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Budget Britannique 2025 : Hausses d’Impôts Inévitables ?

Mercredi, Rachel Reeves dévoile un budget sous très haute tension : hausses d’impôts massives, aides sociales en hausse… mais les marchés sont nerveux et Nigel Farage talonne les travaillistes dans les sondages. Le Royaume-Uni va-t-il plonger dans une nouvelle crise ou réussir son pari ? À découvrir…

Imaginez-vous à la place de Rachel Reeves ce mercredi matin. Vous entrez dans l’hémicycle de la Chambre des Communes, la fameuse mallette rouge à la main, sous le regard de centaines de députés et des millions de Britanniques derrière leurs écrans. Derrière le sourire de circonstance, la pression est écrasante : les marchés guettent le moindre faux pas, l’opposition est prête à bondir et, surtout, votre propre parti est au plus bas dans les sondages. C’est exactement la situation dans laquelle se trouve le gouvernement travailliste de Keir Starmer en ce 30 octobre 2025.

Un budget sous très haute tension

Depuis des semaines, la presse britannique bruisse de rumeurs, de fuites savamment orchestrées et de scénarios catastrophe. Le gouvernement sait qu’il joue gros. Très gros. Car ce n’est pas seulement un exercice comptable : c’est la première vraie épreuve de crédibilité du Labour revenu au pouvoir en juillet 2024 après quatorze années dans l’opposition.

Et le contexte est particulièrement rude : croissance quasi nulle, inflation qui reste élevée, dette publique inquiétante et marchés financiers particulièrement nerveux. Ajoutez à cela un parti d’extrême droite, Reform UK de Nigel Farage, qui talonne les travaillistes dans certains sondages, et vous obtenez une équation explosive.

Ce que l’on sait déjà des mesures phares

Le gouvernement a déjà distillé plusieurs annonces ces derniers jours, histoire de préparer le terrain et de montrer qu’il n’oublie pas ses électeurs traditionnels.

Parmi les mesures déjà confirmées ou très fortement attendues :

  • Une hausse du salaire minimum supérieure à l’inflation
  • Une revalorisation des pensions de retraite au-delà de l’inflation
  • La suppression du plafond sur les allocations familiales pour les familles nombreuses
  • Le gel des tarifs ferroviaires
  • Le maintien du gel des frais de prescription médicale (les fameux 9,90 £ par médicament)

Ces mesures, même si certaines restent symboliques, constituent les marqueurs sociaux indispensables pour un gouvernement travailliste. Dans un pays où l’inflation atteint encore 3,6 % en octobre et où les factures d’énergie restent très élevées, elles sont attendues comme le messie par une partie de la population.

« Nous allons aider les familles face au coût de la vie »

Communiqué du Trésor britannique, mardi 29 octobre

Les hausses d’impôts : inévitables mais douloureuses

Mais ces gestes sociaux ont un coût. Et ce coût, c’est vous et moi – ou plutôt les contribuables britanniques – qui allons le payer.

Le gouvernement l’a répété : pas question de revenir à l’austérité version conservatrice. Mais pour financer ces mesures tout en respectant les règles fiscales que le Labour s’est lui-même imposées (chaque dépense courante doit être financée par des recettes équivalentes), il faut trouver de l’argent. Beaucoup d’argent.

Les estimations parlent de près de 20 milliards de livres à dégager pour l’exercice 2026-2027. Et l’année dernière, malgré 40 milliards de livres de hausses d’impôts (dont 25 particulièrement impopulaires sur les entreprises), l’objectif d’équilibre budgétaire n’a pas été atteint.

Quelles taxes vont augmenter ?

Plusieurs pistes circulent avec insistance :

  • Prolongation du gel des seuils d’imposition sur le revenu (ce que certains appellent une « taxe cachée » car les hausses de salaire font basculer les contribuables dans des tranches supérieures)
  • Hausse de la taxation des propriétés les plus luxueuses
  • Renforcement de la fiscalité sur les jeux d’argent
  • Nouvelles taxes ou hausse des prélèvements sur les retraites privées
  • Possible ajustement de certaines taxes sur les entreprises (même si le gouvernement jure vouloir rester attractif)

Une chose semble acquise : la promesse de campagne de ne pas augmenter les taux d’imposition sur le revenu, la TVA ou les cotisations sociales devrait être respectée… au moins sur le papier.

