Un an après avoir illuminé Paris avec 14 médailles aux Jeux Paralympiques, la para-natation française retrouve le chemin des bassins internationaux. Cette fois, c’est à Singapour, dans un centre aquatique vibrant d’énergie, que huit nageurs tricolores se préparent à écrire un nouveau chapitre. Menés par les champions paralympiques Ugo Didier et Emeline Pierre, ils s’élancent dans les Championnats du Monde 2025, un rendez-vous crucial marquant le début d’un cycle vers Los Angeles 2028. Mais à quoi faut-il s’attendre dans ce premier grand test post-Paris ?
Un Nouveau Départ à Singapour
Sept semaines après les exploits des nageurs valides, le centre aquatique de Singapour s’anime à nouveau. Du 21 au 27 septembre 2025, les Mondiaux de para-natation accueillent pour la première fois cet événement sur le sol asiatique. Pour l’équipe de France, ce rendez-vous est plus qu’une simple compétition : il s’agit d’un tremplin pour confirmer les succès de Paris et poser les jalons d’une nouvelle Olympiade. Les nageurs tricolores, auréolés de leurs 14 médailles paralympiques, dont deux en or, abordent ce défi avec ambition, mais aussi avec humilité face à une concurrence mondiale toujours plus relevée.
Le bassin de Singapour, encore marqué par les performances de stars comme Léon Marchand, devient le théâtre d’une nouvelle épopée. Les Bleus, emmenés par des figures comme Ugo Didier, Emeline Pierre, et Alex Portal, savent que chaque course compte pour asseoir leur statut et préparer l’avenir. Mais comment ces athlètes, encore portés par l’émotion de Paris, abordent-ils ce défi ?
Les Leaders Tricolores : Ugo Didier et Emeline Pierre
À 24 ans, Ugo Didier incarne l’espoir et la détermination. Sacré champion paralympique sur le 400 m nage libre S9 à Paris, le Toulousain revient avec une saison 2025 en demi-teinte. « Cette année n’a pas été la meilleure en termes de résultats, mais je sais ce que je vaux », confie-t-il dans une interview récente. Son objectif ? Retrouver ses meilleurs chronos dans une catégorie S9 ultra-compétitive, où il croisera notamment son compatriote Hector Denayer, médaillé d’argent à Paris.
« Je me concentre sur moi et mes meilleurs temps. Je sens que la forme est là. »
Ugo Didier, champion paralympique
De son côté, Emeline Pierre, 25 ans, aborde ces Mondiaux avec une sérénité acquise après son titre sur le 100 m nage libre S10 à Paris. Diplômée en psychomotricité, la nageuse brestoise voit Singapour comme une étape clé. « Paris, c’était la fin d’un cycle. Maintenant, il faut se réinventer pour durer jusqu’à Los Angeles », explique-t-elle. Engagée sur le 50 m, le 100 m, et le 100 m dos, elle devra se passer de sa grande rivale, la Canadienne Aurélie Rivard, absente cette fois-ci.
Le duo, qui a partagé un stage en Bretagne avant le départ pour Singapour, symbolise la cohésion de cette équipe de France. Leur préparation rigoureuse, mêlant entraînements intensifs et récupération mentale, montre leur volonté de ne pas se reposer sur leurs lauriers parisiens.
Alex Portal : Défier les Obstacles
Avec quatre médailles à Paris, Alex Portal est l’un des piliers de l’équipe. Pourtant, son année 2025 a été marquée par une blessure à l’épaule gauche qui l’a contraint à un repos forcé. « J’ai passé un mois sans nager, puis un mois avec un seul bras. Aujourd’hui, je reprends progressivement », raconte-t-il. À Singapour, il s’aligne sur le 100 m, le 400 m, le 100 m papillon, et le 200 m 4 nages dans la catégorie S13 (déficients visuels). L’absence d’Ihar Boki, le Biélorusse aux 21 titres paralympiques, pourrait ouvrir des opportunités. « Un an trop tard », plaisante Portal, qui avait brillé en 2023 à Manchester sans son rival.
Son frère cadet, Kylian Portal, 18 ans, complète la fratrie. Médaillé sur le 400 m S13 à Paris, il apporte une touche de fraîcheur à l’équipe. Leur complicité, autant dans la vie que dans l’eau, est un atout précieux pour les relais mixtes, où la France espère briller.
Une Équipe Complète et Ambitieuse
Outre les têtes d’affiche, l’équipe de France compte d’autres talents prometteurs. Voici les nageurs engagés à Singapour :
- Laurent Chardard (S6, 30 ans) : 50 m, 100 m, 100 m dos, 50 m papillon.
- Hector Denayer (S9, 20 ans) : 50 m, 100 m, 100 m brasse, 100 m papillon, 200 m 4 nages.
