Certains personnages littéraires marquent tellement les esprits qu’ils finissent par donner leur nom à des mots de notre langage courant. De Gavroche à Dulcinée en passant par Tartuffe, zoom sur ces figures emblématiques de la littérature française et mondiale qui ont forgé des expressions aujourd’hui incontournables.
Quand la littérature enrichit la langue
La littérature n’est pas qu’une histoire de mots couchés sur le papier. C’est aussi une fabrique à néologismes qui imprègnent peu à peu notre vocabulaire. Véritables archétypes, certains héros et héroïnes de romans se sont tellement ancrés dans l’imaginaire collectif que leur patronyme est devenu un nom commun.
Bien sûr, tout le monde connaît l’histoire du sacripant, ce chevalier matamore issu d’un poème de la Renaissance italienne. Ou celle de la belle Dulcinée dont s’éprend Don Quichotte sous la plume de Cervantès. Mais saviez-vous que le mot rocambolesque vient en droite ligne des aventures invraisemblables de Rocambole, personnage picaresque d’un roman-feuilleton du 19ème siècle ?
Gavroche, galopin généreux
Dans Les Misérables, Victor Hugo campe un jeune gamin des rues parisien, vif et gouailleur. Gavroche chantonne même au moment de mourir au combat, en luttant contre les privilèges. Son nom est depuis entré dans le langage courant pour désigner un voyou attachant au grand cœur.
“Cette fois il s’abattit la face contre le pavé, et ne remua plus. Cette petite grande âme venait de s’envoler.”
– Victor Hugo, Les Misérables
Bovarysme, mal du siècle romanesque
Flaubert lui-même est à l’origine du terme bovarysme pour désigner l’attitude de son héroïne Emma Bovary. Profondément insatisfaite de son existence morne, cette dernière se perd dans des rêveries romanesques jusqu’à en mourir. Le bovarysme devient alors cette faculté de se concevoir autre qu’on est, de construire une image embellie mais faussée de soi-même.
Pipelette, reine du commérage
Vous connaissez forcément une pipelette ! Ce terme désignant une personne bavarde et indiscrète vient directement de Madame Pipelet, une concierge très portée sur les ragots dans Les Mystères de Paris d’Eugène Sue. Publié sous forme de feuilleton au 19ème siècle, ce roman connut un immense succès.
Tartuffe, parangon de l’hypocrisie
La pièce de Molière a tellement marqué les esprits que le nom de son personnage principal est devenu synonyme de faux dévot, d’hypocrite qui se sert de la religion pour arriver à ses fins. Depuis le 17ème siècle, combien de tartuffes ont ainsi été démasqués ?
Ubuesque, le pouvoir dans toute son absurdité
Fantasque et sanguinaire, le Père Ubu imaginé par Alfred Jarry est resté comme l’incarnation de la bêtise au pouvoir poussée jusqu’à l’absurde. Une situation ubuesque est ainsi complètement folle, grotesque, rappelant les facéties du personnage.
On pourrait citer bien d’autres exemples, d’Harpagon le cupide à Rastignac l’arriviste en passant par l’inquiétante Lolita. Tous illustrent à quel point la littérature infuse notre langage, lui apportant des mots nouveaux qui croquent des caractères universels. Alors, prêt à devenir le prochain néologisme issu d’un roman ?