Dans un pays où chaque vote compte, le Malawi a vibré mardi au rythme d’élections générales décisives. Avec une participation dépassant les 64 %, les électeurs ont exprimé leur voix dans un climat marqué par une économie en berne et des défis colossaux. Les bureaux de vote, animés par une énergie palpable, ont fermé leurs portes, laissant place au dépouillement et à l’attente fiévreuse des résultats. Qui de Lazarus Chakwera, président sortant, ou de Peter Mutharika, son rival de longue date, prendra les rênes de ce pays d’Afrique australe ?
Un scrutin sous haute tension
Le Malawi, nation de 21 millions d’habitants nichée au cœur de l’Afrique australe, a organisé des élections présidentielles, parlementaires et locales dans un contexte particulièrement complexe. Avec 7,2 millions d’électeurs inscrits, le taux de participation de 64 % reflète une mobilisation similaire à celle de 2020. Ce chiffre, bien que stable, cache une réalité : les Malawites se sont rendus aux urnes avec l’espoir, ou peut-être l’urgence, de voir émerger un leadership capable de redresser une économie en chute libre.
Le scrutin s’est déroulé sans incidents majeurs, un signe de maturité démocratique pour ce pays qui a connu des remous électoraux par le passé. En 2019, les résultats avaient été annulés pour cause d’irrégularités, menant à un nouveau vote en 2020, remporté par Chakwera. Cette fois-ci, les autorités électorales ont huit jours pour publier des résultats vérifiés, un délai qui alimente déjà les spéculations.
Chakwera contre Mutharika : un duel historique
Le face-à-face entre Lazarus Chakwera et Peter Mutharika domine la scène politique malawite. Âgé de 70 ans, Chakwera, pasteur évangélique devenu président, mise sur son bilan pour convaincre. En face, Mutharika, 85 ans, ancien professeur de droit et ex-président, cherche à reconquérir le pouvoir. Leur rivalité, qui s’étend sur plus d’une décennie, a déjà marqué les élections de 2014 et 2020.
« Ce scrutin est un referendum sur la gestion de la crise économique », analyse un politologue local.
Avec 17 candidats en lice, la course à la présidence pourrait nécessiter un second tour si aucun ne dépasse les 50 % des suffrages. Ce scénario, jugé probable par les observateurs, prolongerait l’incertitude dans un pays où chaque jour sans solution pèse lourd sur la population.
Une économie au bord du gouffre
Le Malawi figure parmi les nations les plus pauvres du globe, avec 70 % de la population vivant sous le seuil de pauvreté de 2,15 dollars par jour, selon la Banque mondiale. L’économie, lourdement dépendante de l’agriculture, notamment la production de tabac, traverse une crise sans précédent. L’inflation galopante, dépassant les 27 %, érode le pouvoir d’achat, tandis que les pénuries de devises paralysent les importations.
Depuis 2023, le secteur agricole a été durement frappé par deux sécheresses et un cyclone dévastateur. Ces catastrophes ont non seulement réduit les récoltes, mais aussi fragilisé l’emploi, le tabac étant le principal pourvoyeur de main-d’œuvre. Les candidats, quel que soit le vainqueur, devront proposer des solutions concrètes pour relancer une économie asphyxiée.
Les défis économiques en chiffres :
- Inflation : Plus de 27 % en rythme annuel.
- Pauvreté : 70 % de la population sous 2,15 $ par jour.
- Agriculture : Secteur clé, affecté par sécheresses et cyclone.
- Devises : Pénurie chronique, freinant les importations.
Lazarus Chakwera : un bilan sous pression
Arrivé au pouvoir en 2020 après une victoire écrasante (59 % des voix), Lazarus Chakwera porte le poids d’un mandat marqué par des crises multiples. Son accession au pouvoir, après l’annulation du scrutin de 2019, avait suscité l’espoir d’un renouveau. Cependant, les défis économiques et climatiques ont terni son image, et ses promesses de redressement peinent à convaincre.
Chakwera mise sur son charisme et son passé de pasteur pour rallier les électeurs, mais la grogne sociale, alimentée par l’inflation et les pénuries, pourrait jouer en sa défaveur. Sa capacité à mobiliser les électeurs ruraux, touchés de plein fouet par la crise agricole, sera déterminante.
Peter Mutharika : le retour d’un vétéran
À 85 ans, Peter Mutharika incarne l’expérience et la continuité. Son passage à la tête du pays, avant 2020, reste controversé, mais il conserve une base fidèle au sein du Parti démocrate-progressiste. Mutharika critique ouvertement la gestion de Chakwera, promettant des réformes économiques audacieuses. Son âge, cependant, soulève des questions sur sa capacité à diriger un pays en crise.
« Les Malawites veulent un leader qui comprend leurs luttes quotidiennes », a déclaré un partisan de Mutharika lors d’un meeting.
Les enjeux d’un second tour
Si aucun candidat n’atteint la majorité absolue, un second tour sera organisé dans les 60 jours. Ce scénario, bien que coûteux pour un pays aux ressources limitées, pourrait redessiner les alliances politiques. Les petits candidats, bien que moins influents, pourraient jouer un rôle clé en ralliant leurs électeurs à l’un des deux favoris.
Les observateurs s’accordent à dire que la campagne pour un éventuel second tour sera encore plus féroce, avec des discours centrés sur l’économie et la résilience face aux catastrophes climatiques. Les Malawites, épuisés par les crises, attendent des propositions concrètes plutôt que des promesses vagues.
Un peuple en attente de solutions
Le Malawi, avec ses paysages luxuriants et sa population résiliente, fait face à des défis qui dépassent la simple politique. La pauvreté endémique, l’insécurité alimentaire et les catastrophes climatiques exigent un leadership visionnaire. Les électeurs, en se rendant massivement aux urnes, ont exprimé leur désir de changement, ou du moins d’espoir.
Les prochains jours, avec l’annonce des résultats, seront cruciaux. Le vainqueur, qu’il s’agisse de Chakwera, Mutharika ou d’un outsider, héritera d’un pays au bord du précipice. La tâche s’annonce immense : relancer l’économie, restaurer la confiance et bâtir un avenir durable pour les 21 millions de Malawites.
À retenir :
- Participation électorale : 64 % des 7,2 millions d’électeurs.
- Principaux candidats : Lazarus Chakwera et Peter Mutharika.
- Défis majeurs : Inflation, sécheresses, pénurie de devises.
- Second tour probable si aucun candidat n’atteint 50 %.
Alors que le dépouillement se poursuit, le Malawi retient son souffle. Les résultats, attendus dans les prochains jours, pourraient redéfinir l’avenir de ce pays. Une chose est sûre : les électeurs ont envoyé un message clair, celui d’un peuple en quête de stabilité et de prospérité. Qui saura répondre à cet appel ?