Imaginez-vous en ce début d’année 2026. Les titres des journaux financiers s’affolent, les forums débordent de théories et votre boîte mail reçoit déjà les premières lettres de licenciement « pour gains de productivité ». L’intelligence artificielle n’est plus une promesse futuriste : elle est là, brutale, rapide, et soulève des questions que personne n’osait vraiment poser il y a encore deux ans.
2026, l’année où tout peut basculer pour l’IA
Après l’euphorie, la gueule de bois. Les valorisations stratosphériques, les levées de fonds records et les discours messianiques laissent place à une tension palpable. Les signaux d’alarme se multipliplient et, pour la première fois, même les géants commencent à reconnaître publiquement la fragilité du château de cartes.
La bulle IA menace-t-elle d’exploser ?
Mi-novembre, deux nouvelles ont secoué la Silicon Valley. Des investisseurs aussi emblématiques que SoftBank et Peter Thiel ont annoncé s’être totalement désengagés de Nvidia, le roi incontesté des puces dédiées à l’IA. Un mouvement qui, dans le petit monde de la tech, équivaut à voir des rats quitter le navire en pleine mer.
Le problème n’est pas technique, il est économique. Les montants injectés dans les infrastructures d’intelligence artificielle atteignent des niveaux astronomiques alors que les retours concrets restent, pour l’instant, bien modestes. Pire : une large partie de ces investissements fonctionne en circuit fermé.
Les géants du cloud et les fabricants de puces financent massivement les start-up… qui se retournent ensuite pour acheter leurs serveurs et leurs GPU. Un cercle vertueux tant que la musique joue, mais terriblement vulnérable au moindre ralentissement. Beaucoup y voient les mêmes mécanismes qui avaient conduit à l’éclatement de la bulle internet en 2000.
« Si la bulle éclate, aucune entreprise ne sera épargnée, y compris nous »
Sundar Pichai, dirigeant d’Alphabet, sur la BBC
Cette phrase, prononcée publiquement par le patron de Google, résonne comme un aveu. Même ceux qui ont le plus profité de la frénésie commencent à mesurer le risque systémique.
Les cols blancs dans le viseur
Pendant ce temps, dans les open-spaces, l’ambiance est glaciale. Les plans de licenciement se multiplient, et pour la première fois, ils touchent majoritairement des postes autrefois considérés comme inattaquables : juristes, comptables, rédacteurs, analystes financiers, codeurs seniors…
Les entreprises justifient ces coupes par les gains de productivité spectaculaires offerts par les nouveaux outils d’IA. Un vice-président de la Réserve fédérale américaine l’a reconnu sans détour : l’intelligence artificielle change déjà la façon dont les entreprises envisagent leur masse salariale.
Les prévisions divergent violemment selon les cabinets :
- McKinsey annonce que 30 % des emplois américains pourraient être automatisés d’ici 2030.
- Gartner, plus optimiste, prédit que l’IA créera finalement plus d’emplois qu’elle n’en détruira… mais seulement à partir de 2027.
- Certaines voix extrêmes évoquent déjà la nécessité d’un revenu universel de base pour éviter un chaos social.
Entre ces scénarios, une certitude : la transformation ne sera ni linéaire ni indolore. Des pans entiers de l’économie de la connaissance sont en train de vaciller.
Superintelligence : 2026, 2028 ou jamais ?
Dans les laboratoires, la course fait rage. Les annonces se bousculent et les calendriers se raccourcissent à une vitesse vertigineuse.
Le patron d’Anthropic voit l’arrivée de l’intelligence artificielle générale (AGI) dès 2026. Celui d’OpenAI parle de 2028 pour une IA capable de faire des découvertes scientifiques autonomes. Meta, de son côté, a mis le paquet : centaines de millions de dollars pour recruter les meilleurs chercheurs et déclarer officiellement la superintelligence comme objectif prioritaire.
Mais tous ne partagent pas cet enthousiasme. Certains pionniers de la discipline, pourtant en première ligne depuis des décennies, balayent ces prédictions d’un revers de main et parlent de fantasmes technologiques déconnectés de la réalité physique et computationnelle.
Le débat n’est plus seulement technique, il est presque philosophique : allons-nous vraiment créer des entités plus intelligentes que nous dans des centres de données, ou poursuivons-nous un mirage collectif ?
Les médias au bord du gouffre
Pour les journaux, la situation est dramatique. Les chatbots et les résumés générés par les moteurs de recherche cannibalisent leur audience. Pourquoi cliquer sur un article quand la réponse apparaît directement en haut de Google ?
Le trafic s’effondre, les revenus publicitaires avec. Un consultant expérimenté compare ce bouleversement au plus grand changement dans l’écosystème de l’information depuis l’invention de l’imprimerie.
Quatre stratégies se dessinent pour survivre :
- Devenir un produit premium, presque de luxe, à l’image de certains titres économiques reconnus.
- Bloquer techniquement l’aspiration de contenus par les IA.
- Engager des actions judiciaires massives contre les géants de la tech.
- Négocier des accords de licence, comme certains l’ont déjà fait avec des plateformes ou des agences de presse.
Aucune solution miracle. Chaque titre doit choisir son camp dans une guerre qui ne fait que commencer.
Le « slop » envahit tout
Et pendant ce temps, sur vos réseaux sociaux préférés, la bouillie continue de couler à flots. Images d’ours faisant du trampoline, villes qui explosent en boucle, vidéos absurdes présentées comme réelles… Le slop, ce contenu médiocre généré automatiquement, sature les fils d’actualité.
Les plateformes promettent des étiquettes, des filtres, des suppressions. Rien n’y fait. Le volume est trop important, la course au clic trop féroce. La désinformation de masse n’a jamais été aussi facile à produire et à diffuser.
Paradoxalement, alors que les chercheurs annoncent résoudre le cancer ou le réchauffement climatique, l’impact le plus visible de l’IA générative dans la vie quotidienne reste… cette marée de contenus vides de sens.
En résumé, 2026 s’annonce comme l’année charnière. Soit l’intelligence artificielle franchit un cap irréversible vers la superintelligence et change la civilisation pour toujours. Soit la bulle éclate, entraînant une correction brutale dont personne ne sortira indemne. Peut-être les deux en même temps.
Ce qui est certain, c’est que nous sommes à la croisée des chemins. Et que les choix faits dans les prochains mois – par les entrepreneurs, les régulateurs, les investisseurs et même par chacun d’entre nous – détermineront pendant des décennies la place que l’humanité réservera à ses propres créations.
Une chose est sûre : il n’y aura pas de retour en arrière possible.









