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Taïwan Se Prépare à une Invasion Chinoise d’ici 2027

Le président taïwanais Lai Ching-te fixe 2027 comme deadline : son armée doit être prête à repousser une invasion chinoise. 40 milliards de dollars supplémentaires, un « T-Dome » antimissile… Mais l’opposition bloque déjà le budget et Pékin promet l’échec. La guerre est-elle inévitable ?

Et si 2027 devenait l’année où tout bascule dans le détroit de Taïwan ? Mercredi, le président Lai Ching-te a fixé une échéance claire et brutale : d’ici là, l’armée taïwanaise devra atteindre un « haut niveau de préparation » pour faire face à une possible invasion chinoise. Derrière cette annonce, un plan massif de 40 milliards de dollars supplémentaires et une volonté farouche de rendre l’île « imprenable ».

Une deadline qui fait trembler la région

Ce n’est pas un hasard si l’année 2027 revient sans cesse dans les discours. Elle coïncide avec le centenaire de la fondation de l’Armée populaire de libération et nombreux sont les analystes qui estiment que Pékin pourrait choisir ce moment symbolique pour régler la « question taïwanaise » par la force. Lai Ching-te l’a compris : il reste moins de deux ans pour transformer radicalement les capacités de défense de l’île.

Dans un éditorial publié dans un grand quotidien américain, le président taïwanais a été on ne peut plus direct : « Nous cherchons à renforcer la dissuasion en ajoutant des coûts et des incertitudes plus élevées au processus de décision de Pékin concernant l’usage de la force. » Traduction : faire comprendre à la Chine que conquérir Taïwan serait tellement coûteux qu’elle y réfléchirait à deux fois.

40 milliards pour changer la donne

Le chiffre donne le vertige : 40 milliards de dollars supplémentaires, étalés sur plusieurs années. C’est plus que ce qui avait été évoqué jusqu’à présent. Cette enveloppe colossale doit servir à deux choses essentielles :

  • Acheter massivement du matériel militaire américain dernier cri
  • Développer en urgence des capacités propres, notamment le futur « T-Dome », un bouclier antimissile multicouche inspiré du Dôme de fer israélien

Lai Ching-te veut porter les dépenses de défense à plus de 3 % du PIB dès 2026, puis à 5 % à l’horizon 2030. Un effort budgétaire jamais vu à Taïwan depuis des décennies et qui place l’île parmi les nations les plus militarisées proportionnellement à sa richesse.

« Mon message ici est clair : l’engagement de Taïwan pour la paix et la stabilité est indéfectible »

Lai Ching-te, président de Taïwan

Pékin promet l’échec total

À Pékin, la réaction ne s’est pas fait attendre. Mercredi, le ministère chinois des Affaires étrangères a balayé les annonces taïwanaises d’un revers de main : « Les tentatives de résister à l’unification et de rechercher l’indépendance par des moyens militaires ne réussiront jamais. » Un message qui, sous son apparente froideur, cache une menace à peine voilée.

Quelques jours plus tôt, Xi Jinping avait lui-même rappelé à Donald Trump, lors d’un appel téléphonique, que la question de Taïwan restait « un enjeu international majeur ». Le timing est loin d’être anodin : il intervient juste après la première vente d’armes américaines à Taïwan validée depuis le retour du milliardaire à la Maison Blanche – 330 millions de dollars de matériel approuvés mi-novembre.

Un Parlement qui peut tout bloquer

Mais tout n’est pas aussi simple pour le président taïwanais. Au Parlement, son parti ne dispose pas de la majorité. Le Kuomintang (KMT), favorable à un rapprochement avec la Chine continentale, contrôle les cordons de la bourse avec son allié, le Parti du peuple taïwanais.

La nouvelle présidente du KMT, Cheng Li-wun, n’a pas mâché ses mots : « Taïwan n’a pas autant d’argent » et Lai Ching-te « joue avec le feu » en risquant de transformer la région en « poudrière ». L’opposition a déjà annoncé qu’elle examinerait chaque dollar de ce budget hors norme à la loupe.

