Chaque année, le salon Defence and Security Equipment International (DSEI) à Londres attire des milliers de visiteurs et des géants de l’industrie de la défense. Mais en septembre 2025, l’événement s’ouvre dans un climat de haute tension. Des organisations pro-palestiniennes annoncent des manifestations massives pour dénoncer la présence de 51 entreprises israéliennes, accusées de contribuer aux violences à Gaza. Pourquoi ce salon, censé célébrer l’innovation militaire, devient-il le théâtre d’un conflit diplomatique et éthique ? Plongeons dans les coulisses de cet événement controversé.
Un Salon Sous Pression
Le DSEI, rendez-vous incontournable du secteur de la défense, s’attend à une affluence record cette année avec 1 750 exposants et environ 50 000 visiteurs. Cet événement, qui se tient tous les deux ans, met en lumière les dernières technologies militaires, des drones aux systèmes de cybersécurité. Pourtant, en 2025, l’ambiance est loin d’être festive. Des ONG, dont la Campaign Against Arms Trade (CAAT), orchestrent une mobilisation d’envergure pour protester contre la participation d’entreprises israéliennes.
Parmi les exposants, des poids lourds comme Elbit Systems, Rafael et Israel Aerospace Industries représentent le cinquième plus grand contingent national, derrière le Royaume-Uni, les États-Unis, l’Australie et l’Allemagne. Ces firmes, fleurons de l’industrie israélienne, sont accusées par les manifestants de fournir des équipements utilisés dans les opérations militaires à Gaza. Une citation d’Emily Apple, membre de CAAT, résume l’indignation :
Ces entreprises devraient être jugées pour crimes contre l’humanité, pas invitées à tirer profit des destructions à Gaza.
Emily Apple, Campaign Against Arms Trade
La manifestation, qui regroupe une centaine d’organisations anti-armes et pro-palestiniennes, promet de faire entendre sa voix dès l’ouverture du salon, le mardi 9 septembre.
Une Exclusion Controversée
Si les entreprises israéliennes sont bien présentes, les officiels du gouvernement israélien ont été exclus de l’événement par une décision du gouvernement britannique. Cette mesure, annoncée fin août 2025, fait suite à l’escalade des opérations militaires israéliennes à Gaza. Londres justifie cette exclusion comme une réponse à une situation jugée inacceptable, mais cette décision a provoqué la colère des autorités israéliennes.
Le ministère israélien de la Défense a qualifié cette interdiction d’acte discriminatoire, tout en réaffirmant son soutien aux entreprises nationales participant au salon. Cette mesure s’inscrit dans un contexte de relations tendues entre le Royaume-Uni et Israël, marquées par l’annonce du Premier ministre britannique, Keir Starmer, de reconnaître un État palestinien, une position partagée par d’autres pays comme la France.
Cette exclusion n’est pas sans précédent. En juin 2023, le salon du Bourget, en France, avait également restreint l’accès à certains stands israéliens, provoquant des réactions similaires. Ces décisions soulignent la difficulté pour les organisateurs de salons internationaux de naviguer dans un contexte géopolitique explosif.
Une Visite Présidentielle Sous Tension
En parallèle, la visite officielle du président israélien, Isaac Herzog, à Londres, coïncide avec l’ouverture du salon. Ce déplacement, prévu du 9 au 11 septembre, vise à exprimer la solidarité avec la communauté juive britannique, confrontée à une montée de l’antisémitisme. Cependant, cette visite divise, notamment au sein du parti travailliste au pouvoir, où certains critiquent son timing dans un climat déjà tendu.
Herzog, figure symbolique en Israël, devra naviguer entre des obligations diplomatiques et un contexte de manifestations. Cette visite illustre les défis auxquels sont confrontés les dirigeants dans un monde où les questions géopolitiques et humanitaires s’entremêlent de plus en plus.
Un Contexte Géopolitique Explosif
Le salon DSEI s’inscrit dans un contexte mondial où les dépenses militaires atteignent des sommets historiques. Les conflits en Ukraine et à Gaza ont dopé la demande pour des équipements de défense, faisant du salon un événement stratégique pour les industriels. Le Royaume-Uni, hôte de l’événement, prévoit d’ailleurs d’augmenter son budget militaire à 2,6 % du PIB d’ici 2027, avec une ambition de 3 % à l’horizon 2034.
Pour soutenir cette croissance, Londres a lancé une stratégie industrielle de défense dotée d’une enveloppe initiale de 250 millions de livres (environ 288 millions d’euros). Cette initiative vise à dynamiser l’économie régionale tout en renforçant les capacités militaires du pays. Mais cette ambition économique contraste avec les critiques éthiques portées par les manifestants.
Les chiffres clés du DSEI 2025 :
- 1 750 exposants de plus de 50 pays.
- 50 000 visiteurs attendus sur quatre jours.
- 51 entreprises israéliennes, cinquième contingent national.
- Clôture prévue le vendredi 12 septembre.
Les Enjeux Éthiques de l’Industrie de la Défense
La présence d’entreprises israéliennes au DSEI soulève des questions éthiques fondamentales. Pour les organisations comme CAAT, ces firmes profitent d’un marché lucratif tout en alimentant des conflits dévastateurs. À Gaza, l’offensive israélienne, déclenchée après l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, a causé des pertes humaines et matérielles considérables, amplifiant les critiques contre l’industrie de l’armement.
Ces débats ne sont pas nouveaux. Chaque grand salon de défense, qu’il s’agisse du DSEI ou du Bourget, doit composer avec des protestations similaires. Pourtant, l’ampleur des manifestations prévues à Londres cette année témoigne d’une sensibilité croissante à l’impact des technologies militaires sur les populations civiles.
Vers une Redéfinition des Salons de Défense ?
Face à ces controverses, les organisateurs de salons comme le DSEI sont confrontés à un dilemme : comment concilier innovation technologique et responsabilité éthique ? Certains appellent à des régulations plus strictes sur les exposants, tandis que d’autres estiment que ces événements doivent rester des plateformes neutres pour l’industrie.
Une chose est sûre : le DSEI 2025 ne sera pas un salon comme les autres. Entre les manifestations, les exclusions diplomatiques et les ambitions économiques du Royaume-Uni, il cristallise les tensions d’un monde en proie à des conflits multiples. Pour les visiteurs, exposants et manifestants, ces quatre jours à Londres seront un miroir des défis géopolitiques actuels.
Aspect | Détail |
---|---|
Nombre d’exposants | 1 750 |
Visiteurs attendus | 50 000 |
Entreprises israéliennes | 51 |
Budget militaire UK 2027 | 2,6 % du PIB |
En conclusion, le DSEI 2025 est bien plus qu’un simple salon professionnel. Il incarne les contradictions d’un monde où l’innovation militaire côtoie des questions éthiques brûlantes. Alors que les projecteurs se braquent sur Londres, une question demeure : comment concilier progrès technologique et responsabilité humanitaire ?