Imaginez-vous au milieu de l’océan, seul sur un voilier, avec pour seuls compagnons le vent, les vagues et votre propre détermination. C’est le quotidien de Tom Dolan, un marin irlandais qui, après avoir gravi les échelons avec persévérance, a marqué l’histoire en remportant la Solitaire du Figaro en 2024. À 38 ans, il s’élance pour la 56e édition de cette course légendaire, avec une sérénité nouvelle mais une ambition intacte. Comment cet outsider devenu champion aborde-t-il cette nouvelle aventure ?
Un Marin au Cœur de la Solitaire du Figaro
Tom Dolan n’est pas un novice. Avec huit participations à son actif, il connaît les caprices de l’océan comme sa poche. Pourtant, ce n’est pas l’expérience seule qui le définit, mais une humilité rare dans un sport où l’ego peut parfois prendre le large. Sa victoire en 2024, obtenue à sa septième tentative, l’a propulsé dans une lumière nouvelle, mais il refuse de se reposer sur ses lauriers. « Je sais ce que c’est que de finir 25e ou 1er », confie-t-il, soulignant la fragilité du succès dans une compétition aussi exigeante.
« C’est ma huitième participation, j’ai l’impression de n’avoir jamais été aussi zen. Peut-être parce que j’ai un peu moins de pression. »
Tom Dolan
Ce calme apparent ne doit pas tromper : Dolan reste un compétiteur acharné. Son objectif ? Non seulement défendre son titre, mais aussi prouver que sa victoire n’était pas un coup du hasard. Cette 56e édition, qui débute au Havre, promet d’être un défi de taille avec un parcours océanique exigeant. Plongeons dans le monde de ce marin d’exception, entre préparation minutieuse, défis mentaux et rêves d’avenir.
Une Victoire Historique et ses Répercussions
En 2024, Tom Dolan est entré dans l’histoire en devenant le troisième étranger à remporter la Solitaire du Figaro, après un Belge en 1970 et un Suisse en 1988. Cette consécration a été un tournant. « Au début, j’avais du mal à y croire », avoue-t-il. Les semaines suivant sa victoire ont été un tourbillon de sollicitations médiatiques, mais surtout un moment de validation personnelle. Après des années de sacrifices, il pouvait enfin savourer le fruit de son travail.
Cette victoire a également eu des retombées concrètes. Alors que son contrat avec ses partenaires touchait à sa fin, l’un d’eux a choisi de poursuivre l’aventure, lui permettant de se concentrer sur une nouvelle saison. Mais au-delà des aspects financiers, ce succès a renforcé sa confiance. « Tu te dis que tu n’as pas fait tout ça pour rien », explique-t-il. Une phrase qui résonne comme un mantra pour tous les compétiteurs qui consacrent leur vie à un rêve.
Les clés de la victoire de Dolan en 2024
- Préparation rigoureuse : Travail intensif sur les réglages du bateau.
- Maîtrise mentale : Gestion du stress et détachement des résultats.
- Expérience : Sept ans de leçons tirées des succès et échecs.
Un Parcours Océanique aux Multiples Défis
La Solitaire du Figaro, souvent qualifiée de « championnat du monde de la course en solitaire », est une épreuve d’endurance et de stratégie. Cette année, le parcours s’annonce particulièrement intense, avec trois étapes couvrant 1 850 milles nautiques (environ 3 426 km). Voici le détail des étapes :
| Étape | Trajet | Distance |
|---|---|---|
| 1 | Le Havre – Roscoff | 673 milles (1 246 km) |
| 2 | Roscoff – Vigo (Espagne) | 565 milles (1 046 km) |
| 3 | Vigo – Saint-Vaast-la-Hougue | 612 milles (1 133 km) |
Ce tracé, qualifié d’océanique, mettra à rude épreuve les 35 solitaires engagés, dont 13 novices et 8 femmes. Les conditions météo, souvent imprévisibles, ajoutent une couche de complexité. « Ça risque de bastonner dès le départ », prévient Dolan, conscient que la Manche et la mer Celtique ne pardonnent aucune erreur. Cette année, la première étape a été modifiée pour éviter le Fastnet en raison de conditions météo défavorables, une décision qui illustre la difficulté de naviguer dans ces eaux.
La Préparation : Une Quête de Perfection
Pour affronter ces défis, Dolan a misé sur une préparation méticuleuse. Cet hiver, il s’est entraîné intensément à Port-la-Forêt, un haut lieu de la voile en France. Accompagné du navigateur Gildas Mahé, il a peaufiné chaque détail de son Figaro Beneteau 3 Kingspan, des voiles aux foils en passant par les réglages. « On a cherché des améliorations un peu partout », explique-t-il. Ce travail acharné vise à optimiser les performances du bateau, mais aussi à renforcer sa confiance en ses choix stratégiques.
Mais au-delà de la technique, c’est le mental qui fait la différence. Dolan insiste sur l’importance de rester solide dans sa tête. « C’est long, intense, et tu n’as pas de coach à côté de toi », dit-il. Pour lui, la clé est de se détacher du résultat final, une philosophie qui lui a permis de surmonter les moments de doute lors des éditions précédentes.
