Imaginez un pays où la passion pour le football se heurte à une réalité brutale : des manifestations réprimées dans le sang, une population asphyxiée par la pauvreté et des appels désespérés à l’éthique. En Angola, cette tension est palpable. Quatre organisations non gouvernementales, dont une liée à l’Église catholique, ont récemment lancé un cri du cœur à une icône mondiale, Lionel Messi, et à l’équipe d’Argentine, champions du monde. Leur demande ? Annuler un match prévu à Luanda en novembre 2025 pour célébrer les 50 ans d’indépendance de ce pays d’Afrique australe. Pourquoi ce geste symbolique ? Plongeons dans cette affaire où sport, politique et droits humains s’entremêlent.
Un Match Controversé au Cœur de la Crise
Le 30 avril dernier, le président de la Fédération angolaise de football s’est rendu à Buenos Aires pour sceller un accord : un match amical entre l’Angola et l’Argentine, prévu pour novembre 2025. Ce rendez-vous sportif devait marquer un moment de fierté nationale, célébrant le cinquantenaire de l’indépendance du pays vis-à-vis du Portugal. Pourtant, cette annonce, loin de susciter l’enthousiasme, a provoqué une vague d’indignation parmi certaines ONG locales. Pourquoi ? Parce que ce projet intervient dans un contexte de crise sociale aiguë, marquée par une répression violente et des conditions de vie précaires pour des millions d’Angolais.
Une Répression Meurtrière
Fin juillet, l’Angola a été secoué par des manifestations d’une rare intensité. Une grève des chauffeurs de taxi, déclenchée par une hausse brutale des prix du carburant, a dégénéré en émeutes, notamment dans la capitale, Luanda. Selon les chiffres officiels, ces affrontements ont causé la mort de 30 personnes, dont un policier, et blessé plus de 270 autres. Environ 1 500 individus ont été arrêtés. Des ONG, menées par la Commission Justice et Paix de la conférence épiscopale catholique, dénoncent des exécutions sommaires par les forces de l’ordre, pointant du doigt une répression systématique des voix dissidentes.
Cette grave crise sociale survient dans un contexte politique marqué par une répression systématique des citoyens exprimant des opinions critiques.
Collectif d’ONG angolaises
Cette violence n’est pas un incident isolé. Elle s’inscrit dans un climat où la contestation est étouffée, où les critiques du gouvernement, au pouvoir depuis 1975 sous la bannière du MPLA (Mouvement populaire de libération de l’Angola), sont sévèrement réprimées. Les ONG estiment que programmer un événement festif comme un match de football dans un tel contexte est non seulement malvenu, mais profondément insultant.
Un Appel à l’Éthique Sportive
Dans une lettre ouverte adressée à Lionel Messi, surnommé La Pulga, et à la Fédération argentine de football, les ONG angolaises appellent à un geste fort : l’annulation du match. Leur argument est clair : investir des millions de dollars dans un événement sportif, alors que le pays traverse une crise humanitaire, est une atteinte à la dignité humaine. Elles exhortent Messi, figure mondiale du sport et symbole d’inspiration, à poser un acte courageux, éthique et humanitaire.
« Investir des millions de dollars dans un événement sportif quand des milliers de personnes souffrent de la faim, quand les hôpitaux s’effondrent et quand la répression s’accroît n’est pas une priorité légitime. »
Ce message résonne comme un défi lancé à l’icône argentine. Messi, qui a souvent utilisé sa notoriété pour des causes humanitaires, se retrouve face à une décision délicate : répondre à l’appel des ONG ou maintenir l’engagement sportif. La Fédération argentine, de son côté, n’a pas encore confirmé officiellement la tenue de ce match, ce qui laisse planer un doute sur l’issue de cette affaire.
Une Crise Sociale Profonde
Pour comprendre l’ampleur de cette controverse, il faut plonger dans le contexte socio-économique de l’Angola. Malgré sa richesse pétrolière, le pays fait face à des défis colossaux. Selon la Banque mondiale, environ un tiers des 36 millions d’Angolais vivent sous le seuil de pauvreté. L’inflation, estimée à 20 % par le Fonds monétaire international, ronge le pouvoir d’achat, tandis que le chômage touche près de 30 % de la population active, selon l’Institut national de statistiques.
| Indicateur | Chiffre |
|---|---|
| Population sous le seuil de pauvreté | 33 % |
| Taux d’inflation | ~20 % |
| Taux de chômage | ~30 % |
Ces chiffres traduisent une réalité quotidienne où la hausse des prix, notamment du carburant, exacerbe les tensions sociales. Les manifestations de juillet ne sont que la pointe de l’iceberg, révélant un mécontentement profond face à un système où les richesses pétrolières profitent à une élite, tandis que la majorité lutte pour survivre.
