En cette période d’élections législatives anticipées, le sujet brûlant de l’immigration s’impose à nouveau dans le débat public. Le Rassemblement national (RN) de Jordan Bardella promet monts et merveilles en la matière, agitant le chiffon rouge des économies massives que permettrait une sévère réduction des droits des immigrés. Mais une récente étude de l’Institut Montaigne vient jeter un sérieux doute sur ces projections enthousiastes.
Le mirage des milliards d’euros d’économies
Lors des législatives de 2022, Marine Le Pen avait déjà brandi des chiffres impressionnants. Son programme de réduction des droits des immigrés devait rapporter pas moins de 16 milliards d’euros par an aux caisses de l’État. Une manne providentielle en période de disette budgétaire. Son successeur à la tête du parti, Jordan Bardella, reprend aujourd’hui les mêmes recettes:
- Réserver les allocations familiales aux Français
- Conditionner le RSA et les autres prestations sociales non-contributives à 5 ans de travail en France
- Remplacer l’Aide Médicale d’État (AME) par une simple “aide médicale vitale”
Pourtant, selon les calculs de l’Institut Montaigne, le gain serait bien moindre qu’espéré. Ce think tank libéral a passé au crible les principales mesures du RN. Verdict sans appel: leur application rapporterait beaucoup moins que promis, sans parler de leur caractère difficilement applicable. Morceaux choisis.
Allocations familiales: 2 milliards d’économies surestimées
Réserver les allocations familiales aux seuls Français permettrait d’économiser 2,3 milliards d’euros par an selon le RN. Sauf que l’Institut Montaigne évalue plutôt le gain à 300 millions d’euros, soit 7 fois moins. La raison? Une large partie des familles immigrées deviendraient éligibles aux minima sociaux, annulant une bonne partie des économies.
AME: des économies contrebalancées par des coûts cachés
Autre mesure phare, la quasi suppression de l’AME qui finance les soins des étrangers en situation irrégulière. Le RN chiffre les économies potentielles à 1 milliard d’euros. Problème, restreindre l’accès aux soins coûterait aussi cher à l’État, voire plus, en termes de dégradation de la santé publique. Les soins urgents, bien plus onéreux, exploseraient.
RSA: une mesure difficilement applicable
Conditionner le RSA à 5 ans de travail poserait un casse-tête juridique. Aujourd’hui, tout résident légal peut y prétendre s’il remplit les critères. Y toucher pour les seuls étrangers créerait une discrimination sur la nationalité, contraire aux traités européens. Le risque de censure serait élevé.
Les mesures du RN sur l’immigration se heurtent à des obstacles juridiques, économiques et sanitaires qui réduisent fortement les économies espérées.
L’Institut Montaigne
En définitive, les promesses d’économies massives sur le dos des immigrés semblent bien optimistes. Non seulement leur chiffrage apparaît exagéré, mais leur mise en œuvre se heurterait à de nombreux écueils juridiques et pratiques. Le mirage des milliards se dissipe à l’épreuve des faits. Un constat qui invite à prendre avec prudence les annonces du RN en la matière, au-delà de l’effet d’affichage.