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Grèce : 1,76 Milliard pour Sauver la Natalité en 2026

La Grèce va injecter 1,76 milliard d’euros en 2026 pour inverser la chute de la natalité. Allègements fiscaux record, priorité aux familles nombreuses… mais le Premier ministre prévient : l’argent ne suffira pas. Quelles sont les vraies causes de cette crise démographique et les solutions envisagées ?

Imaginez un pays baigné de soleil, berceau de la démocratie, où les berceaux se font de plus en plus rares. En Grèce, le silence des cours d’école commence à résonner plus fort que les cris des enfants. Avec seulement 7,3 naissances pour 1 000 habitants, le pays se classe parmi les derniers de l’Union européenne. Face à cette réalité inquiétante, le gouvernement vient d’annoncer une réponse massive : près de deux milliards d’euros pour tenter de renverser la tendance.

Une stratégie globale inédite pour la démographie grecque

Pour la première fois de son histoire récente, la Grèce se dote d’un plan complet dédié à la question démographique. Lors d’un grand colloque organisé à Athènes, le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis a dévoilé les grandes lignes de cette offensive. Au cœur du dispositif : une enveloppe exceptionnelle de 1,76 milliard d’euros qui sera déployée dès 2026.

Cet argent ne sera pas distribué au hasard. Il financera surtout un vaste programme d’allègements fiscaux ciblés sur les familles. L’idée est simple et puissante : plus une famille a d’enfants, moins elle paie d’impôts. Une philosophie qui place la natalité au centre des priorités budgétaires nationales.

« Nous avons donné la priorité à la protection de la famille, en mettant au cœur de notre politique une récompense fiscale pour les familles, en fonction du nombre d’enfants. Plus le nombre d’enfants augmente, plus les impôts diminuent. »

Kyriakos Mitsotakis, Premier ministre grec

Des chiffres qui font froid dans le dos

Pour comprendre l’urgence, il suffit de regarder les statistiques. La Grèce affiche un taux de natalité brut de 7,3 pour 1 000 habitants. Seuls l’Espagne (6,9) et l’Italie (6,7) font pire en Europe. Derrière ces nombres froids se cache une réalité brutale : le pays perd chaque année des milliers d’habitants par simple solde naturel négatif.

Le vieillissement de la population s’accélère. Les retraites deviennent insoutenables. Les écoles ferment dans les villages. Et les hôpitaux manquent cruellement de sang neuf pour renouveler les générations. Sans inversion rapide de la courbe, la Grèce risque de voir sa population fondre de manière irréversible d’ici trente ans.

Comparaison européenne du taux de natalité (2024)

  • France : 10,9 ‰
  • Irlande : 11,2 ‰
  • Suède : 10,5 ‰
  • Grèce : 7,3 ‰
  • Espagne : 6,9 ‰
  • Italie : 6,7 ‰

Source : estimations Eurostat

L’argent résout-il tout ? La mise en garde du Premier ministre

Kyriakos Mitsotakis a pourtant tenu à tempérer l’enthousiasme. Oui, les 1,76 milliard d’euros représentent un effort budgétaire colossal. Oui, les baisses d’impôts vont soulager concrètement des milliers de foyers. Mais non, l’argent seul ne suffira pas.

Le chef du gouvernement conservateur l’a répété avec force : le problème démographique ne se réduit pas à une question de pouvoir d’achat ou de prospérité économique. D’autres facteurs, plus profonds, plus culturels, parfois plus intimes, sont en jeu. Il faut les identifier, les comprendre, et surtout les traiter avec la même détermination que les mesures fiscales.

Quels sont ces facteurs ? Le report incessant de l’âge du premier enfant (souvent après 35 ans), le coût réel ou perçu de l’éducation, la difficulté de concilier carrière et vie familiale, la précarité du marché du travail pour les jeunes, le manque de logements abordables… La liste est longue et complexe.

