Sport

Laperche et Cammas Dominent la Transat Café L’Or

À 1700 milles de la Martinique, Laperche et Cammas filent à vive allure avec 180 milles d'avance. Mais dans l'Atlantique, tout peut basculer en une nuit... Qui tiendra jusqu'au bout ?

Imaginez deux hommes seuls face à l’immensité de l’Atlantique, sur une machine volante de 32 mètres capable de dépasser les 40 nœuds. Tom Laperche et Franck Cammas, à bord de SVR-Lazartigue, ne se contentent pas de naviguer : ils dominent. Ce lundi matin, leur avance s’est encore épaissie, transformant une course déjà intense en véritable démonstration de maîtrise.

Une avance qui se creuse inexorablement

À l’aube du 3 novembre 2025, le duo de tête affiche plus de 180 milles sur ses poursuivants directs. Une distance qui, en course au large, représente bien plus qu’un simple écart chiffré. C’est une marge de sécurité, un coussin stratégique, mais aussi une pression constante : celle de ne jamais faiblir.

Derrière eux, Thomas Coville et Benjamin Schwartz sur Sodebo Ultim 3 tentent de réduire l’écart. Plus loin encore, Anthony Marchand et Julien Villion sur Actual Ultim 4, puis Armel Le Cléac’h et Sébastien Josse sur Banque Populaire XI, qui accuse déjà plus de 600 milles de retard. La hiérarchie semble figée, mais l’océan a ses propres règles.

SVR-Lazartigue : la machine parfaite ?

Le trimaran SVR-Lazartigue n’est pas seulement rapide. Il est optimisé pour ce type de transatlantique : foils dernière génération, voilure adaptée aux alizés, ergonomie du cockpit pensée pour les duos. Chaque mille parcouru semble calculé, chaque empannage exécuté avec une précision chirurgicale.

Tom Laperche, à 28 ans, apporte la fougue et la réactivité d’une nouvelle génération. Franck Cammas, 52 ans, quadruple vainqueur de l’épreuve, incarne l’expérience et la lecture fine des éléments. Leur complémentarité fait merveille : l’un anticipe, l’autre ajuste. Ensemble, ils forment un binôme redoutable.

« On sent que le bateau est en phase avec nous. Il répond à la moindre sollicitation. »

Tom Laperche, lors d’une vacation radio

Cette harmonie homme-machine est visible dans les routages : trajectoire plus sud que la concurrence, meilleure exploitation des grains, gestion optimale de la fatigue. Des détails qui, cumulés, se transforment en centaines de milles d’avance.

Les poursuivants dans le dur

Chez Sodebo Ultim 3, Coville et Schwartz naviguent dans le sillage des leaders mais peinent à combler l’écart. Leur stratégie plus conservatrice en début de course leur coûte cher. Pourtant, Thomas Coville, recordman du tour du monde en solitaire, n’a pas dit son dernier mot.

Plus au nord, Actual Ultim 4 souffre d’une zone de molle. Marchand et Villion, pourtant performants dans les conditions musclées, se retrouvent piégés dans une bulle sans vent. Une situation frustrante quand on sait que 300 milles plus au sud, les leaders filent à plus de 30 nœuds.

Quant à Banque Populaire XI, l’écart abyssal de 600 milles semble définitif. Armel Le Cléac’h, habitué des come-back spectaculaire, sait que tout espoir n’est pas perdu. Mais il faudrait un miracle météo : une dépression favorable pour les retardataires, ou une avarie chez les leaders.

Distance restante : environ 1700 milles (2800 km)
Vitesse moyenne leaders : 28-32 nœuds
Arrivée estimée : jeudi 6 novembre à Fort-de-France

La Martinique en ligne de mire

Jeudi, Fort-de-France accueillera les géants des mers. Les Ultim, avec leur envergure impressionnante, nécessitent un mouillage spécifique. La baie se prépare : ponton renforcé, zone de quarantaine, espace médiatique. L’arrivée s’annonce spectaculaire.

Pour Laperche et Cammas, ce sera peut-être la cinquième victoire pour le skipper expérimenté. Pour le plus jeune, une consécration précoce. Mais avant les embrassades et les ti’ punch, il reste 1700 milles de vigilance absolue.

Les alizés, capricieux, peuvent faiblir. Les grains, violents, peuvent endommager. La fatigue, après plus d’une semaine de course, commence à peser. Chaque mille est une bataille gagnée sur l’océan et sur soi-même.

Une course dans la course : la gestion de l’effort

En double, tout est question d’équilibre. Qui barre ? Qui dort ? Qui prépare les repas lyophilisés ? Qui vérifie les systèmes ? Laperche et Cammas ont instauré un rythme de quart drastique : 4 heures de barre, 4 heures de repos. Mais en réalité, le sommeil est fractionné, les alertes fréquentes.

