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JO 2026 : Premiers Russes et Bélarusse Autorisés sous Drapeau Neutre

Pour la première fois depuis le début du conflit, trois patineurs russe et bélarusse viennent d’être validés pour les JO d’hiver 2026… mais sous drapeau neutre et après un filtrage drastique. La délégation sera-t-elle limitée à quelques individus ou d’autres sports vont-ils suivre ?

Imaginez la scène : une patinoire illuminée à Cortina d’Ampezzo, un public suspendu au moindre mouvement, et sur la glace, une jeune athlète qui tournoie avec grâce… mais sans aucun symbole national sur son costume. C’est exactement ce qui attend Adeliia Petrosian, Petr Gumennik et Viktoriia Safonova aux Jeux olympiques d’hiver 2026. Trois noms, trois destins, et surtout les tout premiers athlètes russe et bélarusse officiellement autorisés à participer sous drapeau neutre.

Une décision très attendue du CIO

Jeudi soir, le Comité international olympique a publié sa première liste d’athlètes individuels neutres (AIN) éligibles pour Milan-Cortina. Sans surprise, elle est particulièrement courte : deux patineurs artistiques russes, Petr Gumennik (23 ans) et Adeliia Petrosian (18 ans), ainsi que la Bélarusse Viktoriia Safonova (22 ans). Trois sportifs qui ont déjà franchi deux obstacles majeurs.

Le premier filtre avait été posé par l’Union internationale de patinage (ISU) lors des qualifications. Le second, beaucoup plus politique, provenait directement du panel indépendant mis en place par le CIO. Ce comité vérifie point par point que chaque candidat respecte les critères stricts définis après l’invasion de l’Ukraine en février 2022.

Quels sont exactement ces critères ?

Ils sont simples sur le papier, mais implacables dans la pratique :

  • Concourir uniquement à titre individuel (pas d’équipe ni de relais)
  • N’avoir aucun lien actuel ou passé avec l’armée russe ou les agences de sécurité
  • N’avoir jamais exprimé publiquement de soutien à la guerre en Ukraine
  • Respecter l’ensemble du code antidopage

Ces règles, déjà appliquées lors des JO de Paris 2024, sont reconduites à l’identique pour 2026. Résultat : sur des centaines de sportifs potentiels, seuls trois passent pour l’instant le tamis.

Un contraste saisissant avec Paris 2024

L’été dernier, 15 Russes et 17 Bélarusses avaient réussi à se qualifier sous statut neutre. Ils avaient décroché cinq médailles au total, essentiellement en lutte, taekwondo et trampoline. En hiver, le tableau s’annonce bien plus sombre pour les deux pays.

Pourquoi une telle différence ? Tout simplement parce que les fédérations internationales d’hiver se montrent beaucoup plus sévères que leurs homologues d’été. Là où la majorité des sports olympiques estivaux avaient rouvert la porte dès 2023, plusieurs disciplines phares de l’hiver maintiennent une exclusion totale.

Les sports d’hiver verrouillés à double tour

Le ski alpin, le ski de fond, le saut à ski, le combiné nordique et le snowboard – tous sous l’égide de la FIS – restent inaccessibles. La fédération internationale de biathlon fait de même. Quant à la luge, elle a longtemps suivi le mouvement, jusqu’à un récent jugement du Tribunal arbitral du sport.

Fin octobre, le TAS a estimé que l’exclusion systématique des lugeurs russes était disproportionnée. Cette décision a ouvert une brèche. Un recours russe contre la FIS est actuellement en cours et doit être tranché avant le 10 décembre. Si le verdict est favorable, plusieurs athlètes pourraient encore grossir la maigre délégation neutre.

« La liste sera mise à jour en fonction des décisions du comité d’examen », précise sobrement le CIO.

Traduction : pour l’instant, on reste sur trois noms, mais la porte n’est pas totalement fermée dans d’autres disciplines.

Qui sont ces trois pionniers ?

Petr Gumennik, 23 ans, est un habitué des podiums en Grand Prix ISU. Champion de Russie 2020, il possède un quadruple boucle piqué dans son répertoire et une expressivité rare. Discret sur les réseaux, il n’a jamais affiché de position politique claire, ce qui lui a sans doute permis de passer entre les gouttes.

Adeliia Petrosian n’a que 18 ans mais déjà un palmarès impressionnant : championne d’Europe 2024, elle est l’une des rares patineuses au monde à tenter le quadruple rittberger en compétition. Son jeune âge joue en sa faveur – elle était mineure au moment des faits reprochés à certains aînés.

Viktoriia Safonova, côté bélarusse, représente quant à elle un cas plus isolé. Installée en partie en Allemagne pour s’entraîner, elle a toujours évolué en marge du système d’État bélarusse, ce qui facilite son éligibilité.

Un souvenir encore vif : Pékin 2022

Il y a quatre ans à Pékin, juste avant le début du conflit, la délégation du Comité olympique russe – déjà sous sanction dopage et privée d’hymne – avait terminé deuxième du tableau des médailles avec 32 breloques. Le contraste avec la situation actuelle est brutal.

Aujourd’hui, l’espoir d’or comme Valieva, Shcherbakova ou les stars du ski de fond sont soit retirés, soit toujours bannis. Seuls quelques individualités, souvent jeunes ou moins exposées médiatiquement, parviennent à se faufiler.

Le patinage artistique reste donc, pour l’instant, l’unique discipline hivernale à avoir ouvert une petite fenêtre. Faut-il y voir un symbole ? Cette discipline, historiquement dominée par la Russie, conserve une aura particulière et des critères d’évaluation plus subjectifs, rendant parfois les sanctions plus difficiles à justifier objectivement.

Et maintenant ?

Les prochaines semaines seront décisives. Le recours devant le TAS concernant la FIS, les éventuelles décisions pour le hockey sur glace (toujours en suspens), et les qualifications dans les disciplines moins médiatisées pourraient encore modifier la donne.

Mais une chose semble acquise : la délégation neutre de Milan-Cortina 2026 restera symbolique. Loin des 200 athlètes russes de Pékin, loin même des 32 de Paris. Une page du sport de haut niveau se tourne, entre géopolitique et quête d’universalité olympique.

Sur la glace italienne, trois silhouettes évolueront donc sans hymne ni couleurs nationales. Un spectacle à la fois magnifique et mélancolique, qui rappellera à chaque programme court ou libre que le sport, même au plus haut niveau, n’échappe jamais totalement à l’histoire.

À suivre dans les prochains mois : le verdict du TAS pour le ski, l’évolution du hockey sur glace, et les possibles surprises en short-track ou en curling. Le compte à rebours est lancé.

En attendant, le monde du sport retient son souffle. Car derrière les triples axels et les quadruples salchows, c’est toute la question de la place des athlètes dans les conflits internationaux qui se joue, une fois encore, sous les projecteurs olympiques.

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