Alors que les français se sont rendus aux urnes dimanche pour le premier tour des élections législatives, les projections en sièges font déjà la une des médias. Le Rassemblement national, grand vainqueur de ce scrutin, pourrait envoyer entre 240 et 270 députés à l’Assemblée nationale selon les estimations. Mais attention, ces chiffres sont à prendre avec des pincettes. De nombreuses inconnues peuvent encore bouleverser la donne et influencer significativement la composition finale de l’hémicycle.
Des projections basées sur des hypothèses fragiles
Pour établir ces fameuses projections en sièges, les instituts de sondage s’appuient sur les résultats d’un échantillon de bureaux de vote considérés comme représentatifs. Ces données sont ensuite extrapolées à l’ensemble des 577 circonscriptions via des algorithmes complexes. Mais cette méthode comporte de nombreux biais, comme l’explique François Kraus, directeur du pôle Politique à l’Ifop :
Ce sont des estimations qui plaquent un scénario national dans les 577 circonscriptions. Les chiffres qui sortent ne sont que des fourchettes larges.
François Kraus, directeur du pôle Politique à l’Ifop
En effet, ces projections ne tiennent pas compte des spécificités locales de chaque circonscription, ni de la configuration précise des duels ou des triangulaires au second tour. Elles ne prennent pas non plus en considération les consignes de vote et les éventuels désistements qui seront donnés par les différents partis dans l’entre-deux tours.
Des appels au “front républicain” qui peuvent rebattre les cartes
Dès l’annonce des résultats, plusieurs leaders politiques ont d’ailleurs appelé à faire barrage au Rassemblement national. Jean-Luc Mélenchon a ainsi exhorté à ne pas donner “une voix” ni “un siège” de plus au RN. En cas de triangulaire défavorable, il demande à ses candidats de se retirer pour laisser le champ libre au mieux placé.
Même son de cloche du côté de la majorité présidentielle. Le premier ministre Gabriel Attal a annoncé que les candidats Ensemble se désisteraient dans de nombreuses circonscriptions pour faire barrage à l’extrême droite. Une stratégie également adoptée par la droite, Édouard Philippe appelant les candidats Horizons arrivés en 3ème position à se retirer pour éviter l’élection de députés RN ou LFI.
Des projections affinées après les désistements
C’est donc seulement à partir de ce mardi soir, date limite pour le dépôt des candidatures au second tour, que les projections en sièges gagneront en fiabilité. Les instituts pourront alors intégrer dans leurs modèles les duels et triangulaires réellement en lice ainsi que les consignes de vote des différents partis.
D’ici là, les estimations divergent assez significativement d’un institut à l’autre. Si l’Ifop donne jusqu’à 270 sièges au Rassemblement national, Elabe table sur un maximum de 310 députés RN. Des écarts également marqués pour les autres forces politiques, preuve de la grande volatilité de ces projections à ce stade.
Un second tour décisif et incertain
Une seule certitude : ces élections législatives s’annoncent cruciales pour l’avenir du pays. La composition de la future Assemblée nationale sera déterminante pour la conduite de la politique nationale durant le prochain quinquennat. Entre une poussée historique des extrêmes et un affaiblissement inédit de la majorité présidentielle, tous les scénarios semblent envisageables à ce stade.
Pour y voir plus clair, rendez-vous dimanche 7 juillet pour le second tour des législatives. Un scrutin décisif où chaque voix comptera et où les électeurs auront la lourde responsabilité de choisir l’orientation qu’ils souhaitent donner au pays pour les cinq prochaines années. D’ici là, méfions-nous des projections hâtives et restons prudents sur les nombreuses incertitudes qui demeurent.