Les marchés financiers : le vrai juge de paix

Car au-delà des débats politiques internes, c’est bien la réaction des marchés qui inquiète le plus Downing Street.

Début 2025, les taux d’emprunt britanniques ont atteint des niveaux jamais vus depuis plus de vingt-cinq ans. Chaque annonce budgétaire est scrutée à la loupe. Un plan jugé peu crédible, et c’est la panique sur les marchés obligataires.

« Les marchés financiers sont très nerveux. L’absence d’un plan solide pour traiter les difficultés financières du Royaume-Uni ne fait qu’aggraver la situation. »

James Wood, professeur d’économie politique à Cambridge

Le souvenir du mini-budget désastreux de Liz Truss en septembre 2022 reste dans toutes les mémoires. Personne ne veut revivre ça.

Le Brexit dans le viseur (enfin)

Point notable : pour la première fois, le gouvernement travailliste pointe ouvertement du doigt le « Brexit chaotique » comme l’une des causes des difficultés économiques actuelles.

Dans une tribune publiée dimanche, Rachel Reeves a dressé un constat sans concession : les « profondes cicatrices de l’austérité » conservatrice, les séquelles de la pandémie… mais aussi, et c’est nouveau, les conséquences désastreuses d’une sortie de l’Union européenne mal négociée.

Un tournant dans la communication du Labour, qui avait jusqu’ici évité de trop insister sur ce point pour ne pas diviser davantage le pays.

La promesse de la « plus grande offensive de croissance »

Face à ce tableau plutôt sombre, Rachel Reeves promet monts et merveilles : « la plus grande offensive de croissance économique depuis une génération ».

Des investissements massifs sont annoncés, notamment dans les infrastructures, la transition énergétique et le logement. Reste à savoir comment financer tout cela sans faire exploser la dette ou effrayer les investisseurs.

Car c’est là tout le paradoxe : le gouvernement veut à la fois rassurer les marchés en montrant sa rigueur budgétaire… et lancer de grands projets d’investissement. Deux objectifs parfois difficiles à concilier.

Et Nigel Farage dans tout ça ?

Impossible de parler de ce budget sans évoquer la menace qui plane à droite : Reform UK, le parti de Nigel Farage, qui dépasse désormais les travaillistes dans certains sondages.

Un budget jugé trop à gauche risque de renforcer cette dynamique. Un budget trop rigoriste, et c’est l’électorat traditionnel du Labour qui pourrait se démobiliser.

Keir Starmer et Rachel Reeves marchent sur une corde raide.

Ce que ce budget dit du Royaume-Uni en 2025

Au-delà des chiffres et des mesures techniques, ce budget est révélateur de l’état du pays près de dix ans après le référendum sur le Brexit et cinq ans après la sortie effective de l’Union européenne.

Un pays toujours en quête de son nouveau modèle économique. Un pays où la croissance patine (+0,1 % seulement au troisième trimestre 2025). Un pays où la question sociale reste brûlante.

Et surtout, un pays où la politique redevient imprévisible, polarisée, passionnée.

Mercredi à 12h30 GMT, Rachel Reeves aura trente minutes pour convaincre les députés, les marchés et les Britanniques que son gouvernement a trouvé la bonne recette.

On saura très vite si le pari est réussi… ou si une nouvelle tempête se profile à l’horizon.

À retenir : Ce budget 2025 n’est pas qu’un exercice comptable. C’est un test de survie politique pour Keir Starmer, un test de crédibilité économique pour Rachel Reeves, et peut-être un tournant pour le Royaume-Uni post-Brexit.

Une chose est sûre : les prochaines heures vont être passionnantes à suivre.

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