Imaginez la scène : une salle municipale à Rouen, des drapeaux tricolores, des candidats qui défendent leur programme… et soudain, les lumières tamisées, la musique électronique qui monte, et une drag-queen en talons aiguilles et paillettes qui surgit pour un show endiablé. Ce n’est pas une soirée privée dans le Marais, c’est un meeting officiel de La France Insoumise. Et pas n’importe lequel : celui porté par Maxime Da Silva, Alma Dufour et la très médiatique Mathilde Panot. Ce choix a mis le feu aux poudres.
Quand le cabaret s’invite en politique : le show qui a choqué la France de province
Le 2 décembre 2025, à Rouen, la campagne municipale a pris une tournure inattendue. Au lieu du traditionnel discours enflammé sur le logement ou l’écologie, les militants présents ont eu droit à une performance de la Queen Délice d’Org J, artiste drag connue pour ses shows très… affirmés. Tenue extravagante, maquillage outrancier, chorégraphie suggestive : tous les codes du genre étaient réunis. Sur scène, à quelques mètres, les candidats LFI applaudissaient chaleureusement.
Ce n’était pas une surprise improvisée. L’événement avait été annoncé, préparé, validé. Preuve que, pour une partie de la gauche radicale, le drag n’est plus seulement un loisir nocturne : c’est devenu un étendard politique, un moyen de « déconstruire » les normes et d’affirmer une vision progressiste sans compromis.
Qui est la Queen Délice d’Org J ?
Derrière le personnage se cache un artiste qui ne fait pas dans la demi-mesure. Son nom de scène, jeu de mots explicite, annonce déjà la couleur. Ses performances mêlent humour corrosif, messages LGBTQ+ très militants et une esthétique volontairement provocatrice. Sur les réseaux, elle n’hésite pas à moquer les « réacs », les « fachos » et tous ceux qui osent critiquer la culture woke.
Inviter cette figure dans un meeting municipal n’est donc pas anodin. C’est un signal fort envoyé à la fois aux militants de la première heure et à ceux qui reprochent à LFI de s’être « embourgeoisée ». Le message est clair : on reste fidèles à l’idée d’une révolution culturelle totale, même si cela choque la France des ronds-points et des petites villes.
Mathilde Panot, Alma Dufour, Maxime Da Silva : pourquoi ce choix assumé ?
Mathilde Panot, habituée des plateaux télé et des coups d’éclat à l’Assemblée, n’a pas hésité une seconde. Sur scène, elle a salué la performance avec enthousiasme, voyant dans ce show une forme de « résistance joyeuse » face à l’ordre moral conservateur. Pour elle, le drag incarne la liberté d’être soi, un combat qui doit être porté partout, y compris dans les mairies.
Alma Dufour, candidate locale et figure montante, a abondé dans le même sens. Quant à Maxime Da Silva, tête de liste à Rouen, il a justifié l’invitation en expliquant vouloir « ouvrir les esprits » et montrer que la gauche qu’il représente n’a pas peur de la différence. Un discours rodé, mais qui sonne creux pour beaucoup de Français qui peinent déjà à payer leurs factures.
« On assume totalement. Le drag, c’est de l’art, c’est de la liberté, c’est une réponse à ceux qui veulent nous remettre dans des cases. »
— Un proche de la campagne LFI à Rouen
Une fracture béante entre deux France
Cette séquence illustre parfaitement le fossé qui s’est creusé. D’un côté, une partie de la gauche urbaine, jeune, diplômée, qui voit dans ces performances une avancée sociétale majeure. De l’autre, une France plus populaire, souvent issue des classes moyennes ou ouvrières, qui y voit une provocation inutile, un mépris de classe déguisé en progressisme.
Dans les commentaires sous les vidéos du meeting, les réactions sont cinglantes. « C’est ça qu’ils proposent pour gérer une ville ? », « On parle crèches, sécurité, impôts… et eux ils font venir une drag-queen ? », « Déconnexion totale ». Des mots qui reviennent en boucle et qui montrent que le malaise est profond.
Le drag comme arme politique : une stratégie risquée
Ce n’est pas la première fois que LFI joue cette carte. On se souvient des polémiques autour des ateliers « drag queen story hour » dans certaines bibliothèques, ou des prises de position très tranchées sur les questions de genre. Mais là, on passe un cap : on sort du cadre militant pour entrer dans l’arène électorale pure.
En faisant monter une drag-queen sur scène, LFI sait qu’elle va choquer. Et c’est précisément l’objectif : polariser, cliver, occuper le terrain médiatique. Quitte à perdre des voix chez les électeurs modérés ou les anciens communistes attachés à une certaine idée de la dignité ouvrière. C’est un pari dangereux à quelques mois des municipales.
Rouen, laboratoire du progressisme décomplexé
La ville de Rouen n’a pas été choisie au hasard. Déjà marquée par des débats houleux sur l’accueil des migrants, les zones à faibles émissions ou les subventions aux associations LGBTQ+, elle est devenue un terrain d’expérimentation pour la gauche la plus radicale. Ce meeting entre parfaitement dans cette logique : tester jusqu’où on peut aller dans l’affichage culturel sans perdre complètement l’électorat.
Les résultats des prochaines élections nous diront si les Rouennais sont prêts à suivre cette ligne ou s’ils sanctionneront, comme ailleurs, ce qu’ils perçoivent comme une dérive mondaine et hors-sol.
Et la République dans tout ça ?
Beaucoup s’interrogent : où est passée la neutralité républicaine ? Un meeting municipal financé en partie par des fonds publics peut-il devenir un cabaret ? La mairie de Rouen, encore tenue par la gauche, a-t-elle validé cette utilisation des lieux ? Les questions restent pour l’instant sans réponse claire.
Pendant ce temps, les opposants s’organisent. Des collectifs de parents, des associations familiales et des élus de droite préparent déjà des recours et des campagnes pour dénoncer ce qu’ils appellent une « instrumentalisation politique de la provocation ».
Conclusion : vers une radicalisation culturelle irréversible ?
Cet épisode rouennais n’est pas qu’une anecdote. Il révèle une tendance lourde : une partie de la gauche a choisi de faire de la culture woke non plus un combat parmi d’autres, mais le cœur de son identité politique. Quitte à creuser un peu plus le fossé avec une large partie du peuple qu’elle prétend défendre.
En 2026, quand les Français retourneront aux urnes, ils se souviendront peut-être de cette drag-queen sur la scène de Rouen. Et ils se demanderont si c’est vraiment ça, le changement dont ils ont besoin.
La politique française entre dans une ère où le spectacle prend parfois le pas sur le projet. Et ce n’est peut-être que le début.