Le Football, un Symbole Ambivalent
Le football, souvent perçu comme un vecteur d’unité et de célébration, devient ici un symbole ambivalent. D’un côté, il incarne l’espoir d’un peuple de briller sur la scène internationale aux côtés de stars comme Messi. De l’autre, il est vu comme une distraction coûteuse, détournant l’attention des véritables priorités : la lutte contre la faim, l’amélioration des infrastructures médicales et la protection des droits citoyens.
Les ONG insistent sur ce paradoxe. Organiser un match d’envergure dans un pays où les hôpitaux manquent de ressources et où les forces de l’ordre répriment violemment les manifestations est perçu comme une tentative de détourner l’attention des problèmes structurels. Ce n’est pas la première fois que le sport est au cœur de controverses politiques, mais ce cas illustre parfaitement la tension entre divertissement et responsabilité éthique.
Le Rôle de Lionel Messi
Lionel Messi, avec ses huit Ballons d’Or, n’est pas seulement un joueur de football ; il est une figure mondiale, un modèle pour des millions de personnes. Les ONG angolaises le savent et misent sur son influence pour attirer l’attention sur leur cause. En s’adressant directement à lui, elles placent l’Argentin dans une position où son choix pourrait avoir un impact bien au-delà du terrain.
Si Messi et l’Argentine décidaient d’annuler le match, ce serait un signal fort envoyé au gouvernement angolais et à la communauté internationale. Cela pourrait également inspirer d’autres figures du sport à s’engager dans des causes sociales. À l’inverse, maintenir le match pourrait être perçu comme une indifférence face à la souffrance d’un peuple, ternissant l’image humanitaire de la star.
Un Contexte Politique Tendue
Depuis son indépendance en 1975, l’Angola est gouverné par le MPLA, un parti confronté à une contestation croissante. La hausse des prix, l’inflation galopante et le chômage alimentent un mécontentement populaire qui s’exprime dans la rue, souvent au prix de lourdes répressions. Les ONG dénoncent une répression systématique des voix critiques, où toute forme de dissidence est écrasée.
Dans ce contexte, le match contre l’Argentine apparaît comme une tentative de redorer l’image du gouvernement. Mais pour les ONG, c’est une provocation. Elles appellent à un boycott pour recentrer le débat sur les véritables enjeux : la justice sociale, la fin de la répression et une meilleure redistribution des richesses.
Que Peut Faire le Sport ?
Le sport a-t-il le pouvoir de changer les choses ? Cette question revient souvent dans les débats autour des grands événements internationaux. Si le football peut rassembler, il peut aussi diviser lorsqu’il est perçu comme un outil de propagande. Les ONG angolaises espèrent que Messi et son équipe choisiront de faire entendre leur voix en faveur des droits humains.
- Annuler le match : un geste symbolique pour dénoncer la répression.
- Maintenir le match : un risque de cautionner un régime critiqué.
- Utiliser la visibilité du match pour sensibiliser à la crise.
Quelle que soit la décision, elle aura des répercussions. Un boycott pourrait amplifier la pression sur le gouvernement angolais, tandis qu’un match maintenu pourrait apaiser les tensions à court terme, mais au prix d’une polémique durable.
Vers un Choix Historique ?
À l’heure où ces lignes sont écrites, ni Lionel Messi ni la Fédération argentine n’ont répondu publiquement à l’appel des ONG. Cette affaire soulève des questions essentielles sur le rôle du sport dans les crises sociales et politiques. Le football, souvent qualifié de religion universelle, peut-il devenir un levier pour le changement ? Ou restera-t-il un simple spectacle, ignorant les drames humains qui se jouent en coulisses ?
Pour l’Angola, ce match est bien plus qu’une rencontre sportive. C’est un symbole, un miroir tendu à une nation en crise. La décision de Messi, si elle vient, pourrait marquer un tournant, non seulement pour l’Angola, mais aussi pour la manière dont les stars du sport s’engagent face aux injustices. Une chose est sûre : le monde regarde, et l’histoire retiendra ce choix.
