Le feuilleton judiciaire entre Les Républicains et leur président Éric Ciotti vient de connaître un nouveau rebondissement. Ce jeudi, le tribunal de Paris a en effet rejeté la troisième tentative du parti de droite d’exclure son dirigeant, suite à la conclusion d’une alliance électorale avec le Rassemblement National en vue des élections législatives anticipées.
La justice juge la demande des Républicains irrecevable
Saisi en urgence, le tribunal judiciaire de Paris devait statuer sur une requête signée par 703 membres du conseil national de LR. Ceux-ci exigeaient la nomination d’un mandataire ad hoc pour prendre les rênes du parti si Éric Ciotti ne convoquait pas un nouveau bureau politique avant mercredi soir.
Mais les juges ont estimé cette demande irrecevable, relevant de nombreuses irrégularités :
- Des courriers non signés parmi les 703 signataires
- Aucune vérification du versement des cotisations par les membres
La direction des Républicains a pris “acte” de cette décision, y voyant un simple “refus de s’immiscer dans l’urgence dans des questions politiques”. Tout en assurant que cela ne tranchait “rien sur le fond” :
Le refus de M. Ciotti de reconnaître l’évidence que sa place n’est plus chez les Républicains, et sa stratégie d’obstruction judiciaire ne nous empêchera pas de poursuivre notre campagne.
Communiqué LR
Éric Ciotti “pieds et poings liés” à la tête de LR
L’annonce surprise d’une alliance entre la droite traditionnelle et l’extrême-droite, deux jours après la dissolution de l’Assemblée nationale, avait provoqué un séisme politique. Seul un député LR sur 61 a suivi Éric Ciotti dans cette initiative.
Malgré deux bureaux politiques convoqués pour l’exclure, le patron de LR reste, selon un cadre du parti, “pieds et poings liés” à son poste. La justice avait en effet suspendu ces décisions mi-juin, dans l’attente d’un jugement sur le fond.
Les candidats de l’alliance LR-RN se présenteront finalement sous l’étiquette du micro-parti d’Éric Ciotti “À droite”. Mais Les Républicains, bien décidés à tourner définitivement la page, martèlent que leur ex-président n’a désormais plus sa place dans leurs rangs.
À moins de deux semaines du premier tour des législatives anticipées, ce psychodrame politique et cette guerre des chefs à droite illustrent la profonde crise d’identité et de leadership qui mine le parti gaulliste. Entre tentation du rapprochement avec le RN et volonté de rester fidèle à une ligne plus modérée, Les Républicains jouent plus que jamais leur survie dans les urnes.
La droite traditionnelle en plein questionnement stratégique
Depuis plusieurs années, la famille politique qui a dominé la vie politique française pendant des décennies peine à retrouver un projet clair et rassembleur. Concurrencée sur sa droite par le RN et sur sa gauche par LREM, LR a connu des échecs cuisants aux dernières présidentielles et législatives.
Symbolisant les fractures internes, l’épisode Ciotti pose crûment la question de la ligne stratégique à adopter pour Les Républicains : assumer un tournant droitier au risque de perdre son aile modérée, ou préserver une forme de centrisme quitte à voir son électorat le plus conservateur séduit par le RN ?
Après l’alliance avec Ciotti, qui ne défend ni ne pratique les valeurs de la droite républicaine, la seule clarté possible pour LR est de se reconstruire sur le terrain des idées, autour de nos militants. Il faudra du temps.
Un député LR
Sanctionnés dans les urnes pour leurs divisions, de plus en plus de cadres et d’élus locaux LR appellent désormais à un grand aggiornamento idéologique et générationnel. Dans la perspective des législatives, leur défi est double : refonder un corpus doctrinal distinctif et faire émerger de nouveaux leaders crédibles face à la montée des extrêmes.
Quelle que soit l’issue de ce scrutin anticipé décisif, la recomposition de la droite traditionnelle s’annonce longue et douloureuse. Pour Les Républicains, l’épineuse “question Ciotti” n’est que le symptôme d’un malaise démocratique beaucoup plus profond. Celui d’une droite en perte de repères, écartelée entre ses démons et les aspirations d’une société française en quête de nouveaux projets.