Immigration : une réponse partielle et très encadrée

Face à cette crise, certains proposent d’ouvrir davantage les portes à l’immigration. La Grèce, pays de passage et parfois de destination, connaît bien le sujet. Mais la position du gouvernement reste ferme : distinction claire entre immigration illégale (combattue sans concession) et immigration légale (encouragée quand elle répond à des besoins précis).

Les accords bilatéraux avec des pays comme l’Égypte, l’Inde ou le Bangladesh permettent d’accueillir des travailleurs dans l’agriculture, le tourisme ou le BTP. Ces migrants économiques rentrent chez eux à l’issue de leur contrat. Quant aux réfugiés bénéficiant d’une protection internationale, le pays assume ses obligations humanitaires tout en veillant à leur intégration.

Récemment, un premier contingent limité de réfugiés soudanais a été accueilli pour travailler dans les champs. Une expérience pilote qui pourrait être étendue si les résultats sont concluants.

« Nous sommes très stricts en matière d’immigration illégale. Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour empêcher quiconque d’entrer illégalement dans notre pays. »

Cette ligne politique ne fait pas l’unanimité. Certains y voient une réponse trop timide face à l’ampleur du défi démographique. D’autres saluent au contraire la volonté de préserver l’identité nationale tout en répondant aux besoins économiques.

La famille nombreuse redevient-elle rentable ?

Revenons au cœur du plan : les incitations fiscales. Le principe est progressif et sans ambiguïté. Une famille avec un enfant bénéficiera déjà d’une réduction significative. Avec deux enfants, l’avantage sera plus important. À partir de trois enfants, la baisse d’impôts devient réellement conséquente.

Cette logique n’est pas nouvelle en Europe de l’Est (Hongrie, Pologne) où des politiques similaires ont été mises en place avec des résultats mitigés mais réels. En Grèce, l’effort budgétaire est proportionnellement plus massif. Reste à savoir si les jeunes couples, souvent endettés et précaires, se laisseront convaincre par cette carotte fiscale.

Car avoir un enfant, ce n’est pas seulement une question d’argent. C’est aussi une question de temps, de confiance en l’avenir, de stabilité professionnelle. Les 1,76 milliard d’euros pourront alléger le budget familial, mais ils ne créeront pas à eux seuls l’envie d’enfant si les conditions de vie restent trop incertaines.

Vers un modèle méditerranéen réinventé ?

La Grèce a longtemps été un pays de familles nombreuses. Les photos en noir et blanc des années 60 montrent des tablées immenses, des villages pleins d’enfants. Ce modèle s’est effrité avec la modernité, l’urbanisation, l’entrée massive des femmes sur le marché du travail et la crise économique de 2009-2018 qui a laissé des cicatrices profondes.

Aujourd’hui, le défi consiste à réconcilier tradition et modernité. À offrir aux jeunes générations la possibilité d’avoir des enfants sans renoncer à leurs aspirations professionnelles ou personnelles. Les crèches gratuites, les congés parentaux mieux indemnisés, le télétravail, le logement abordable : toutes ces pièces du puzzle devront être assemblées pour que les mesures fiscales portent réellement leurs fruits.

Le gouvernement semble en prendre conscience. Les 1,76 milliard d’euros ne sont qu’une première étape. D’autres annonces sont attendues : réforme des aides à la petite enfance, incitations au retour des expatriés, politique du logement… La bataille pour la natalité ne fait que commencer.

En attendant, une chose est sûre : rarement un pays européen n’avait mis autant d’argent sur la table pour tenter de faire renaître le désir d’enfant. La Grèce joue gros. L’Europe entière regarde. Et les jeunes couples hellènes, eux, attendent des signaux concrets que demain sera plus accueillant pour les berceaux.

Parce qu’au fond, derrière les milliards et les tableaux Excel, il y a une question simple et immense : voulons-nous encore transmettre la vie ? La réponse grecque, pour l’instant, est un « oui » retentissant… mais prudent.

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