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Australie Interdit les Réseaux Sociaux aux Moins de 16 Ans

En Australie, un téléphone dans les mains d’un enfant est devenu « la pire arme qui soit », selon Mia Bannister, dont le fils de 14 ans s’est suicidé après un harcèlement incessant et une exposition toxique aux réseaux. Dès le 10 décembre, TikTok, Instagram et les autres seront interdits aux moins de 16 ans. Cette loi va-t-elle sauver des vies… ou pousser les ados vers des plateformes encore plus dangereuses ?

Imaginez remettre à votre enfant de 12 ans un objet qui pourrait, en quelques clics, détruire sa confiance, son image de soi et, dans le pire des cas, le pousser au bord du gouffre. Cet objet existe déjà. Il tient dans la poche et s’appelle smartphone.

L’Australie Frappe Fort : Interdiction des Réseaux Sociaux avant 16 Ans

Dès le 10 décembre prochain, l’Australie deviendra le premier pays au monde à interdire purement et simplement l’accès à TikTok, Instagram, Snapchat, Facebook et Twitch aux moins de 16 ans. Les plateformes qui ne respecteront pas la règle s’exposent à des amendes pouvant atteindre 32 millions de dollars. Une mesure radicale, portée par un drame personnel qui a bouleversé le pays.

« C’était mon meilleur ami » : le cri de Mia Bannister

Mia Bannister porte le nom de son fils tatoué sur l’avant-bras : Ollie. À tout juste 14 ans, Ollie s’est donné la mort. Harcèlement scolaire, messages haineux en boucle, photos déformées, défis anorexiques sur TikTok et Snapchat… Tout s’est enchaîné très vite.

« Si cette loi avait existé un an plus tôt, Ollie serait encore là », confie-t-elle, la voix brisée. « En donnant un téléphone à un enfant, on lui remet la pire arme qui soit. »

Depuis le drame, Mia a créé une association, intervient dans les écoles et informe sur les troubles alimentaires qui touchent aussi les garçons – un sujet encore trop tabou. Son combat a trouvé écho jusqu’au Parlement australien.

Des Chiffres Qui Font Peur

Une étude de l’association Mission Australia, menée auprès de plus de 10 000 jeunes de 15 à 19 ans, révèle l’ampleur du phénomène :

  • 97 % des adolescents consultent les réseaux sociaux tous les jours
  • Près de la moitié y passe au moins trois heures quotidiennement
  • Ceux qui limitent leur usage à moins de trois heures déclarent aller mieux et avoir de meilleures relations sociales

Ces chiffres ne sont pas isolés. Partout dans le monde, psychiatres et pédiatres tirent la sonnette d’alarme sur l’impact des écrans sur le développement cérébral, l’estime de soi et le sommeil des plus jeunes.

Une Loi Pleine de Questions

Si l’intention est saluée par de nombreuses familles, la mise en œuvre soulève des interrogations. Comment les plateformes vont-elles vérifier l’âge des utilisateurs ? Pièce d’identité ? Reconnaissance faciale ? Les géants de la tech dénoncent déjà un texte « vague » et « inapplicable ».

Certaines applications échappent pour l’instant à la mesure : WhatsApp, Discord, Roblox ou Pinterest. Mais le gouvernement se réserve le droit de les inclure ultérieurement.

« On sait que les interdictions généralisées ne fonctionnent souvent pas », prévient Catherine Page Jeffery, spécialiste des médias à l’Université de Sydney. « Les jeunes risquent de migrer vers des plateformes moins connues, encore plus dangereuses et sans aucune modération. »

Quand les Réseaux Deviennent un Métier… à 12 Ans

Ava Chanel Jones a 12 ans. Pendant le confinement, elle a commencé à poster des vidéos de danse sur Instagram. Aujourd’hui, elle compte plus de 11 400 abonnés, touche un revenu mensuel de Meta, a lancé sa marque de vêtements et reçoit des colis de grandes enseignes.

Sa mère Zoe supervise tout : les messages d’inconnus atterrissent dans un dossier caché, les partenariats sont validés ensemble. « Je veux qu’elle développe des compétences tout en étant protégée », explique-t-elle.

Mais dans quelques jours, Ava pourrait perdre l’accès à son compte. La famille a déjà modifié les paramètres d’âge dans l’espoir de contourner la future interdiction. Des milliers d’autres jeunes influenceurs se retrouvent dans la même situation.

La Position Officielle : « Une Solution Puissante »

Julie Inman Grant, commissaire australienne à la sécurité en ligne, défend bec et ongles la mesure :

« C’est une solution vraiment puissante. Il n’y a pas de remède miracle, mais nous devons agir. »

Le gouvernement mise aussi sur une prise de conscience collective : pousser les parents à retarder l’âge du premier smartphone et à mieux encadrer l’usage.

Et Maintenant ?

L’Australie ouvre une voie que d’autres pays observent de près. Déjà, des voix s’élèvent en Europe et aux États-Unis pour des mesures similaires. Mais la question reste entière : faut-il interdire ou mieux encadrer ?

Pour Mia Bannister, le choix est fait. Chaque jour, elle parle aux parents, aux enseignants, aux adolescents. Elle montre la photo d’Ollie et répète inlassablement la même phrase :

« Je le fais pour lui. Et pour tous les enfants que nous allons sauver. »

Le 10 décembre, des millions de comptes d’enfants australiens deviendront inaccessibles. Certains y verront une victoire historique pour la protection de l’enfance. D’autres, le début d’une partie de cache-cache sans fin entre ados et législateurs.

Une chose est sûre : le débat sur la place des réseaux sociaux dans la vie de nos enfants ne fait que commencer.

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