« Le grand truc que j’ai réussi à faire, c’est d’essayer de me détacher du résultat final. »
Tom Dolan
Les Rêves d’Avenir : Vendée Globe et The Ocean Race
Même s’il se concentre sur la Solitaire, Dolan garde un œil sur l’avenir. Le Vendée Globe, cette course mythique autour du monde en solitaire, reste un rêve. Cependant, les obstacles financiers sont de taille. « On a essayé de trouver de l’argent, mais c’est compliqué », confie-t-il. Les incertitudes économiques, amplifiées par des événements mondiaux récents, ont freiné ses ambitions. Pourtant, il n’abandonne pas. « Je ne tire pas un trait sur l’idée de le faire un jour », affirme-t-il.
En parallèle, Dolan regarde vers The Ocean Race, prévue pour 2027. Son expérience sur l’Imoca Charal de Jérémie Beyou, où il a participé à des courses comme la Course des Caps et la Fastnet, lui a ouvert de nouvelles perspectives. « J’ai appris beaucoup de choses », dit-il, soulignant l’importance de diversifier ses expériences pour progresser. Cette polyvalence pourrait être un atout majeur dans ses futurs projets.
Pourquoi les ambitions de Dolan vont au-delà de la Solitaire :
- Passion pour les Imoca, les monocoques du Vendée Globe.
- Expérience variée dans des courses prestigieuses.
- Objectif de participer à The Ocean Race en 2027.
La Concurrence : Un Plateau de Haut Niveau
Face à Dolan, la concurrence s’annonce rude. Parmi les 35 skippers, des noms comme Alexis Loison, avec 19 participations, se démarquent. « J’ai beaucoup de respect pour lui, sa façon de naviguer, ses trajectoires », confie Dolan. Loison, comme Dolan, incarne une passion pure pour la course, loin des projecteurs et de la quête de célébrité. D’autres talents, comme Hugo Dhallenne, Charlotte Yven ou Jules Delpech, promettent également de donner du fil à retordre.
Ce qui rend cette édition unique, c’est aussi sa diversité. Avec 13 novices, 8 femmes et 5 étrangers, le plateau reflète l’évolution de la voile moderne. Chaque skipper apporte sa propre approche, rendant la course imprévisible. Pour Dolan, la clé sera de rester concentré sur sa propre stratégie, tout en surveillant les trajectoires des autres.
Le Mental : La Clé de la Réussite en Solitaire
Dans une course comme la Solitaire, où les skippers passent des jours seuls en mer, le mental est aussi important que la technique. Dolan le sait mieux que quiconque. « Les départs ont longtemps été mon point faible », admet-il. Grâce à un travail acharné, il a transformé cette faiblesse en force. Mais c’est surtout sa capacité à gérer la solitude et l’incertitude qui le distingue.
Naviguer en solitaire, c’est faire face à des décisions cruciales sans personne pour les valider. « Tu n’as pas de coach pour te dire quoi faire », explique Dolan. Cette autonomie exige une résilience hors norme. Pour y parvenir, il s’appuie sur une philosophie simple : se concentrer sur le moment présent, sans se laisser submerger par l’enjeu du classement final.
« Le grand problème, c’est le mental. C’est long, intense, et il faut être solide dans sa tête. »
Tom Dolan
Un Parcours qui Teste les Limites
Le parcours de cette 56e édition est conçu pour pousser les skippers dans leurs retranchements. La première étape, du Havre à Roscoff, s’annonce musclée avec des vents forts et des courants imprévisibles en Manche. La deuxième étape, vers Vigo en Espagne, emmènera les concurrents dans des eaux plus chaudes mais tout aussi exigeantes. Enfin, le retour vers Saint-Vaast-la-Hougue clôturera l’épreuve par un défi tactique, où chaque décision comptera.
Pour Dolan, ce tracé océanique est une aubaine. « J’aime bien car il est très océanique, avec beaucoup de large », dit-il. Cette configuration favorise les navigateurs audacieux, capables de lire les conditions météo et d’anticiper les changements. Mais elle demande aussi une endurance physique et mentale à toute épreuve, car les longues traversées laissent peu de place au repos.
Pourquoi le parcours 2025 est unique :
- Un tracé de 1 850 milles, parmi les plus longs de l’histoire récente.
- Des étapes océaniques favorisant les stratégies audacieuses.
- Des conditions météo changeantes, exigeant une adaptabilité constante.
L’Héritage de Dolan et l’Avenir de la Voile
Tom Dolan n’est pas seulement un compétiteur ; il est aussi un symbole d’une nouvelle génération de marins. Son parcours, marqué par l’humilité et la persévérance, inspire les jeunes skippers. En remportant la Solitaire, il a prouvé qu’un outsider peut rivaliser avec les meilleurs, à condition de travailler sans relâche. Mais il reste lucide : la voile est un sport où rien n’est jamais acquis.
Alors que la 56e édition s’élance, tous les yeux seront tournés vers lui. Parviendra-t-il à défendre son titre face à une concurrence affûtée ? Ou un nouveau talent émergera-t-il pour bousculer la hiérarchie ? Une chose est sûre : avec sa préparation rigoureuse, son mental d’acier et son amour pour la mer, Tom Dolan est prêt à écrire un nouveau chapitre de son histoire.
La Solitaire du Figaro 2025 promet des moments d’intensité et d’émotion. Entre les vagues déchaînées et les nuits sans sommeil, c’est une aventure humaine hors du commun qui s’annonce. Et au cœur de cette aventure, Tom Dolan navigue, fidèle à son mantra : avancer avec humilité, mais viser les étoiles.