- Dimitri Granjux (S4, 19 ans) : 50 m, 200 m, 50 m dos, 50 m brasse, 150 m 3 nages.
- Agathe Pauli (S9, 22 ans) : 100 m papillon, 400 m.
Ces athlètes, aux profils variés, incarnent la diversité et la résilience de la para-natation française. Chacun apporte sa pierre à l’édifice, avec des objectifs clairs : performer individuellement et briller dans les relais 4×100 m 4 nages et 4×100 m nage libre.
Les Défis de la Visibilité
Si Paris 2024 avait mis la para-natation sous les feux des projecteurs, les Mondiaux de Singapour souffrent d’un manque de diffusion. Contrairement aux compétitions valides, retransmises à grande échelle, ces championnats ne seront visibles que sur YouTube. « C’est frustrant. La Défense Arena était pleine pour nous l’an dernier », regrette Emeline Pierre. Alex Portal renchérit : « On parle d’héritage, mais sans diffuseur, c’est difficile de le faire vivre. »
« On aurait aimé la même visibilité que pour les valides. C’est dommage, car le public était là à Paris. »
Alex Portal, nageur paralympique
Ce manque de couverture médiatique soulève une question essentielle : comment valoriser davantage la para-natation ? Les exploits de ces athlètes, qui conjuguent talent et détermination face à des défis physiques, méritent une reconnaissance à la hauteur de leurs performances. Singapour pourrait être l’occasion de rappeler leur importance, à condition que les projecteurs suivent.
Vers Los Angeles 2028 : Un Cycle à Construire
Les Mondiaux de Singapour marquent le début d’un nouveau cycle olympique. Pour les nageurs français, l’objectif est clair : maintenir la dynamique de Paris tout en se projetant vers Los Angeles 2028. Chaque course, chaque chrono, chaque médaille compte pour bâtir la confiance et affiner les stratégies. « Il faut se réinventer », insiste Emeline Pierre, qui voit dans ces championnats une première étape vers de nouveaux sommets.
Les entraîneurs jouent un rôle clé dans cette transition. Stéven Deyres, coach d’Emeline Pierre, a pris le temps de poser un bilan post-Paris pour définir de nouveaux objectifs. Pour Ugo Didier, l’accent est mis sur la régularité et la gestion de la pression dans une catégorie S9 où la concurrence est féroce. Quant à Alex Portal, sa récupération progressive après sa blessure montre une approche prudente mais déterminée.
Les Enjeux des Relais et de la Concurrence
Les relais mixtes, notamment le 4×100 m 4 nages et le 4×100 m nage libre, sont des moments forts attendus à Singapour. La France, avec des nageurs comme Ugo Didier, Hector Denayer, et les frères Portal, a les moyens de viser le podium. Ces épreuves, où la cohésion d’équipe est essentielle, pourraient offrir des moments de gloire collective.
Côté concurrence, l’absence de certains favoris, comme Ihar Boki, redistribue les cartes. Cependant, d’autres nations, comme les États-Unis, l’Australie, et le Canada, restent des adversaires redoutables. Les Français devront allier stratégie et explosivité pour tirer leur épingle du jeu.
Nageur | Catégorie | Épreuves | Médailles à Paris |
---|---|---|---|
Ugo Didier | S9 | 100 m, 400 m, 100 m dos, 200 m 4 nages | 3 |
Emeline Pierre | S10 | 50 m, 100 m, 100 m dos | 2 |
Alex Portal | S13 | 100 m, 400 m, 100 m papillon, 200 m 4 nages | 4 |
Un Héritage à Faire Vivre
Les Jeux Paralympiques de Paris ont marqué un tournant pour la para-natation. Les gradins pleins, l’engouement du public, et les performances exceptionnelles ont donné un élan sans précédent à cette discipline. Pourtant, un an plus tard, le constat est mitigé. La faible visibilité des Mondiaux de Singapour rappelle que l’héritage des Jeux doit être entretenu activement. Les nageurs français, par leurs performances, ont l’opportunité de raviver cette flamme.
Pour les supporters, suivre les exploits de l’équipe de France nécessitera un peu plus d’efforts cette fois-ci, avec des retransmissions limitées à YouTube. Mais l’enjeu en vaut la chandelle : chaque course est une occasion de découvrir des histoires de résilience, de talent, et d’ambition. Alors, qui parmi Ugo Didier, Emeline Pierre, ou Alex Portal décrochera l’or à Singapour ? Réponse dès le 21 septembre.
En attendant, une chose est sûre : la para-natation française n’a pas fini de faire parler d’elle. De Singapour à Los Angeles, le chemin est encore long, mais les Bleus sont prêts à plonger tête la première dans ce nouveau défi.