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Climat : La France Poursuivie pour Insuffisance d’Efforts

L’État français est de nouveau attaqué en justice, cette fois pour ne pas assumer sa « part juste » dans l’effort mondial contre le réchauffement. Responsabilité historique, capacités financières… L’association veut forcer Paris à être beaucoup plus ambitieux. La décision tombera fin 2026, mais d’ici là, les émissions continuent de baisser trop lentement. Que va-t-il se passer ?

Et si votre pays était poursuivi parce qu’il ne fait pas assez pour sauver la planète ?

C’est exactement ce qui arrive à la France en ce moment même. Une association environnementale vient de révéler qu’elle a déposé, dès janvier dernier, un recours devant le Conseil d’État pour contraindre l’État à respecter enfin sa « part juste » dans la lutte mondiale contre le réchauffement climatique.

Une nouvelle bataille judiciaire pour le climat

Ce n’est pas la première fois que l’État français se retrouve sur le banc des accusés pour ses manquements climatiques. En 2021, il avait déjà été condamné deux fois dans le cadre de « l’Affaire du siècle ». Mais cette fois, l’angle d’attaque est différent et potentiellement encore plus explosif.

L’association à l’origine du recours ne se contente plus contente de pointer un simple retard. Elle reproche à la France de ne pas respecter sa contribution équitable à l’effort planétaire, en tenant compte non seulement de sa population actuelle, mais aussi de ses émissions historiques et de ses moyens financiers.

Qu’est-ce que la « part juste » exactement ?

Le concept peut paraître abstrait, mais il est au cœur des négociations climatiques internationales depuis des années. L’idée est simple : tous les pays n’ont pas la même responsabilité face au changement climatique.

Un pays comme la France, qui a massivement émis du CO2 pendant la révolution industrielle et tout au long du XXe siècle pour construire sa richesse actuelle, porte une responsabilité bien plus lourde qu’un pays en développement qui découvre à peine l’industrialisation.

Pour illustrer cela, le délégué général de l’association utilise une métaphore parlante : « C’est comme l’impôt sur le revenu. Il nous semble normal qu’une personne qui gagne des millions paie proportionnellement plus qu’une auxiliaire de vie. »

« De la même manière qu’il nous semble normal que quelqu’un qui gagne des millions paye un impôt sur le revenu un peu plus élevé en proportion de son revenu qu’une auxiliaire de vie par exemple. »

Des chiffres qui parlent d’eux-mêmes

Entre 1850 et 2021, la France a émis environ 2,3 % des émissions mondiales cumulées de CO2. Cela peut paraître peu, mais rapporté à sa population (moins de 1 % de l’humanité), c’est considérable.

Ajoutez à cela une capacité d’action bien supérieure à celle de nombreux pays, et vous obtenez un pays qui, selon les études scientifiques citées par l’association, est très en deçà de ce qu’il devrait faire pour être à la hauteur de ses responsabilités.

L’association ne donne pas de chiffre précis (car il dépend des méthodologies), mais elle affirme que le constat est partagé par de nombreux travaux scientifiques reconnus.

Un rythme de baisse des émissions qui s’essouffle

Le plus inquiétant, c’est que la trajectoire récente. Alors que la France avait réussi à réduire ses émissions de façon significative ces dernières années, le rythme ralentit dangereusement.

En 2024, la baisse n’a été que de 1,8 % selon le Citepa, l’organisme chargé du bilan officiel. Et pour 2025, on n’anticipe plus qu’une diminution de 0,8 %. Autant dire que l’objectif de neutralité carbone en 2050 s’éloigne à grands pas.

L’association pointe aussi des reculs concrets : réduction du périmètre de MaPrimeRénov, baisse du Fonds Vert, manque d’ambition global… Des signaux qui vont tous dans le même sens.

Les principaux reculs pointés par l’association :

  • Réduction du champ d’application de MaPrimeRénov
  • Baisse significative du Fonds Vert
  • Absence de nouvelles mesures structurantes
  • Objectifs nationaux moins ambitieux que les engagements européens

La réponse du gouvernement

Interrogé, le ministère de la Transition écologique assure que « la France demeure pleinement mobilisée » et met en avant le rôle joué dans l’adoption récente de la loi climat européenne et la feuille de route ambitieuse de l’UE.

Il annonce également la présentation prochaine d’une nouvelle version renforcée de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC-3), qui doit fixer les trajectoires pour les années à venir.

Reste à voir si ces annonces suffiront à convaincre le Conseil d’État, qui rendra sa première décision… fin 2026 seulement.

Pourquoi cette procédure est historique

Ce recours est le premier en France à s’appuyer explicitement sur le principe de justice climatique et de responsabilité différenciée pour exiger des objectifs plus ambitieux.

Jusqu’à présent, les contentieux climatiques portaient surtout sur le non-respect des objectifs déjà fixés par la loi. Ici, on demande à la justice de reconnaître que ces objectifs eux-mêmes sont insuffisants au regard des engagements internationaux et du principe d’équité.

Si l’association obtient gain de cause, cela pourrait forcer la France à revoir complètement sa copie et à adopter des mesures bien plus radicales.

Et maintenant ?

La procédure est longue : première décision attendue fin 2026, avec probablement plusieurs années de bataille probable ensuite.

Mais le simple fait que ce recours existe met une pression énorme sur le gouvernement. Car pendant que la justice délibère, les émissions, elles, continuent d’augmenter dans l’atmosphère.

La question que tout le monde se pose : la France va-t-elle enfin prendre la mesure de ses responsabilités historiques et de ses capacités, ou continuer à se cacher derrière des objectifs a minima ?

L’avenir du climat français – et une partie de l’avenir du climat mondial – se joue peut-être en ce moment même dans les couloirs du Conseil d’État.

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