Imaginez-vous enfin devant le Grand Canyon après des mois d’économie, le soleil couchant embrase les falaises… et là, au guichet, on vous annonce que votre pass annuel vient de tripler simplement parce que vous n’êtes pas américain. Cette scène, presque surréaliste, deviendra réalité dès le 1er janvier 2026 pour des millions de visiteurs étrangers.
Une hausse historique qui change tout
Jusqu’à présent, le célèbre America the Beautiful Pass coûtait 80 dollars pour tout le monde, résidents comme touristes étrangers. Ce sésame ouvrait les portes des 63 parcs nationaux et de plus de 2 000 sites fédéraux pendant un an entier. À partir de l’année prochaine, ce tarif restera inchangé pour les Américains… mais passera à 250 dollars pour les non-résidents.
Pour ceux qui préfèrent payer à l’entrée, la pilule est encore plus amère : un supplément de 100 dollars sera appliqué dans les parcs les plus fréquentés. Yellowstone, Yosemite, Zion, Acadia, Grand Canyon… tous les joyaux inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco sont concernés.
Pourquoi une telle différence de traitement ?
L’administration justifie cette mesure par un principe simple : America First. Les parcs nationaux américains appartiennent d’abord aux citoyens américains, argue-t-on. Les visiteurs étrangers, qui représentent pourtant une part importante des recettes, devront désormais contribuer davantage à leur entretien.
« Les résidents américains continueront à bénéficier de tarifs abordables, tandis que les non-résidents paieront un tarif plus élevé afin de contribuer à l’entretien et à la maintenance des parcs américains. »
Ce discours n’est pas nouveau. Dès juillet dernier, un décret avait été signé pour mettre fin à l’égalité tarifaire qui prévalait depuis des décennies. « Dans les parcs nationaux, ce sera l’Amérique d’abord », avait alors déclaré le président.
Des « journées patriotiques » pour les Américains uniquement
Dans la foulée, l’administration a annoncé la création de journées patriotiques pendant lesquelles l’accès sera totalement gratuit… mais uniquement pour les résidents américains. Une mesure symbolique forte qui risque de creuser encore le fossé entre visiteurs locaux et internationaux.
Ces journées viendront s’ajouter aux quelques dates déjà gratuites pour tous (Martin Luther King Day, premier jour de la Semaine des parcs nationaux…). La différence de traitement n’en sera que plus visible.
Un secteur touristique déjà fragilisé
Le tourisme international vers les États-Unis traverse déjà une zone de turbulences. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2024, les parcs nationaux ont accueilli près de 332 millions de visites. Mais la part des visiteurs étrangers diminue depuis plusieurs mois.
L’association professionnelle US Travel Association anticipe une baisse de 6,3 % des arrivées internationales en 2025 par rapport à 2024. Cette nouvelle tarification risque d’accélérer le mouvement.
Impact estimé de la mesure :
• Abonnement annuel ×3,125 pour les étrangers
• Supplément de 100 $ sur les entrées unitaires des parcs stars
• Risque d’une nouvelle baisse de fréquentation internationale
• Recettes supplémentaires destinées à la maintenance
Que reste-t-il comme alternatives pour les voyageurs étrangers ?
Certains parcs moins fréquentés échapperont au supplément de 100 dollars. Mais les incontournables – ceux que l’on rêve de voir une fois dans sa vie – seront tous touchés. Pour une famille de quatre personnes, le coût du pass annuel passera ainsi de 80 à 250 dollars… soit 170 dollars d’économie en moins.
Autre option : fractionner les visites et payer à chaque entrée. Mais avec 35 dollars par véhicule dans la plupart des grands parcs (bientôt majoré de 100 dollars), la facture devient vite dissuasive.
Enfin, certains voyageurs songeront peut-être à contourner la règle en achetant le pass via un ami américain… mais les contrôles d’identité risquent de se durcir.
Une mesure qui fait déjà débat
Du côté des défenseurs de la mesure, on souligne que les Américains paient déjà ces parcs via leurs impôts. Pourquoi les visiteurs étrangers bénéficieraient-ils du même tarif alors qu’ils ne contribuent pas au budget fédéral ?
À l’inverse, les professionnels du tourisme s’inquiètent d’un signal désastreux envoyé au monde entier. Les parcs nationaux représentent une vitrine exceptionnelle des États-Unis. Les rendre moins accessibles, c’est risquer de voir les visiteurs se reporter sur le Canada, l’Australie ou la Nouvelle-Zélande.
Entre fierté nationale et réalités économiques, le débat est loin d’être tranché. Une chose est sûre : à partir de 2026, découvrir la beauté sauvage américaine aura un goût plus amer pour les voyageurs du monde entier.
Restera-t-il encore des millions de visiteurs prêts à payer le prix fort pour contempler Old Faithful jaillir ou longer la vertigineuse rim du Grand Canyon ? L’avenir nous le dira… mais une page du tourisme américain est bel et bien en train de se tourner.









