Quand un président déclare ouvertement haïr ses adversaires, que devient la justice ? Aux États-Unis, un vent de polémique souffle depuis que Donald Trump, revenu au pouvoir en janvier 2025, semble décidé à régler ses comptes. Ses récentes déclarations, notamment après l’inculpation de James Comey, ancien directeur du FBI, laissent peu de place au doute : une campagne de vengeance politique est en marche, et elle pourrait redéfinir les contours de la démocratie américaine.
Une justice sous pression
Le 23 septembre 2025, Donald Trump n’a pas caché sa satisfaction lorsque l’inculpation de James Comey, l’une de ses cibles de longue date, a été annoncée. Sur son réseau social, il a célébré cette décision en lettres capitales, proclamant que la justice était enfin rendue en Amérique. Loin de modérer ses propos, il a qualifié l’ancien patron du FBI de « policier corrompu », renforçant l’image d’un président prêt à tout pour éliminer ses opposants.
Cette posture soulève une question cruciale : la justice peut-elle rester indépendante face à un tel interventionnisme ? Les critiques, portées par des organisations comme l’ACLU, dénoncent une instrumentalisation du système judiciaire. Selon Mike Zamore, un haut responsable de cette organisation, le gouvernement actuel détourne les institutions pour servir une vendetta personnelle.
Le président et son gouvernement ont détourné notre système judiciaire pour que sa campagne de vengeance devienne réalité.
Mike Zamore, ACLU
Un président animé par la rancune
Donald Trump ne cache pas ses sentiments. Lors d’un récent rassemblement en hommage à un allié influent, il a déclaré sans détour : « Je hais mon adversaire et je ne lui veux pas de bien. » Ces mots, prononcés avec une franchise brutale, ont choqué par leur absence de retenue. Ils traduisent une approche de la politique où la vengeance semble primer sur la réconciliation.
Pourtant, la porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt, défend cette attitude comme une forme de transparence. Selon elle, le président reste fidèle à lui-même, et ses propos ne font que refléter sa détermination à demander des comptes à ceux qu’il accuse d’avoir abusé du système judiciaire contre lui. Mais cette rhétorique, loin d’apaiser, attise les tensions dans un pays déjà profondément divisé.
Une démocratie repose sur l’indépendance de ses institutions. Quand un président revendique publiquement la haine de ses adversaires, quelles sont les conséquences pour l’équilibre des pouvoirs ?
Des nominations stratégiques
Pour mener à bien ses objectifs, Trump s’entoure de fidèles. À la tête du FBI, il a nommé Kash Patel, un loyaliste dont la fidélité est indiscutable. Une autre nomination notable est celle de Lindsey Halligan, une avocate au parcours atypique, désormais procureure fédérale. Son expérience, principalement axée sur des dossiers d’assurance, soulève des interrogations sur sa capacité à gérer des affaires judiciaires d’envergure.
Ces choix ne sont pas anodins. En plaçant des alliés à des postes clés, le président semble vouloir contrôler l’appareil judiciaire. Halligan, par exemple, a remplacé un magistrat qui aurait refusé d’engager certaines poursuites, un signal clair que la loyauté prime sur l’indépendance.
Une liste d’ennemis bien définie
Bien que Trump affirme ne pas avoir de « liste » d’adversaires à cibler, ses discours racontent une autre histoire. Parmi ses cibles figurent des figures politiques et judiciaires de premier plan : George Soros, Adam Schiff, Letitia James, John Bolton, et même Barack Obama, accusé de trahison. Ces attaques ne sont pas nouvelles, mais elles prennent une ampleur inédite avec son retour à la Maison Blanche.
Trump justifie ses actions en se présentant comme une victime. Il affirme avoir été la cible d’un complot orchestré par ses opposants, notamment à travers les enquêtes sur l’ingérence russe lors de sa campagne de 2016. Il conteste toujours la légitimité de l’élection de 2020, remportée par Joe Biden, et dénonce ce qu’il appelle le « terrorisme intérieur » de la gauche.
- George Soros : Menacé pour son soutien à des causes progressistes.
- Adam Schiff : Visé pour son rôle dans les enquêtes sur Trump.
- Letitia James : Critiquée pour ses poursuites contre Trump.
- John Bolton : Ancien conseiller perquisitionné par le FBI.
- Barack Obama : Accusé de trahison, malgré une possible immunité.
Une démocratie en danger ?
L’indépendance de la justice est un pilier fondamental de toute démocratie. Pourtant, les actions de Trump semblent remettre en question ce principe. En saluant publiquement l’inculpation de Comey et en attaquant d’autres figures, il brise avec la tradition de retenue des présidents en matière judiciaire. Cette approche pourrait avoir des conséquences durables, non seulement sur les institutions, mais aussi sur la confiance des citoyens dans leur système.
Les défenseurs de Trump, eux, estiment qu’il ne fait que corriger des injustices passées. Ils pointent du doigt les procédures de destitution et les poursuites judiciaires dont il a été la cible, qu’ils qualifient de persécutions politiques. Mais cette logique de représailles risque de créer un cercle vicieux, où chaque camp instrumentalise la justice pour atteindre ses adversaires.
Un précédent inquiétant
L’inculpation de James Comey n’est peut-être que le début. Trump a laissé entendre qu’il souhaitait voir d’autres poursuites, un message clair à sa ministre de la Justice, Pam Bondi, qu’il a récemment critiquée pour son manque d’audace. Cette pression publique sur une ministre censée incarner l’indépendance judiciaire est sans précédent.
Pourtant, certains obstacles pourraient freiner cette campagne. La Cour suprême, à l’initiative de Trump lui-même, a récemment établi un principe d’immunité présidentielle, qui pourrait protéger des figures comme Barack Obama. Mais pour d’autres, moins protégés, le risque d’être ciblé reste bien réel.
Personnalité | Accusation | Statut |
---|---|---|
James Comey | Corruption présumée | Inculpé |
John Bolton | Perquisition du FBI | En cours |
Barack Obama | Trahison présumée | Protégé par immunité |
Un pays divisé
Les États-Unis sont plus polarisés que jamais. Les déclarations de Trump, loin de chercher à apaiser, jettent de l’huile sur le feu. Ses partisans y voient une forme de justice, une revanche contre ceux qu’ils accusent d’avoir persécuté leur leader. Ses détracteurs, eux, craignent une érosion des valeurs démocratiques.
La question qui se pose désormais est simple : jusqu’où ira cette campagne de vengeance ? Si Trump continue sur cette voie, les institutions américaines pourraient être mises à rude épreuve. La justice, censée être un rempart contre les abus de pouvoir, risque de devenir un outil au service d’un agenda personnel.
Pour l’instant, l’avenir reste incertain. Mais une chose est sûre : les prochains mois seront déterminants pour l’équilibre des pouvoirs aux États-Unis. La démocratie américaine, déjà fragilisée, pourrait sortir transformée de cette épreuve, pour le meilleur ou pour le pire.