Au cœur du Soudan, des villes entières suffoquent sous le poids d’une guerre impitoyable. Imaginez-vous terré dans un abri de fortune, le grondement des obus comme seul horizon sonore, et la faim comme compagne quotidienne. C’est la réalité des civils pris au piège dans des zones assiégées comme el-Facher, au Darfour-Nord, ou Kadugli et Dilling, dans le Kordofan-Sud. Ces témoignages, recueillis dans des conditions extrêmes, dressent le portrait d’une lutte désespérée pour la survie, où l’espoir s’accroche à des bribes de résilience.
Une Guerre qui Étrangle les Civils
Depuis plus de deux ans, le Soudan est déchiré par un conflit entre l’armée régulière et les Forces de soutien rapide (FSR), un groupe paramilitaire. L’armée contrôle le nord, le centre et l’est, tandis que les FSR dominent l’ouest et certaines zones du sud. Cette guerre, d’une brutalité sans nom, a transformé des villes entières en champs de bataille, où les civils paient le prix le plus lourd. À el-Facher, Kadugli et Dilling, les habitants vivent dans un état de siège permanent, coupés de toute aide extérieure, avec des ressources qui s’épuisent à une vitesse alarmante.
El-Facher : Une Ville sous les Bombes
À el-Facher, capitale du Darfour-Nord, les habitants vivent dans la peur constante des bombardements. Les FSR, déterminés à prendre le contrôle de cette dernière place forte de l’armée dans la région, intensifient leurs attaques depuis août. Les tirs d’artillerie et les drones s’abattent sans répit, obligeant les habitants à se terrer dans des abris creusés à la hâte devant leurs maisons.
« Les bombardements sont permanents. La plupart du temps, nous restons dans les abris que nous avons creusés devant nos maisons », confie Omar, un habitant ayant fui un camp de déplacés pour se réfugier en ville.
La situation est si critique que même les produits de base, comme l’ambaz, une farine d’écorce d’arachide normalement réservée aux animaux, deviennent introuvables. Les prix s’envolent, rendant la survie un luxe. Un sac d’ambaz peut coûter jusqu’à 500 euros, une somme exorbitante pour des familles déjà démunies. Fuir ? Un rêve inaccessible pour beaucoup, tant les routes sont dangereuses et les coûts de transport prohibitifs.
Chiffre clé : Selon des analyses satellites, el-Facher est encerclée par 68 kilomètres de remblais, avec un corridor de seulement 3 à 4 kilomètres comme unique issue.
Un Système de Santé à l’Agonie
Dans les hôpitaux d’el-Facher, le personnel médical lutte avec des moyens dérisoires. Les stocks de médicaments sont presque épuisés, et les instruments chirurgicaux, faute de désinfectant, sont difficilement stérilisés. Les soignants, parfois cloîtrés dans les établissements depuis des mois, doivent improviser avec des moyens de fortune.
« Nos stocks de médicaments sont presque vides. Nous utilisons des tissus de moustiquaires pour bander les plaies », témoigne un médecin anonyme.
La malnutrition aggrave encore la situation. Les enfants et les femmes, particulièrement vulnérables, souffrent de carences qui réduisent leur résistance aux maladies. Sans traitements adéquats, les cas les plus simples deviennent mortels. Ce chaos sanitaire reflète l’ampleur de la crise humanitaire qui sévit dans ces zones assiégées.
Kordofan-Sud : La Faim comme Arme
Dans le Kordofan-Sud, les villes de Kadugli et Dilling sont également encerclées, principalement par les FSR et leurs alliés du Mouvement populaire de libération du Soudan–Nord. Ici, la faim est devenue une arme redoutable. Les habitants, privés de ressources, se tournent vers des solutions désespérées pour survivre.
« Il y a des jours où nous ne mangeons rien, alors nous nous rabattons sur des plantes vertes, peu importe si elles sont nocives », raconte Hagar, 28 ans, habitante de Kadugli.
Les produits de première nécessité atteignent des prix astronomiques, rendant l’accès à la nourriture presque impossible. Selon l’UNICEF, plus de 63 000 enfants souffrent de malnutrition aiguë dans cette région. À Dilling, entre 200 et 300 personnes quittent quotidiennement la ville en quête de nourriture, d’eau ou de soins, souvent au péril de leur vie.
Ville | Situation | Défis majeurs |
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El-Facher | Encerclée par 68 km de remblais | Bombardements, pénurie de médicaments, malnutrition |
Kadugli | Assiégée par les FSR | Famine, absence de médicaments |
Dilling | Encerclée par les FSR et alliés | Pénurie alimentaire, exode quotidien |
Des Témoignages qui Révèlent l’Horreur
Les récits des habitants sont déchirants. Halima, une mère de trois enfants, a perdu son mari dans une frappe à el-Facher. Réfugiée dans un centre d’accueil, elle dépend d’une cantine communautaire qui s’arrête parfois, la laissant sans rien pour nourrir ses enfants. À Kadugli, Hassan, bénévole en pédiatrie, voit des patients mourir faute de médicaments de base.
« Chaque jour, nous voyons mourir des patients qu’il serait si simple de sauver en temps normal », déplore Hassan.
À Dilling, Emgahed, une jeune femme de 22 ans, a abandonné ses rêves d’enseignement pour travailler sur un marché où même des biscuits destinés aux enfants sont détournés et revendus à prix d’or. Ces histoires, bien que différentes, convergent vers un même constat : la guerre a transformé la vie quotidienne en une lutte pour la survie.
Une Crise Humanitaire Oubliée
La situation au Soudan reste largement ignorée par la communauté internationale. Les organisations humanitaires peinent à accéder aux zones assiégées, et les stocks d’aide alimentaire, parfois bloqués dans des entrepôts, ne parviennent pas aux populations. Cette crise, qualifiée de « morgue à ciel ouvert » par certains habitants, met en lumière l’urgence d’une mobilisation mondiale.
- Pénurie alimentaire : Les produits de base atteignent des prix inaccessibles, forçant les habitants à consommer des plantes potentiellement toxiques.
- Crise sanitaire : Les hôpitaux manquent de tout, des médicaments aux désinfectants, aggravant les cas de malnutrition et de maladies.
- Insécurité constante : Les bombardements et les milices rendent tout déplacement risqué, emprisonnant les civils dans des villes assiégées.
Alors que les bombes continuent de pleuvoir et que la faim resserre son étau, les civils du Soudan appellent à l’aide. Leur résilience, bien que remarquable, ne peut compenser l’absence d’une intervention internationale d’ampleur. Combien de temps encore pourront-ils tenir dans cet enfer ?