Conséquence : même si le président veut aller vite, rien ne garantit que le Parlement suivra. Et chaque mois perdu est un mois gagné pour la Chine.

Les États-Unis mettent la pression

Washington, principal allié et fournisseur d’armes de Taïwan, suit tout cela de très près. Mercredi, le directeur de l’Institut américain à Taïwan – l’équivalent d’une ambassade – a été clair : renforcer les capacités de défense de l’île est un « prérequis », quelle que soit la vision politique des partis taïwanais.

Le message est limpide : pas question de laisser les querelles internes affaiblir Taïwan face à la menace chinoise. D’autant que les États-Unis ont tout intérêt à ce que l’île reste un rempart crédible dans leur stratégie indo-pacifique.

Le Japon prêt à entrer dans la danse ?

Et puis il y a Tokyo. Ces dernières semaines, la nouvelle Première ministre japonaise, Sanae Takaichi, a franchi un cap en déclarant qu’une attaque contre Taïwan pourrait justifier une intervention militaire japonaise. Des propos perçus comme une provocation à Pékin, mais qui montrent à quel point la question taïwanaise dépasse désormais le simple face-à-face sino-américain.

Le Japon, qui considère Taïwan comme vital pour sa propre sécurité – l’île se trouve à moins de 200 km d’Okinawa –, sort progressivement de sa posture strictement défensive d’après-guerre.

Vers une Taïwan « hérisson »

La stratégie de Lai Ching-te s’apparente à celle du « porc-épic » : rendre l’île si douloureuse à attaquer que même la plus puissante armée du monde y réfléchirait à deux fois. Missiles antinavires, drones, mines marines, réserves mobilisables en quelques heures, cyberdéfense… Tout est pensé pour infliger des pertes colossales à un envahisseur dès les premières heures.

Le « T-Dome », ce futur système de défense antiaérienne et antimissile multicouche, doit devenir le joyau de cette stratégie. L’idée : créer un dôme quasi-impénétrable au-dessus de l’île, capable d’intercepter aussi bien les missiles balistiques que les essaims de drones.

Car tout le monde sait que la première phase d’une invasion chinoise serait une pluie de missiles et de frappes aériennes destinée à décapiter les défenses taïwanaises. Sans bouclier efficace, l’issue ne fait guère de doute.

Une société sous tension

Cette course à l’armement ne se fait pas sans heurts dans la société taïwanaise. Beaucoup s’inquiètent du coût faramineux de ces programmes – l’équivalent de plusieurs années de budget santé ou éducation. D’autres craignent que cette militarisation à marche forcée ne provoque exactement ce qu’elle est censée éviter : une guerre.

Pourtant, les sondages montrent que l’immense majorité des Taïwanais rejettent l’idée d’une unification sous la bannière communiste. Et la jeunesse, en particulier, se dit prête à défendre l’île les armes à la main si nécessaire.

Entre ceux qui rêvent encore d’un rapprochement pacifique avec le continent et ceux qui veulent couper définitivement les ponts, Taïwan vit une fracture profonde. Mais face à la menace existentielle, une forme de consensus semble émerger : quel que soit le prix, l’île ne se rendra pas sans combattre.

2027 : le compte à rebours est lancé

Dans moins de deux ans, nous saurons si Taïwan a réussi son pari fou : transformer une île de 23 millions d’habitants en forteresse capable de tenir tête à la deuxième puissance militaire mondiale.

D’ici là, chaque achat d’armes, chaque exercice militaire, chaque discours sera scruté à la loupe par Pékin. Et chaque provocation – de part et d’autre – rapprochera un peu plus la région du point de non-retour.

Car au-delà des milliards et des missiles, c’est bien une question de volonté qui se pose. Celle d’un peuple déterminé à rester libre, face à un régime qui a fait de la « réunification » la mission de son siècle.

2027 approche. Et avec lui, peut-être, le plus grand test géopolitique du XXIe siècle.

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