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Trump Redéfinit l’Amérique : Nationalisme et Fin d’une Ère

Trump vient de publier sa Stratégie de sécurité nationale : « l'Europe sera méconnaissable dans 20 ans », les migrations de masse doivent cesser, et les États-Unis ne porteront plus le monde sur leurs épaules. Ce document de 33 pages change tout… mais jusqu'où ira ce virage ?

Et si l’Amérique décidait soudain de ne plus jouer les gendarmes du monde ? C’est exactement le message, brut et sans filtre, que vient d’envoyer Donald Trump avec sa nouvelle Stratégie de sécurité nationale publiée ce vendredi. Un document de 33 pages qui commence par une phrase sans équivoque : « Dans tout ce que nous faisons, nous mettons l’Amérique d’abord. »

Un tournant historique pour les États-Unis

Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, Donald Trump n’a cessé de répéter qu’il voulait en finir avec l’époque où les États-Unis portaient « l’ordre mondial tout entier sur leurs épaules, tel Atlas ». Cette fois, il le met noir sur blanc. Le texte annonce clairement la fin de l’ordre international d’après-guerre et le recentrage total sur les intérêts américains.

Ce n’est pas seulement un changement de ton. C’est une rupture doctrinale profonde. Là où la dernière stratégie de Joe Biden, en 2022, mettait l’accent sur la concurrence avec la Chine et la containment de la Russie, celle de Trump regarde d’abord à l’intérieur des frontières… et juste au-delà.

L’Europe vue comme un continent en perdition

Le passage le plus commenté – et le plus explosif – concerne l’Europe. Le document affirme sans détour : « Si les tendances actuelles se poursuivent, le continent sera méconnaissable dans 20 ans ou moins. » Le texte va plus loin en évoquant une possible « perte des identités nationales » et même un « effacement civilisationnel ».

« Il est plus que plausible que, d’ici quelques décennies au plus tard, les membres de l’OTAN deviennent majoritairement non européens »

Washington pointe du doigt pêle-mêle les politiques migratoires, la chute de la natalité, la censure présumée de la liberté d’expression, la répression de l’opposition politique et « l’asphyxie réglementaire ». Le souhait exprimé est clair : que « l’Europe reste européenne et retrouve sa confiance civilisationnelle ».

À Berlin, la réaction ne s’est pas faite attendre. Le ministre allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul, a sèchement répondu que l’Allemagne n’avait « pas besoin de conseils venant de l’extérieur » sur la liberté d’expression ou l’organisation des sociétés libres.

L’immigration au cœur de la sécurité nationale

L’un des piliers centraux du document est la lutte contre ce qu’il appelle les « migrations de masse ». Le texte est catégorique :

« L’ère des migrations de masse doit prendre fin. La sécurité des frontières est l’élément principal de la sécurité nationale. »

Le lien est fait explicitement entre immigration incontrôlée, terrorisme, trafic de drogue, espionnage et traite des êtres humains. Le terme « invasion » est employé à plusieurs reprises pour qualifier les flux migratoires.

Cette doctrine se traduit déjà dans les faits : suspension des demandes de carte verte et de naturalisation pour les ressortissants de 19 pays, réduction drastique de la durée des permis de travail pour de nombreuses catégories d’immigrés. Des mesures qui prolongent et durcissent la politique anti-immigration menée depuis janvier.

Un recentrage géographique spectaculaire

Le document annonce un « réajustement » majeur de la présence militaire américaine dans le monde. Objectif : répondre aux « menaces urgentes sur notre continent » et s’éloigner des théâtres devenus secondaires.

En clair :

  • Diminution progressive de l’engagement au Moyen-Orient (grâce à l’indépendance énergétique américaine)
  • Renforcement de la « suprématie américaine » en Amérique latine
  • Maintien d’une région Asie-Pacifique « libre et ouverte », mais avec une pression accrue sur le Japon et la Corée du Sud pour qu’ils assument davantage la défense de Taïwan

Sur la Chine, le ton reste ferme mais l’accent est mis sur la concurrence économique plus que sur l’affrontement militaire direct.

La fin du rôle de « policier du monde »

Ce qui frappe dans ce document, c’est surtout ce qu’il ne dit plus. Fini les grandes déclarations sur la défense de la démocratie dans le monde entier. Fini les engagements indéfinis pour maintenir l’ordre libéral international.

À la place, une vision réaliste, presque transactionnelle, des alliances. L’OTAN n’est pas remise en cause frontalement, mais le texte pose la question : des membres majoritairement non-européens continueront-ils à voir leur place dans le monde… et leur alliance avec les États-Unis… de la même manière que les fondateurs ?

C’est une manière polie de dire que Washington pourrait revoir ses engagements si l’Europe change trop profondément de nature.

Vers une nouvelle doctrine américaine

Cette stratégie de sécurité nationale marque l’entrée dans une nouvelle ère. Une ère où les États-Unis ne se voient plus comme le garant ultime de l’ordre mondial, mais comme une puissance parmi d’autres, qui défend d’abord son territoire, ses frontières et ses intérêts immédiats.

Le message envoyé aux alliés est clair : débrouillez-vous. Le message envoyé aux adversaires l’est tout autant : nous ne nous laisserons plus faire.

Reste à voir comment le monde va réagir à ce retrait stratégique. L’Europe, déjà fragilisée par la guerre en Ukraine et les tensions internes, saura-t-elle répondre à ce défi existentiel ? Les pays d’Amérique latine accepteront-ils ce retour en force du « grand frère » américain ? Et la Chine, verra-t-elle dans ce recentrage une opportunité ou une menace accrue ?

Une chose est sûre : avec ce document, Donald Trump ne fait pas que gouverner les États-Unis. Il redessine, à sa manière, les contours du XXIe siècle.

Le monde ne sera plus jamais comme avant. L’Amérique se réveille, et elle a décidé de ne plus porter seule le poids du monde.

À suivre, très attentivement.

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