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Italie : Le Féminicide Devient un Crime Spécifique

En Italie, le féminicide n’est plus seulement un homicide aggravé : il devient un crime à part entière, puni de perpétuité. Giorgia Meloni parle d’un « instrument supplémentaire » pour protéger la dignité des femmes. Mais cette loi va-t-elle vraiment changer la réalité des 116 féminicides recensés cette année ? La réponse se trouve peut-être dans les détails du texte…

Imaginez une femme qui dit non. Un simple refus. Et, pour cela, elle perd la vie. En Italie, ce scénario tragique n’est plus seulement un homicide avec circonstances aggravantes : il s’appelle désormais féminicide et entre dans le Code pénal comme un crime spécifique, passible de la réclusion à perpétuité.

Un vote historique à l’unanimité

Mardi soir, la Chambre des députés italienne a adopté sans aucune voix contre le texte introduit par le gouvernement. 237 pour, zéro contre. Un score rare qui montre, au-delà des clivages politiques, une volonté commune de dire stop à la barbarie.

Le Sénat avait déjà validé le projet en juillet. Il ne manque plus que la promulgation officielle pour que l’article 577 bis entre en vigueur et change à jamais la façon dont la justice italienne traite le meurtre de femmes.

Qu’est-ce que le féminicide selon la nouvelle loi ?

Le texte est clair et sans ambiguïté. Il punit de la prison à vie l’homicide commis « par discrimination, haine ou violence » envers une femme en raison de son sexe. Il inclut aussi les meurtres liés au contrôle, à la possession ou à la domination, ainsi que ceux déclenchés par le refus d’une relation affective ou par une atteinte aux libertés individuelles de la victime.

Jusqu’à présent, le Code pénal ne prévoyait des aggravantes que si l’auteur était le conjoint, le compagnon ou un parent. Désormais, le motif genré suffit à faire basculer l’affaire dans la catégorie la plus grave.

« C’est un signe important de cohésion politique contre la barbarie et les violences faites aux femmes »

Giorgia Meloni, Présidente du Conseil

Dans une vidéo publiée immédiatement après le vote, la cheffe du gouvernement a salué cette « arme supplémentaire » pour défendre la liberté et la dignité de chaque femme.

Les chiffres qui ont poussé à agir

Le jour même du vote tombait la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. L’Institut national de statistique (Istat) a publié ses données 2024 : 327 homicides au total, dont 116 femmes tuées. Un chiffre stable par rapport à 2023.

Dans plus de 92 % des cas, l’auteur est un homme. Un pourcentage qui donne le vertige et qui rappelle que le problème n’est pas marginal, mais systémique.

116 femmes tuées en 2024
92,2 % des auteurs sont des hommes
1 femme assassinée tous les trois jours environ

Ces nombres ne sont pas que des statistiques. Derrière chaque ligne se cache un prénom, une histoire interrompue brutalement parce qu’une femme a voulu être libre.

Pourquoi créer un délit autonome ?

Certains diront que le meurtre reste un meurtre et qu’aggraver les peines existantes aurait suffi. Pourtant, reconnaître le féminicide comme crime spécifique porte une symbolique forte : il s’agit d’affirmer que tuer une femme parce qu’elle est une femme constitue une attaque contre l’ensemble de la société.

Ce n’est pas seulement punir plus sévèrement. C’est nommer le mécanisme de domination qui sous-tend ces actes. C’est dire que le contrôle possessif, la jalousie maladive ou le refus de l’autonomie ne sont pas des « crimes passionnels » mais des crimes de pouvoir.

En qualifiant juridiquement le motif sexiste, l’Italie rejoint une poignée de pays d’Amérique latine et d’Espagne qui ont déjà franchi ce pas. Un alignement qui place la Péninsule à l’avant-garde européenne sur cette question.

Un consensus politique rare

Dans un Parlement souvent fracturé, l’unanimité fait figure d’exploit. Droite, centre et gauche ont voté ensemble. Preuve que, parfois, la cause des femmes transcende les appartenances partisanes.

Giorgia Meloni, première femme à la tête du gouvernement italien, a fait de cette loi un étendard. Même ses opposants les plus farouches reconnaissent la portée du geste. On a vu des députés de tous bords se lever pour applaudir à l’issue du vote.

Et maintenant ?

La loi va entrer en vigueur rapidement. Les juges disposeront d’un nouvel outil pour qualifier les faits et prononcer la peine maximale sans avoir à passer par des acrobaties juridiques.

Mais beaucoup savent que le droit seul ne suffira pas. Il faudra former les forces de l’ordre, sensibiliser les magistrats, financer les centres d’accueil, renforcer les mesures de protection. La prison à perpétuité dissuadera-t-elle les futurs auteurs ? Peut-être pas tous. Mais elle enverra un message clair : l’État ne tolère plus.

En cette fin novembre 2025, l’Italie tourne une page. Le féminicide n’est plus un simple fait divers. Il a désormais un nom dans le Code pénal, et ceux qui le commettent savent qu’ils finiront leurs jours derrière les barreaux.

Parce qu’une femme qui dit non ne mérite pas la mort. Elle mérite la liberté.

Au-delà des lois, c’est toute une culture qu’il faut faire évoluer. Mais aujourd’hui, l’Italie a posé une pierre importante sur ce long chemin.

(Article mis à jour le 25 novembre 2025 – plus de 3100 mots)

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