Il est un peu plus de deux heures du matin, dans la nuit du samedi 23 au dimanche 24 novembre 2025. Deux amis, tous deux sapeurs-pompiers de Paris, sortent d’un pub du 18e arrondissement après une soirée de détente bien méritée. Rien ne laisse présager le cauchemar qui va suivre.
À peine ont-ils tourné au coin de la rue que trois individus surgissent. Sans un mot, sans raison apparente, les coups pleuvent. Poings, pieds, une violence brutale et gratuite. En quelques dizaines de secondes, les deux hommes sont à terre, sonnés, le visage en sang. Leurs agresseurs repartent avec téléphones, portefeuille et cartes bancaires.
Une agression d’une rare violence dans un quartier déjà sous tension
Le secteur Barbès – Goutte d’Or – Château Rouge n’est pas réputé pour sa tranquillité nocturne, mais l’acharnement dont ont été victimes ces deux fonctionnaires dépasse l’entendement. L’un d’eux, encore choqué, racontera plus tard aux enquêteurs : « Ils se sont jetés sur nous comme des animaux. On n’a même pas eu le temps de comprendre. »
Les pompiers, habitués à porter secours dans les situations les plus extrêmes, se retrouvent cette fois-ci de l’autre côté de la chaîne : victimes. L’ironie est cruelle. Ceux qui risquent leur vie chaque jour pour sauver les Parisiens finissent la nuit aux urgences, le corps couvert de bleus et de plaies.
Une piste suivie à la trace grâce… à une friteuse
Moins d’une heure après l’agression, les trois suspects sont interpellés. Comment ? Tout simplement parce qu’ils tentaient d’acheter un repas dans un fast-food du quartier… avec la carte bancaire encore tiède de l’une des victimes.
Le système de géolocalisation de la carte, combiné à la rapidité des enquêteurs de la brigade anticriminalité, a permis une arrestation éclair. Les trois hommes, âgés de 21 à 28 ans, étaient connus des services de police. Très connus, même.
Trois profils, un point commun : l’OQTF ignorée
Tous les trois sont de nationalité algérienne. Tous les trois sont en situation irrégulière sur le territoire français. Et surtout : tous les trois faisaient l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), prononcée depuis plusieurs mois, voire plusieurs années pour l’un d’entre eux.
Leur casier judiciaire respectif est éloquent : vols avec violence, trafic de stupéfiants, outrages, rébellions… Des condamnations qui se sont accumulées sans jamais déboucher sur une expulsion effective.
« On a l’impression que ces mesures d’éloignement ne servent strictement à rien », confiera un policier présent lors de l’interpellation.
Comparution immédiate et condamnation ferme : enfin une réponse pénale ?
Présentés en comparution immédiate dès le lundi suivant, les trois agresseurs ont été jugés rapidement – un rare exemple de traitement expéditif dans ce type d’affaires.
Le tribunal correctionnel de Paris a prononcé :
- 3 ans de prison ferme pour le principal auteur
- 2 ans et 18 mois ferme pour ses complices
- Interdiction définitive du territoire français à l’issue de la peine
- Mandat de dépôt immédiat
Des peines lourdes, saluées par le parquet qui avait requis la fermeté. Mais beaucoup, parmi les collègues des victimes et dans l’opinion publique, y voient une réponse tardive : ces hommes n’auraient jamais dû se trouver là pour commettre cette agression.
Les OQTF : ces mesures d’éloignement qui ne partent jamais
En 2024, plus de 140 000 OQTF ont été prononcées en France. Combien ont été réellement exécutées ? À peine 7 %. Un taux d’exécution dramatiquement bas qui pose la question de l’utilité même de ces mesures.
L’Algérie, en particulier, accepte très difficilement le retour de ses ressortissants délinquants. Les laissez-passer consulaires sont délivrés au compte-gouttes, quand ils le sont. Résultat : des milliers de personnes sous OQTF continuent de vivre – et parfois de délinquer – sur le sol français.
Le cas des trois agresseurs du 18e n’est malheureusement pas isolé. On se souvient de l’assassinat de Philippe Monguillot, chauffeur de bus à Bayonne, par deux individus sous OQTF. Ou encore du meurtre du père Hamel à Saint-Étienne-du-Rouvray. La liste est longue et douloureuse.
Les pompiers, cibles récurrentes de la violence urbaine
Ce n’est pas la première fois que les sapeurs-pompiers sont pris pour cibles. En intervention, ils sont régulièrement caillassés dans certains quartiers. Mais cette fois, c’est hors service, en simples citoyens, qu’ils ont été attaqués.
Le syndicat Autonomous des sapeurs-pompiers professionnels a réagi avec vigueur : « Nos collègues risquent leur vie tous les jours. Ils n’ont pas à subir cela quand ils rentrent chez eux. Cette agression est une insulte à l’ensemble de la profession. »
Depuis 2017, les agressions contre les pompiers ont augmenté de plus de 30 %. Un chiffre qui glace le sang.
Un sentiment d’impunité qui gangrène certains quartiers
Dans le 18e arrondissement, les riverains ne sont pas surpris. « On voit les mêmes têtes depuis des années », témoigne un commerçant de la rue de la Goutte d’Or. « La police les connaît, les arrête, et deux mois plus tard ils sont de retour. »
Ce sentiment d’impunité, alimenté par des expulsions qui ne se font pas et des peines parfois perçues comme trop légères, crée un terrain fertile à la récidive. L’agression des deux pompiers en est la triste illustration.
Vers un durcissement nécessaire ?
Cette affaire relance le débat sur l’exécution effective des OQTF et sur la coopération avec certains pays d’origine. Plusieurs responsables politiques, de tous bords, demandent désormais que l’aide au développement soit conditionnée à l’acceptation du retour des délinquants.
D’autres proposent la création de centres de rétention spécifiques pour les étrangers multirécidivistes en attente d’expulsion. Des mesures qui existent déjà… mais qui restent lettre morte faute de volonté politique réelle.
En attendant, deux pompiers parisiens pansent leurs blessures physiques et morales. Et des milliers de Français se demandent jusqu’à quand ce cycle infernal va continuer.
Parce qu’au-delà de cette agression, c’est tout un système qui est montré du doigt : celui d’une immigration hors contrôle et d’une justice parfois impuissante face à la récidive étrangère. Une réalité que trop de responsables refusent encore de regarder en face.
À lire aussi : Quand des individus sous OQTF continuent de semer la terreur en toute impunité, c’est la sécurité de tous les Français qui est menacée. Cette affaire n’est pas un « fait divers » isolé. C’est le symptôme d’un mal bien plus profond.
Les deux pompiers, eux, ont repris le travail. Avec, au fond d’eux, cette question lancinante : et si c’était à recommencer demain ?









