n’en a pas connu depuis longtemps.

Une chose est sûre : les vacances, cette année, ne seront pas pour tout le monde.

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