La nutrition aussi est stratégique. Des barres énergétiques, des plats déshydratés, mais surtout une hydratation constante. À 30 nœuds, le corps subit des accélérations violentes. Les muscles sont sollicités en permanence, le cerveau en alerte maximale.

Franck Cammas, avec son expérience, sait gérer ces moments. Il a traversé des tempêtes bien plus violentes. Tom Laperche, formé à l’école de la Figariste, apprend à tempo de ces géants. Leur communication, fluide, est la clé de leur performance.

Les autres classes en embuscade

Si les Ultim dominent les débats en termes de vitesse, les Imoca et Class40 livrent aussi des batailles acharnées. Charal et Macif se disputent la tête chez les monocoques à foils. En Class40, la flotte, après l’escale technique à La Corogne, repart vers le sud avec des écarts réduits.

Cette Transat Café L’Or 2025 est particulière : parcours modifié pour les Ultim, conditions météo contrastées, plateau relevé. Chaque classe a son histoire, ses drames, ses héros. Mais les regards restent braqués sur les trimarans géants.

Car voir un Ultim arriver à plus de 30 nœuds dans la baie de Fort-de-France, c’est un spectacle à couper le souffle. Les foils qui soulèvent la coque centrale, les appendices qui fendent l’eau, les skippers concentrés : c’est la voile moderne dans toute sa démesure.

Et si tout basculait ?

L’histoire de la voile océanique est remplie de retournements de situation. Un foil endommagé, une voile déchirée, un problème électronique : en quelques minutes, des jours d’efforts peuvent s’effondrer. Laperche et Cammas le savent mieux que quiconque.

Ils naviguent avec prudence, mais pas avec frilosité. Leur avance leur permet de choisir leur route, d’éviter les zones à risque. Mais l’océan ne prévient pas. Un cargo non détecté, un OFNI (objet flottant non identifié), une micro-déchirure dans une voile : les scénarios cauchemardesques sont nombreux.

Pourtant, leur confiance est palpable. Dans les vacations radio, on sent la sérénité des leaders. Ils savent que le plus dur est derrière eux, mais que le plus beau reste à venir : cette arrivée triomphale, ce sentiment d’avoir dompté l’Atlantique en duo.

Équipage Bateau Retard
Laperche / Cammas SVR-Lazartigue Leader
Coville / Schwartz Sodebo Ultim 3 +180 milles
Marchand / Villion Actual Ultim 4 +335 milles
Le Cléac’h / Josse Banque Populaire XI +600 milles

L’héritage d’une génération

Franck Cammas n’est pas seulement un skipper. C’est une référence, un mentor. Sa cinquième victoire potentielle marquerait un peu plus l’histoire de la course au large. Mais ce qui frappe, c’est sa capacité à transmettre, à former la relève.

Tom Laperche incarne cette nouvelle vague : technique, analytique, audacieuse. Formé sur les circuits Figaro et Imoca, il découvre les Ultim avec l’humilité des grands. Sa progression est fulgurante, sa victoire probable à 28 ans serait historique.

Ce duo symbolise la transmission dans la voile française : l’expérience au service du talent brut. Cammas guide sans imposer, Laperche apprend sans se brider. Leur association est une leçon de management en milieu extrême.

Jeudi : le jour de vérité

Dans trois jours, Fort-de-France vibrera au rythme des arrivées. Les Ultim, avec leur taille démesurée, nécessitent une organisation millimétrée. Les équipes techniques seront prêtes, les médias en place, le public nombreux.

Pour Laperche et Cammas, ce sera l’aboutissement d’un projet débuté il y a des mois : préparation physique, réglages du bateau, étude météo. Chaque détail a été peaufiné. Reste à franchir la ligne, à toucher terre, à réaliser.

Mais avant cela, il faudra gérer les derniers milles. Ceux où la fatigue est maximale, où l’excitation monte, où l’erreur est interdite. Ceux où les champions se révèlent.

La Transat Café L’Or 2025 entrera dans l’histoire, non pas pour ses rebondissements dramatiques, mais pour la maîtrise absolue d’un duo qui a su transformer une course en récital. Laperche et Cammas ne gagnent pas seulement une régate : ils écrivent une page de la voile moderne.

Et jeudi, quand SVR-Lazartigue franchira la ligne à plus de 30 nœuds, sous le soleil martiniquais, ce sera plus qu’une victoire. Ce sera la confirmation qu’en course au large, la perfection existe. Au moins pour un instant.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.