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LVMH et Arnault Nient Tout Détournement d’Actions Hermès

Nicolas Puech réclame 14 milliards d'euros à LVMH et Bernard Arnault, affirmant avoir été dépouillé de ses actions Hermès par son ancien gestionnaire. Le groupe nie farouchement et parle de campagne orchestrée. Mais qui dit la vérité dans cette guerre des titans du luxe ?

Imaginez posséder près de 6 % du capital d’Hermès, une fortune colossale de plus de 14 milliards d’euros… et vous réveiller un matin en découvrant que ces actions ont purement et simplement disparu. C’est exactement ce que vit aujourd’hui Nicolas Puech, l’un des héritiers de la mythique maison au carré de soie. Face à lui ? Rien de moins que le géant LVMH et son patron, Bernard Arnault, accusés d’avoir profité de la situation. Une affaire qui sent la poudre dans l’univers feutré du luxe français.

Une nouvelle bataille judiciaire éclate entre deux empires du luxe

Le ton est monté d’un cran ces derniers jours. LVMH a publié un communiqué particulièrement ferme pour répondre aux accusations portées par Nicolas Puech. Le groupe dirigé par Bernard Arnault réfute catégoriquement tout détournement d’actions Hermès et assure n’avoir jamais détenu la moindre part “cachée” de la maison rivale.

Cette sortie médiatique fait suite à l’assignation en justice déposée par l’héritier solitaire d’Hermès. Nicolas Puech estime avoir été dépossédé de ses six millions de titres, représentant 5,76 % du capital, par son ancien gestionnaire de fortune, aujourd’hui décédé. Une perte évaluée à 14,3 milliards d’euros au cours actuel. Autant dire que l’enjeu financier est astronomique.

Que reproche exactement Nicolas Puech à LVMH ?

L’héritier affirme que ses actions ont été transférées sans son consentement réel. Selon lui, Eric Freymond, son ex-conseiller financier suisse décédé en juillet dernier, aurait orchestré des manœuvres douteuses. Et c’est là que LVMH entrerait en scène : Nicolas Puech soupçonne le groupe de Bernard Arnault d’avoir bénéficié, directement ou indirectement, de ces transferts opaques.

Des accusations que le leader mondial du luxe balaye d’un revers de main. Dans son communiqué, LVMH parle d’une procédure initiée “après avoir été débouté à de nombreuses reprises par la justice helvétique”. Le message est clair : cette nouvelle action en France ne serait qu’une tentative désespérée de relancer un dossier déjà clos outre-Sarine.

« LVMH et son actionnaire réaffirment avec force n’avoir, à aucun moment, détourné des actions de la société Hermès International, de quelque façon que ce soit ou à l’insu de quiconque et ne détenir aucune action cachée »

Cette phrase, extraite du communiqué officiel, résume la position inflexible du groupe. Bernard Arnault et sa famille refusent catégoriquement d’être associés à quelque irrégularité que ce soit.

Retour sur une rivalité historique

Pour comprendre l’ampleur du dossier, il faut remonter plus de dix ans en arrière. En 2010, LVMH avait pris tout le monde de court en annonçant détenir déjà plus de 17 % d’Hermès, acquis via des montages financiers complexes utilisant des equity swaps. Une opération perçue comme une tentative d’OPA rampante par la famille Hermès, qui s’était alors barricadée derrière un pacte d’actionnaires ultra-protecteur.

La guerre fut totale : communiqués assassins, procédures judiciaires tous azimuts, enquêtes de l’Autorité des marchés financiers… Jusqu’à l’accord de paix signé en septembre 2014 sous l’égide du président du tribunal de commerce de Paris. LVMH s’était alors engagé à redistribuer ses actions Hermès à ses propres actionnaires et les deux maisons avaient officiellement enterré la hache de guerre.

Mais aujourd’hui, Nicolas Puech – qui avait toujours fait cavalier seul, refusant de rejoindre le pacte familial – semble rouvrir une blessure que beaucoup pensaient cicatrisée.

L’accord de 2014 et le non-lieu de 2015 au cœur du débat

LVMH ne manque pas de rappeler les conclusions judiciaires passées. L’accord de 2014 avait été validé par la justice. Plus encore, deux juges d’instruction avaient rendu une ordonnance de non-lieu en octobre 2015, suivant les réquisitions du parquet national financier. Hermès International s’était même désisté de sa constitution de partie civile.

Autant d’éléments que le groupe brandit aujourd’hui comme autant de preuves de sa bonne foi. Pour Bernard Arnault et ses équipes, l’affaire était close depuis longtemps. La nouvelle plainte de Nicolas Puech apparaît donc comme une tentative de contourner des décisions déjà rendues.

