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Réchauffement Climatique : Le Patron du GIEC Brise le Silence Face au Déni

Le président du GIEC vient de parler sans filtre : « Sans équivoque, les humains sont la cause du changement climatique ». Face à Trump et au déni croissant, il promet un message encore plus clair. Mais sera-t-il entendu avant qu’il ne soit trop tard ?

Et si la plus grande menace pour la planète n’était plus seulement le réchauffement lui-même, mais le refus croissant de le regarder en face ?

Cette semaine, à Paris, plus de 600 scientifiques du monde entier se sont réunis pour lancer le septième cycle de rapports du GIEC. Au milieu d’eux, un homme calme, à l’accent écossais, porte une responsabilité colossale : rappeler inlassablement que le climat se dérègle à cause de nous. Son nom ? Jim Skea, président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.

Un message « sans équivoque » face à la vague de déni

Dans un entretien accordé à l’AFP, Jim Skea n’y va pas par quatre chemins. « Sans équivoque, les humains sont la cause du changement climatique auquel nous assistons », martèle-t-il. Une phrase simple, presque brutale dans sa clarté, répétée comme un mantra face à la montée du scepticisme.

Car oui, le déni climatique progresse à nouveau. Aux États-Unis, en Europe de l’Est, dans certains cercles politiques et sur les réseaux sociaux, on entend de plus en plus souvent que « c’est le Soleil », que « c’était déjà arrivé avant », ou pire, que tout cela serait un « canular ».

« Nous devons continuer à communiquer la science de manière très claire. »

Jim Skea, président du GIEC

Le seuil de 1,5 °C sera « presque inévitablement » franchi

Jim Skea l’avait déjà annoncé il y a quelques mois : le monde va très probablement dépasser, au moins temporairement, la barre symbolique des +1,5 °C dans les prochaines années. Ce n’est plus une hypothèse lointaine, c’est une quasi-certitude à court terme.

Mais cela ne veut pas dire que tout est perdu. Le message du prochain rapport, prévu entre 2028 et 2029, sera limpide :

  • Réductions massives et immédiates des émissions liées à l’énergie et à l’utilisation des terres
  • Développement à grande échelle du retrait du CO₂ de l’atmosphère
  • Comblement urgent des lacunes scientifiques sur ces technologies

« Il manque beaucoup de connaissance sur le retrait du carbone », reconnaît le président du GIEC. Autrement dit : nous n’avons pas encore les outils pour nettoyer l’atmosphère à l’échelle nécessaire.

Le soutien français, un « élan » précieux pour les scientifiques

Cette semaine, la France a apporté un soutien politique fort au GIEC. Le président de la République et trois ministres se sont successivement exprimés pour défendre le travail des experts face au déni croissant.

Pour Jim Skea, ce n’est pas anodin. « Ça a donné beaucoup d’élan aux scientifiques. Quand je leur ai parlé ensuite, ils en étaient très heureux : ça leur a apporté de la confiance et de l’enthousiasme », confie-t-il.

Dans un contexte où certains pays tournent le dos à la science climatique, ce signal politique fort résonne comme un bouclier.

Trump qualifie le climat de « canular » : comment répondre ?

La question était inévitable. Comment faire entendre la voix de la science quand le président le plus puissant du monde traite le changement climatique de « hoax » ?

La réponse de Jim Skea est pragmatique : « Nous devons souligner ce message [de la responsabilité humaine] et nous pouvons l’appuyer par plusieurs types d’explications et de multiples sources de données ».

Pas de colère, pas de politique. Juste la répétition obstinée des faits, encore et encore, jusqu’à ce qu’ils percent le mur du doute.

Les États-Unis absents… mais les scientifiques américains toujours là

L’administration fédérale américaine ne finance plus les chercheurs participant au GIEC et n’est plus présente officiellement. Pourtant, près de 50 auteurs américains étaient bien à Paris cette semaine.

Comment ? Grâce à des fondations philanthropiques privées qui prennent le relais. « Nous bénéficions toujours d’une énorme présence américaine », se félicite Jim Skea.

Quant au risque qu’un pays bloque l’approbation des rapports (chaque mot du résumé pour décideurs doit être validé par les 195 États membres), le président reste serein : « Ça a toujours été difficile, mais nous avons toujours surmonté ces obstacles ».

À retenir : En 35 ans d’histoire du GIEC, un seul résumé pour décideurs n’a pas été approuvé du premier coup… et c’était en 1995.

2028 ou 2029 ? Le calendrier qui peut tout changer

Un bras de fer discret se joue en coulisses. La France, soutenue par de nombreux pays vulnérables, veut que le prochain rapport soit publié dès 2028, juste avant la COP33 en Inde et le second « bilan mondial » de l’Accord de Paris.

D’autres, comme l’Arabie saoudite ou parfois l’Inde, préféreraient 2029. Un an de décalage qui pourrait repousser d’autant les décisions cruciales.

Jim Skea reste neutre : « C’est aux gouvernements de décider. Pour les scientifiques, la seule question est de savoir si le calendrier laisse assez de temps pour produire une évaluation rigoureuse. Ni trop court, ni trop long ».

Le message final de Jim Skea au monde

À la question « Quel est votre message aux dirigeants et au grand public ? », le président du GIEC répond avec un sourire malicieux :

« Retenez votre souffle en attendant ce que nous allons publier dans trois ans environ ! »

Derrière l’humour, la gravité est palpable. Le prochain rapport explorera de nouveaux thèmes, comblera des lacunes majeures, et surtout répondra à la question qui hante tous les climatologues :

Est-il encore possible, à long terme, de limiter le réchauffement à 1,5 °C ?

La réponse ne sera pas joyeuse. Mais elle sera, une fois de plus, sans équivoque.

En attendant, Jim Skea et ses 600 collègues continuent leur travail de fourmi. Mot après mot, donnée après donnée, ils construisent le mur de certitudes scientifiques contre lequel, un jour peut-être, le déni finira par se briser.

Car si le climat change à cause de nous, alors c’est aussi à nous de le sauver.

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