Imaginez des centaines de milliers de personnes réunies dans les rues de Liverpool, des familles entières, des enfants sur les épaules de leurs parents, tous vêtus de rouge pour célébrer le sacre tant attendu de leur club adoré. L’ambiance est électrique, les chants résonnent, les sourires illuminent les visages. Et puis, en quelques secondes, tout bascule.
Le 26 mai dernier, ce qui devait rester un des plus beaux jours de l’histoire récente du Liverpool FC s’est transformé en cauchesonore. Une voiture a littéralement foncé dans la foule massée dans le centre-ville. Bilan : 134 blessés, dont huit enfants et un bébé de six mois. Mercredi, l’homme au volant a reconnu les faits, en larmes, mettant brutalement fin à son procès.
Un plaider coupable qui a bouleversé la salle d’audience
Paul Doyle, 54 ans, père de trois adolescents, s’est présenté devant le tribunal le visage fermé. La veille, il avait encore nié les faits. Mais ce mercredi, la voix brisée par l’émotion, il a changé d’avis. Un à un, il a reconnu les 31 chefs d’accusation retenus contre lui.
Parmi ces chefs : douze blessures volontaires graves, tentative sur dix-sept autres personnes, violence et conduite dangereuse. Des qualifications lourdes qui reflètent l’ampleur du drame vécu par les supporters ce jour-là.
« Ce n’est que par chance que personne n’a été tué »
Inspecteur John Fitzgerald, police du Merseyside
Sept minutes de terreur pure
Les images tournées par les supporters sont insoutenables. On y voit la voiture progresser lentement puis accélérer brutalement, percutant les corps les uns après les autres. Des victimes se retrouvent coincées sous le véhicule, d’autres sont projetées sur le capot.
L’incident a duré sept longues minutes. Sept minutes pendant lesquelles Paul Doyle a klaxonné, insulté les piétons, refusant de s’arrêter malgré les cris et les tentatives de l’arrêter. C’est finalement un courageux supporter qui a réussi à monter dans la voiture et à passer la boîte automatique en position parking.
Cette intervention héroïque a probablement sauvé de nombreuses vies. Sans elle, le bilan aurait pu être bien plus dramatique.
Comment la voiture a-t-elle pu accéder au parcours ?
Les rues du centre-ville étaient pourtant fermées à la circulation. Selon l’accusation, Paul Doyle aurait profité du passage d’une ambulance pour s’engouffrer derrière elle. Une fois à l’intérieur du périmètre sécurisé, il s’est retrouvé bloqué par la foule en liesse.
Au lieu d’attendre patiemment, il s’est énervé. Les vidéos montrent un homme de plus en plus agité, gesticulant, klaxonnant sans discontinuer. Puis la décision fatale : accélérer droit dans la masse humaine.
Un profil qui intrigue
Ancien militaire de la Royal Navy, Paul Doyle travaillait dans la cybersécurité jusqu’à son arrestation. Un parcours qui contraste violemment avec l’acte commis. Père de famille vivant en banlieue de Liverpool, rien ne semblait prédire un tel passage à l’acte.
À son arrestation, la police l’avait d’abord placé en garde à vue pour conduite sous stupéfiants. Cette piste a finalement été abandonnée. Aucune substance n’a été retrouvée et cette accusation n’a pas été retenue.
La piste terroriste a été écartée très rapidement également. Les autorités ont d’ailleurs communiqué très vite sur l’identité britannique et la couleur de peau du suspect pour éviter les rumeurs, un été marqué par les émeutes après le drame de Southport encore dans tous les esprits.
Les motivations restent floues
C’est peut-être l’élément le plus troublant de cette affaire. Pourquoi ? Pourquoi un homme apparemment sans histoire a-t-il décidé de foncer dans une foule en fête ?
Selon le parquet, il était venu chercher des amis ayant assisté à la parade. Pris dans les embouteillages et les rues fermées, il aurait perdu patience. Mais passer de l’agacement à une violence aussi extrême reste difficile à comprendre.
L’accusation parle d’une colère qui monte, d’une frustration qui explose. Mais pour l’instant, Paul Doyle n’a donné aucune explication claire sur ses motivations profondes. La sentence, prévue mi-décembre, apportera peut-être plus de réponses.
Un traumatisme qui marque encore la ville
Des mois après les faits, de nombreuses victimes se remettent encore de leurs blessures physiques et psychologiques. Une cinquantaine avaient dû être hospitalisées, certaines avec des traumatismes graves.
Le Liverpool FC, par la voix de son communiqué officiel, a exprimé l’espoir que ce plaider coupable apporte « un peu de paix » aux personnes touchées. Le club parle d’un « nombre sans précédent » de supporters venus célébrer le titre conquis après tant d’années d’attente.
Mohamed Salah, Virgil van Dijk et les autres joueurs avaient défilé pendant quatre heures sur le bus impérial. Quatre heures de communion totale avec les fans. Quatre heures brutalement interrompues par le chaos.
Une enquête hors norme
La police du Merseyside a reçu des centaines de vidéos tournées par les supporters présents sur place. Un matériel précieux qui a permis de reconstituer seconde par seconde le déroulement des faits.
Ces images citoyennes ont joué un rôle déterminant dans la construction du dossier d’accusation. Elles montrent sans ambiguïté la détermination de Paul Doyle à avancer coûte que coûte, malgré les obstacles humains.
À retenir :
- 134 blessés dont 8 enfants
- Parade célébrant le titre de Premier League 2024-2025
- 7 minutes de course folle dans la foule
- Plaider coupable prononcé en larmes le mercredi
- Sentence attendue à partir du 15 décembre
Cette affaire reste un traumatisme profond pour la ville de Liverpool. Elle rappelle à quel point la joie collective peut parfois basculer en quelques instants dans l’horreur la plus absolue.
Le procès, qui devait durer plusieurs semaines, s’est donc terminé dès son deuxième jour. Reste maintenant à comprendre pleinement ce qui a poussé Paul Doyle à commettre l’irréparable. La sentence, prononcée dans quelques semaines, clôturera peut-être ce chapitre douloureux. Mais pour beaucoup de familles, les cicatrices, elles, mettront bien plus de temps à disparaître.