Chronologie clé de l’affaire Hermès-LVMH :

  • 2010 : LVMH révèle détenir plus de 17 % d’Hermès via des instruments dérivés
  • 2010-2013 : Guerre ouverte entre les deux groupes
  • 2013 : L’AMF sanctionne LVMH pour manquement à l’information du marché
  • Septembre 2014 : Accord de paix sous l’égide du tribunal de commerce
  • Octobre 2015 : Non-lieu prononcé par la justice
  • 2025 : Nouvelle plainte de Nicolas Puech en France

Une campagne de presse dénoncée par LVMH

Dans son communiqué, le groupe de Bernard Arnault va plus loin. Il dénonce “depuis plusieurs semaines, une campagne de presse manifestement coordonnée” visant à nuire à son image. Le ton est offensif : LVMH “se réserve le droit d’engager toute action nécessaire pour faire valoir ses droits”.

Cette sortie rare montre à quel point le dossier est pris au sérieux en interne. Car même si le groupe clame haut et fort sa sérénité, l’idée qu’un héritier Hermès puisse publiquement l’accuser de détournement d’actions représente une menace réputationnelle majeure dans l’univers du luxe où l’image est reine.

Le rôle trouble du gestionnaire de fortune décédé

Au centre des accusations de Nicolas Puech trône la figure d’Eric Freymond. Ce conseiller financier suisse, chargé de gérer une partie du patrimoine de l’héritier, est accusé d’avoir transféré les fameuses actions sans l’accord éclairé de son client. Problème : Eric Freymond est décédé en juillet dernier, emportant avec lui une partie des réponses.

Les procédures engagées en Suisse par Nicolas Puech se sont soldées par des échecs répétés. La justice helvétique n’aurait pas retenu la thèse du détournement. C’est donc en France que l’héritier tente aujourd’hui une nouvelle chance, estimant que le préjudice a été subi sur le sol français et que LVMH, entreprise française, pourrait être impliquée.

Pourquoi cette affaire resurgit-elle maintenant ?

Plusieurs éléments permettent de comprendre le timing. D’abord, le décès d’Eric Freymond a peut-être levé certains obstacles procéduraux. Ensuite, le cours de l’action Hermès a explosé ces dernières années, transformant ces 5,76 % en une fortune encore plus colossale – de quoi motiver une bataille judiciaire longue et coûteuse.

Enfin, Nicolas Puech a toujours été le membre “dissident” de la famille. Refusant de signer le pacte d’actionnaires qui lie les autres branches familiales, il a souvent été perçu comme l’enfant terrible d’Hermès. Cette nouvelle procédure pourrait aussi s’inscrire dans une forme de revanche personnelle.

« Le sort de ces actions est au cœur d’une affaire complexe aux multiples rebondissements, sur fond de rivalité historique entre Hermès et LVMH »

Cette phrase résume parfaitement l’enchevêtrement des intérêts familiaux, financiers et industriels qui caractérise le dossier.

Les enjeux pour LVMH et Bernard Arnault

Au-delà du montant astronomique réclamé, c’est l’image même du premier groupe de luxe mondial qui est en jeu. Bernard Arnault a bâti sa réputation sur sa rigueur et sa maîtrise absolue de ses opérations. Être publiquement accusé, même sans fondement selon lui, de profiter d’un éventuel détournement d’actions représente une attaque directe contre des décennies de construction d’une réputation d’homme d’affaires irréprochable.

Le fait que LVMH parle ouvertement de “campagne coordonnée” montre que le groupe se prépare à une guerre de communication longue. Des avocats parmi les plus réputés de Paris sont probablement déjà à l’œuvre pour contrer chaque argument de la partie adverse.

Et Hermès dans tout ça ?

Officiellement, la maison Hermès reste silencieuse sur cette nouvelle procédure. Il faut dire que la situation est délicate : Nicolas Puech reste un actionnaire important, même s’il a toujours refusé l’unité familiale. La direction actuelle, emmenée par Axel Dumas, préfère sans doute rester en dehors d’un conflit qui oppose un héritier solitaire à un concurrent historique.

Mais derrière les portes closes, on imagine que l’état-major suit l’affaire de très près. Toute décision de justice pourrait avoir des répercussions sur la structure actionnariale du groupe et sur la solidité du pacte d’actionnaires qui protège Hermès depuis 2010.

Vers un nouveau feuilleton judiciaire ?

Tout porte à croire que cette affaire ne fait que commencer. Les sommes en jeu, les egos, l’histoire commune entre les deux groupes : tous les ingrédients sont réunis pour un dossier qui pourrait s’étirer sur des années. Les prochains mois diront si la justice française donnera suite aux demandes de Nicolas Puech ou si, comme en Suisse, elle considérera que les accusations ne tiennent pas.

Une chose est sûre : dans le petit monde du luxe français, où l’on cultive habituellement la discrétion, cette bataille risque de faire couler encore beaucoup d’encre. Et peut-être, au bout du compte, de révéler des vérités que certains auraient préféré garder enfouies.

Affaire à suivre de très près…

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