En l’espace de dix ans, le Pérou a vu défiler sept présidents, un record qui illustre une instabilité politique presque sans équivalent. La récente destitution de Dina Boluarte, survenue en un temps record, marque un nouveau chapitre dans cette saga chaotique. Cette crise, exacerbée par une vague de criminalité sans précédent, soulève des questions brûlantes : comment un pays peut-il sombrer si vite dans l’incertitude ? Plongeons dans les raisons profondes de cette chute et les défis qui attendent le Pérou.
Une Crise aux Multiples Visages
Le Pérou traverse une période de turbulences où la politique et l’insécurité s’entremêlent pour créer un cocktail explosif. La destitution de Dina Boluarte, accusée d’incapacité morale permanente, n’est que le dernier épisode d’une série de crises institutionnelles. Mais au-delà des jeux de pouvoir, c’est la montée fulgurante de la criminalité qui a précipité cette chute. Les Péruviens, confrontés à une violence croissante, ont exprimé un ras-le-bol qui a fini par ébranler le sommet de l’État.
L’Insécurité : Le Détonateur de la Crise
La vague de criminalité qui déferle sur le Pérou a joué un rôle central dans la destitution de Boluarte. En seulement un an, les plaintes pour racket ont explosé de 540 %, touchant particulièrement les chauffeurs de bus et de moto-taxis. Cette violence, orchestrée par le crime organisé, a transformé des villes autrefois paisibles en zones de tension. Les citoyens, exaspérés, ont pointé du doigt l’incapacité du gouvernement à enrayer cette spirale.
« L’insécurité a été un facteur réel dans la chute de la présidente. Le rejet populaire était devenu intenable. »
Fernando Tuesta, politologue
Le Parlement, initialement réticent à évincer Boluarte, a cédé sous la pression populaire. Cette situation reflète un malaise plus profond : une dégradation de la démocratie, où les institutions peinent à répondre aux besoins des citoyens. Les Péruviens, confrontés à la peur au quotidien, ont vu dans la destitution un moyen de réclamer un changement radical.
Chiffres Clés de la Criminalité
- 540 % : Augmentation des plaintes pour racket en un an.
- Chauffeurs de bus et moto-taxis : Principales cibles des extorsions.
- Crime organisé : Acteur central de la montée de la violence.
Une Fragilité Institutionnelle Enracinée
Le Pérou est un cas d’école en matière d’instabilité institutionnelle. Avec cinq présidents déchus en dix ans, le pays détient un record mondial. Cette valse des dirigeants s’explique par un déséquilibre structurel entre les pouvoirs. Depuis 2016, le Parlement domine la scène politique, reléguant l’exécutif à un rôle subordonné. Ce manque d’équilibre des pouvoirs fragilise la démocratie péruvienne.
« Nous sommes habitués à voir les présidents tomber rapidement, tandis que la vie des Péruviens continue, sans dépendre de leurs actions. »
Augusto Alvarez, politologue
Dina Boluarte, arrivée au pouvoir en décembre 2022 après la chute de Pedro Castillo, était particulièrement vulnérable. Soutenue par des partis de droite et d’extrême droite, elle dépendait entièrement du Parlement. Mais lorsque ces alliés l’ont abandonnée, sa destitution est devenue inévitable. Ce scénario illustre une réalité cruelle : au Pérou, les présidents sont souvent des pions dans un jeu politique instable.
Scandales et Rejet Populaire
Le mandat de Boluarte a été marqué par une impopularité record, atteignant 96 % de réprobation selon les sondages. Cette défiance s’explique par une série de scandales qui ont terni son image. Parmi eux, le Rolexgate, impliquant des montres et bijoux de luxe non déclarés, a cristallisé les critiques. Une rhinoplastie secrète en 2023, en violation des obligations légales, a également alimenté la controverse.
À cela s’ajoutent les manifestations de 2022-2023, réprimées dans le sang, avec un bilan d’au moins 50 morts. Ces événements ont renforcé l’image d’un gouvernement déconnecté et autoritaire. Pour beaucoup, Boluarte incarnait une élite politique perçue comme médiocre et corrompue, incapable de répondre aux attentes des citoyens.
| Scandale | Détails | Impact |
|---|---|---|
| Rolexgate | Montres et bijoux non déclarés | Perte de crédibilité |
| Rhinoplastie secrète | Opération cachée au Parlement | Violation des obligations légales |
| Répression des manifestations | 50 morts lors des protestations | Forte impopularité |
Un Nouveau Dirigeant sous Pression
Conformément à la Constitution, José Jeri, président du Parlement âgé de 38 ans, a pris les rênes du pays. Membre du parti centriste Somos Perú, il a prêté serment avec la promesse de s’attaquer au crime organisé, qualifié de « principal ennemi » du Pérou. Mais son arrivée au pouvoir est loin de faire l’unanimité. Une vendeuse de Lima, Gaby Valdivia, résume le sentiment de beaucoup : « On a remplacé un rat par un autre. »
Jeri, déjà éclaboussé par une plainte pour agression sexuelle en 2024 (classée sans suite), devra naviguer dans un climat de méfiance. Son mandat, qui s’achèvera en juillet 2026 après des élections générales, s’annonce périlleux. La tâche est immense : restaurer la confiance, lutter contre la criminalité et stabiliser un pays au bord du gouffre.
Vers un Avenir Incertain
Le Pérou se trouve à un carrefour. La crise actuelle, bien que dramatique, pourrait être une opportunité pour repenser ses institutions. Mais pour l’heure, le pays reste englué dans un cycle d’instabilité. Les défis sont nombreux :
- Restaurer la confiance : Les citoyens doutent de leurs dirigeants.
- Combattre le crime : La lutte contre les réseaux criminels est prioritaire.
- Renforcer les institutions : Un meilleur équilibre des pouvoirs est nécessaire.
Alors que les élections d’avril 2026 approchent, le Pérou doit relever un défi de taille : briser le cycle des crises. Sans réformes profondes, le pays risque de continuer à danser au bord du précipice, entre scandales, violence et désillusions.











