Il y a des victoires qui laissent un goût amer. Dimanche soir, la Section Paloise a écrasé La Rochelle 53 à 33 sous les projecteurs du Hameau, prenant même le point de bonus offensif dans un festival d’essais. Mais au milieu de l’euphorie, une image a glacé tout le Béarn : Émilien Gailleton, le prodige de 22 ans, quittant la pelouse le bras en écharpe, le visage fermé. Le diagnostic est tombé ce lundi : luxation de l’épaule gauche, absence estimée entre deux et quatre mois.
Un tournant cruel pour le jeune international
À seulement 22 ans, Émilien Gailleton s’était imposé comme l’une des plus belles pépites du rugby français. Douze sélections avec le XV de France, une aisance technique rare, une capacité à casser les lignes digne des plus grands centres mondiaux. Beaucoup le voyaient déjà titulaire indiscutable pour le prochain Tournoi des 6 Nations. Ce coup du sort remet tout en question.
La blessure est survenue en seconde période, sur une action anodine en défense. Un plaquage un peu trop haut, un mauvais appui, et l’épaule qui sort. Le staff médical palois a immédiatement compris la gravité. Le joueur lui-même, en publiant sur Instagram « +5 pts et une épaule en moins, à dans quelques mois… », a confirmé ce que tout le monde redoutait.
Deux scénarios possibles, deux durées très différentes
Le corps médical de la Section Paloise a deux options devant lui. La première : un traitement conservateur avec immobilisation longue et rééducation intensive. Dans ce cas, le retour pourrait intervenir aux alentours de début février, soit environ deux mois d’absence. La seconde, beaucoup plus probable selon nos informations : une intervention chirurgicale pour stabiliser l’articulation. Là, le délai grimperait à quatre mois minimum, repoussant le retour vers la fin mars ou début avril.
Quatre mois, cela signifierait manquer quasiment toute la phase aller de Champions Cup, les matchs cruciaux contre les Sharks, Leicester ou le Leinster, ainsi qu’une grande partie du Tournoi des 6 Nations 2026 avec les Bleus. Un vrai crève-cœur pour celui qui avait brillé lors de la tournée d’automne 2024.
« C’est une perte énorme. Émilien apportait cette touche de génie, cette capacité à créer du danger à chaque ballon touché. On va devoir se réorganiser, mais on sait qu’il reviendra encore plus fort. »
Un membre du staff palois, sous couvert d’anonymat
Pau déjà décimé au centre
La tuile est d’autant plus rude que la Section Paloise était déjà privée, lors du même match, de son autre centre titulaire Nathan Decron (commotion) et que Tumua Manu reste incertain pour plusieurs semaines. Sébastien Piqueronies se retrouve avec un chantier XXL à ce poste clé du jeu béarnais.
Les solutions internes existent : Emilien Monziols, capable de dépanner au centre, ou le jeune Théo Attissogbe qui peut être décalé. Mais aucun n’a l’expérience ni l’impact immédiat de Gailleton. Le recrutement d’un joker médical est sérieusement étudié en haut lieu.
Les matchs que Gailleton va très probablement manquer :
- Reception de Clermont (7 décembre)
- Déplacement à Toulouse (28 décembre)
- Champions Cup : Sharks, Leicester, Leinster (décembre-janvier)
- Tournoi des 6 Nations 2026 (février-mars, si scénario à 4 mois)
- 1/8e et 1/4 de Champions Cup (avril, si qualification)
Un profil rare à protéger
Ce qui rend la blessure encore plus cruelle, c’est la trajectoire fulgurante du joueur. Formé à Agen, révélé à 19 ans seulement, Gailleton a brûlé les étapes. Son intelligence de jeu, sa vitesse, sa lecture des intervalles en font un joueur à part. Les comparaisons avec Yannick Jauzion ou plus récemment Jonathan Danty fusent, mais le Béarnais possède une touche personnelle : cette capacité à accélérer en un contre-un qui rend fous les défenses.
Le staff du XV de France suit l’évolution avec attention. Fabien Galthié avait fait de lui un titulaire en puissance pour la Coupe du monde 2027. Cette blessure, même si elle n’est pas dramatique à long terme, rappelle la fragilité de ces jeunes talents exposés très tôt au très haut niveau.
Comment la Section va-t-elle rebondir ?
Paradoxalement, Pau reste sur trois victoires consécutives et pointe à la 5e place du Top 14. Le pack impressionne, Joe Simmonds dirige merveilleusement le jeu, et l’équipe montre une solidité nouvelle. Mais perdre son meilleur trois-quart centre pendant plusieurs mois peut faire basculer une saison.
Les semaines à venir diront si les Béarnais parviennent à maintenir leur dynamique. Le calendrier est infernal : Clermont, Toulon, Toulouse, puis la Champions Cup. Autant de matchs où l’absence de Gailleton risque de peser lourd dans les moments clés.
En attendant, tout le rugby français croise les doigts pour que le jeune prodige revienne rapidement et en pleine possession de ses moyens. Parce qu’un joueur comme Émilien Gailleton, on n’en croise pas tous les ans. Et quand il est là, il illumine les pelouses.
On lui souhaite le meilleur des rétablissements. Et on a hâte de le revoir casser des lignes, sourire aux lèvres, sous le maillot vert et blanc. Le rugby a besoin de ses étincelles.









