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Turquie Inquiète : Alerte sur les Attaques Énergétiques en Mer Noire

La Turquie vient de convoquer les ambassadeurs russe et ukrainien après des attaques ukrainiennes sur des pétroliers russes à quelques milles de ses côtes. Ankara lance un cri d’alarme : « Laissez l’énergie hors de la guerre »… mais jusqu’où cette escalade peut-elle aller sans couper l’Europe et la Turquie du gaz russe ?

Imaginez-vous en pleine hiver, le chauffage qui s’éteint brutalement parce que, à des milliers de kilomètres, un drone a fait exploser un terminal pétrolier. Ce scénario, qui paraissait encore lointain il y a quelques mois, devient aujourd’hui une menace bien réelle en mer Noire.

La Turquie sort du silence et tape du poing sur la table

Mercredi soir, le ton est monté d’un cran à Ankara. La Turquie a officiellement convoqué les ambassadeurs de Russie et d’Ukraine au ministère des Affaires étrangères. Objectif : exprimer une profonde inquiétude face à l’escalade des attaques contre les infrastructures énergétiques dans les eaux de la mer Noire.

Le message délivré est clair et sans détour : « Laissez les infrastructures énergétiques en dehors de cette guerre. » Une phrase prononcée la veille par le ministre turc de l’Énergie, Alparslan Bayraktar, qui résume à elle seule la position d’Ankara.

Des attaques à quelques encablures des côtes turques

La semaine dernière, l’Ukraine a lancé une opération audacieuse avec des drones navals contre un important terminal pétrolier russe et deux pétroliers liés à la fameuse flotte fantôme – ces navires qui permettent à Moscou de contourner les sanctions occidentales.

Le plus préoccupant pour la Turquie ? Ces frappes ont eu lieu à seulement quelques dizaines de milles nautiques de ses côtes. Autrement dit, pratiquement dans son jardin maritime.

Le Kremlin, de son côté, accuse Kiev d’avoir visé cette semaine un troisième navire transportant de l’huile de tournesol et battant pavillon russe. Accusation fermement démentie par l’Ukraine.

« Des actes de piraterie »

Vladimir Poutine, président russe

Le président russe n’a pas mâché ses mots et a menacé de « couper l’Ukraine de la mer ». Une déclaration qui a fait bondir Recep Tayyip Erdogan, lequel a immédiatement qualifié la situation d’escalade inquiétante.

Pourquoi la Turquie se sent-elle directement concernée ?

La réponse tient en trois mots : sécurité énergétique et géographie.

La mer Noire n’est pas seulement une zone de conflit. C’est aussi un couloir vital pour le transit d’hydrocarbures. Pétrole, gaz, céréales : tout passe par là. Et surtout, tout passe par les détroits turcs – le Bosphore et les Dardanelles – que Ankara contrôle en vertu de la convention de Montreux.

Une perturbation dans cette zone aurait des répercussions immédiates sur :

  • Les marchés mondiaux de l’énergie
  • Le quotidien des populations turques et européennes
  • La stabilité régionale

Le ministre de l’Énergie turc l’a rappelé avec force : il est impératif de « maintenir les flux énergétiques ininterrompus en mer Noire, dans nos détroits, ainsi que dans les oléoducs ».

Le gaz russe, une dépendance assumée mais surveillée

Interrogé sur les déclarations de Donald Trump qui, fin septembre, avait sommé la Turquie de cesser d’acheter du pétrole russe, Alparslan Bayraktar a répondu sans détour.

« La Russie est un fournisseur très fiable. »

Alparslan Bayraktar, ministre turc de l’Énergie

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2024, Moscou assure environ 40 % des importations de gaz turc – un chiffre qui a pu grimper jusqu’à 60 % certaines années. Un contrat arrive à échéance le 31 décembre prochain, et les discussions sont en cours pour le prolonger.

Mais attention : Ankara ne veut pas mettre tous ses œufs dans le même panier. « Nous avons besoin de gaz russe, iranien, azerbaïdjanais et de nombreuses autres sources », a précisé le ministre. La diversification reste la priorité absolue.

Une diplomatie du fil du rasoir

Depuis le début du conflit en février 2022, la Turquie joue un rôle d’équilibriste. Membre de l’OTAN, elle refuse pourtant de participer aux sanctions contre Moscou. Elle maintient des relations économiques étroites avec la Russie tout en livrant des drones Bayraktar à l’Ukraine.

Ce positionnement unique lui permet de parler à tout le monde. Elle a d’ailleurs été à l’origine de l’accord sur l’exportation des céréales ukrainiennes en 2022, avant son effondrement.

Aujourd’hui, face à cette nouvelle menace sur l’énergie, Ankara tente une nouvelle fois de jouer les médiateurs. Mais le défi est immense : comment convaincre deux belligérants de préserver des infrastructures dont la destruction est devenue une arme stratégique ?

Et demain ?

Une source au ministère turc de la Défense a indiqué jeudi qu’Ankara travaillait activement « contre les menaces maritimes liées à la guerre ». Sans plus de précisions, mais le message est clair : la Turquie est prête à protéger ses intérêts.

Car au-delà de la rhétorique, une chose est sûre : si la mer Noire devient un champ de bataille énergétique, ce n’est pas seulement l’Ukraine ou la Russie qui en paieront le prix. C’est toute l’Europe, la Turquie en première ligne, qui risque de se retrouver dans le noir et le froid.

Et vous, pensez-vous que cette escalade peut encore être contenue ? Ou sommes-nous à l’aube d’une nouvelle phase du conflit, où l’énergie devient l’arme ultime ?

Résumé des points clés :

  • Attaques ukrainiennes sur terminal pétrolier et navires russes près des côtes turques
  • Convocation des ambassadeurs russe et ukrainien à Ankara
  • Appel turc à épargner les infrastructures énergétiques
  • Russie = 40 % du gaz turc en 2024
  • Risque majeur sur les marchés mondiaux et le quotidien des populations

Une chose est certaine : la Turquie ne restera pas les bras croisées à regarder la mer Noire s’enflammer. La question est de savoir si son appel sera entendu… avant qu’il ne soit trop tard.

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