Imaginez la scène : vous êtes ministre de la République, vous vivez dans l’un des quartiers les plus huppés de Paris, à deux pas du jardin du Luxembourg, et pourtant… il suffit de laisser vos clés dans la boîte aux lettres pour que votre appartement soit visité en plein après-midi. C’est exactement ce qui est arrivé à Mathieu Lefèvre, ministre de la Transition écologique, ce mercredi 3 décembre 2025. Une histoire qui mélange négligence, opportunisme criminel et ironie cruelle.
Un cambriolage sans effraction dans le VIe arrondissement
Les faits sont simples et, disons-le, presque comiques si la victime n’était pas un membre du gouvernement. Aucun carreau brisé, aucune porte forcée, pas même une trace de crochetage sur la serrure blindée. Les cambrioleurs – probablement des professionnels – ont tout bonnement utilisé le trousseau de clés que le couple avait laissé… dans sa boîte aux lettres. Une pratique que beaucoup jugeraient irresponsable, surtout quand on occupe un poste aussi exposé.
La compagne du ministre, haut fonctionnaire au musée d’Orsay, est rentrée vers 19 h 15. Elle a immédiatement constaté que la porte était mal verrouillée. À l’intérieur, l’appartement avait été fouillé avec méthode. Bilan : plusieurs bijoux disparus, pour un préjudice estimé à environ 10 000 euros. Aucun document sensible, heureusement, n’aurait été emporté.
La brigade de répression du banditisme saisie
Compte tenu de la qualité des occupants – un ministre en exercice et une haute fonctionnaire – l’enquête a été confiée à la prestigieuse brigade de répression du banditisme (BRB). Cette unité d’élite est habituée à traquer les équipes sud-américaines, géorgiennes ou balkaniques qui écument les beaux quartiers parisiens avec une efficacité redoutable.
Un cambrioleur chevronné, interrogé anonymement, n’a pas caché son étonnement : « Pourquoi le collègue n’a pas refermé à clé en partant ? Avec une porte blindée mal verrouillée, on aurait pu revenir plusieurs fois sans que personne ne s’en rende compte. » Un aveu qui en dit long sur le professionnalisme de certains malfaiteurs… et sur la chance insolente qu’ils ont parfois.
« Je ne comprends pas pourquoi le collègue n’a pas pris soin de verrouiller la porte en repartant. »
Un cambrioleur expérimenté
Mathieu Lefèvre, un parcours fulgurant
À tout juste 39 ans, Mathieu Lefèvre incarne la nouvelle génération macroniste. Proche de Gilles Carrez à ses débuts, puis conseiller de Gérald Darmanin, il a été élu député Renaissance du Val-de-Marne en 2022, réélu en 2024, avant d’être nommé ministre de la Transition écologique à l’automne 2025. Un parcours sans faute… jusqu’à ce fait divers qui risque de le suivre longtemps.
Son appartement, situé dans le très chic VIe arrondissement, était censé être un havre de paix. Raté. Ce cambriolage rappelle que personne n’est à l’abri, pas même ceux qui votent les lois et les budgets de la sécurité intérieure.
La sécurité des ministres : entre discours et réalité
Pendant des années, les responsables politiques nous ont expliqué que l’insécurité était une « perception », que les chiffres baissaient, que les moyens étaient renforcés. Et voilà qu’un ministre se fait cambrioler aussi facilement qu’un simple citoyen pressé. L’ironie est cruelle.
Ce n’est pas la première fois qu’un membre du gouvernement ou un parlementaire est victime de vols à domicile. Mais rarement avec une telle facilité d’accès. On se souvient des cambriolages en série qui avaient touché plusieurs élus en 2022 et 2023, souvent attribués à des équipes étrangères ultra-mobiles.
Ce qui choque ici, c’est le contraste entre le niveau de protection théorique dont bénéficient les ministres – chauffeurs, officiers de sécurité, parfois protection rapprochée – et la réalité d’une simple boîte aux lettres qui devient une porte d’entrée grande ouverte.
Les cambriolages à Paris : une spécialité bien rodée
Paris reste une cible privilégiée pour les cambrioleurs professionnels. Les techniques évoluent : plus discrets, plus rapides, ils misent sur l’effet de surprise et les erreurs des victimes. Laisser ses clés dans la boîte aux lettres ? C’est offrir une invitation en or.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en Île-de-France, les cambriolages de logements ont augmenté de près de 15 % entre 2023 et 2025 dans certains arrondissements centraux. Les équipes sud-américaines (dites « crews ») ou géorgiennes opèrent souvent en plein jour, entre 14 h et 18 h, quand les habitants sont absents.
Leur modus operandi est rodé :
- Repérage discret des boîtes aux lettres non sécurisées
- Récupération des clés oubliées ou mal cachées
- Entrée calme, fouille méthodique
- Sortie sans bruit, porte refermée… ou pas
Dans le cas de Mathieu Lefèvre, les voleurs ont même eu le culot – ou la prudence – de ne pas tout saccager. Preuve qu’on avait affaire à des habitués.
Quand la négligence rencontre l’opportunisme
On pourrait presque sourire de la situation si elle n’était pas révélatrice d’un phénomène plus large. Combien de Parisiens, pressés ou distraits, laissent encore leurs clés dans leur boîte aux lettres « juste pour aujourd’hui » ? Beaucoup trop.
Mais quand la victime est un ministre chargé, entre autres, de la sécurité écologique (et donc indirectement de la résilience du pays), la symbolique devient cinglante. Celui qui prône la vigilance face au réchauffement climatique a oublié la plus élémentaire des vigilances domestiques.
Et pendant ce temps, la brigade de répression du banditisme épluche les caméras de vidéosurveillance du quartier, relève les empreintes, tente de tracer les bijoux volés sur le marché noir. Un travail de fourmi pour une erreur de débutant.
Une affaire qui ne manquera pas de faire sourire les oppositions
Sur les réseaux sociaux, les commentaires ironiques pleuvent déjà. « Quand on oublie ses clés dans la boîte aux lettres mais qu’on veut nous faire la morale sur la sécurité » ; « Le ministre de la Transition écologique recycle… ses clés » ; « Prochaine mesure : interdiction des boîtes aux lettres non sécurisées ? »
Au-delà de l’anecdote, cette affaire pose une question de fond : nos élites sont-elles vraiment en phase avec la réalité quotidienne des Français ? Quand on vit dans un appartement de standing avec porte blindée, on pourrait penser que les règles élémentaires de sécurité sont intégrées. Apparemment pas toujours.
Ce cambriolage, aussi bénin soit-il en comparaison d’autres drames, risque de coller longtemps à la peau de Mathieu Lefèvre. Comme un rappel que même au sommet de l’État, on reste humain… et parfois étourdi.
Au moment où nous publions ces lignes, aucune interpellation n’a eu lieu. Les bijoux, eux, ont probablement déjà pris le chemin de receleurs bien organisés. L’enquête continue. Et quelque part dans Paris, un ministre vérifie sans doute deux fois que ses clés sont bien dans sa poche avant de fermer sa porte blindée.









