Ce samedi, les Taïwanais se rendent aux urnes pour un scrutin hors du commun. Des référendums révocatoires visent à destituer une vingtaine de députés de l’opposition, dans un contexte où la politique taïwanaise est plus tendue que jamais. Ces votes, perçus comme une bataille pour le contrôle du Parlement, pourraient redessiner l’équilibre des forces dans l’archipel et influencer ses relations avec la Chine. Mais que se passe-t-il vraiment derrière cette mobilisation électorale ?
Un Scrutin à Haut Risque pour Taïwan
Le 26 juillet 2025, les bureaux de vote taïwanais ont ouvert leurs portes à 8h00 pour accueillir des électeurs déterminés à trancher le sort de 24 parlementaires, principalement issus du Kuomintang (KMT), le principal parti d’opposition. Ce processus, qui se prolongera le 23 août pour sept autres élus, est tout sauf anodin. Il pourrait permettre au Parti démocrate progressiste (DPP), dirigé par le président Lai Ching-te, de renforcer son emprise sur le Parlement, aujourd’hui dominé par une coalition entre le KMT et le Parti populaire taïwanais (TPP).
Ce scrutin s’inscrit dans un climat de tensions politiques intenses. Les organisations proches du DPP, à l’origine de ces référendums, accusent les élus visés de compromettre la sécurité de l’île en raison de leurs positions jugées trop conciliantes envers Pékin. La Chine, qui revendique Taïwan comme partie intégrante de son territoire, représente une ombre constante sur ce vote.
Pourquoi Ces Référendums ?
Les référendums révocatoires ne sont pas une pratique courante à Taïwan, mais ils reflètent les fractures profondes de la société taïwanaise. Le DPP, au pouvoir depuis l’élection de Lai Ching-te en 2024, reproche au KMT de freiner son agenda politique. Depuis que le KMT et le TPP ont pris le contrôle du Parlement, ils ont multiplié les obstacles, notamment en imposant des coupes budgétaires qui limitent les ambitions du gouvernement.
Le KMT accuse le DPP de vouloir s’emparer du Parlement par des moyens détournés, qualifiant ces référendums de « manœuvre politique coûteuse ».
Pour le DPP, la révocation d’au moins 12 députés du KMT est cruciale. Selon les analystes, ce scénario a environ 60 % de chances de se réaliser, ce qui ouvrirait la voie à des élections partielles. Ces dernières pourraient permettre au DPP de renverser la majorité parlementaire et de consolider son pouvoir.
Une Mobilisation Électorale Intense
À Taipei, la capitale, l’ambiance est électrique. Les écoles et les temples, transformés en bureaux de vote, accueillent un flux constant d’électeurs. Certains, comme un homme âgé arrivé en ambulance depuis un hôpital, témoignent de l’importance accordée à ce scrutin. Cette mobilisation illustre l’enjeu : pour beaucoup, il s’agit de défendre l’avenir démocratique de Taïwan face aux pressions extérieures.
Pourtant, les avis divergent. Une électrice de 71 ans, s’identifiant comme Mme Tseng, exprime son scepticisme :
Ces référendums sont coûteux. Le gouvernement devrait se concentrer sur l’économie et la protection sociale, pas sur des jeux politiques.
Son témoignage reflète une partie de l’opinion publique, qui craint que ces scrutins ne détournent l’attention des priorités nationales, comme le renforcement de l’économie dans un contexte régional instable.
Les Enjeux Géopolitiques
Au-delà de la politique interne, ces référendums ont une portée géopolitique majeure. La Chine, qui n’exclut pas d’utiliser la force pour reprendre Taïwan, observe attentivement. Le KMT, historiquement favorable à un rapprochement avec Pékin, est accusé par ses détracteurs de fragiliser la souveraineté de l’île. Le DPP, en revanche, adopte une ligne plus ferme, défendant l’indépendance de facto de Taïwan.
Clés pour comprendre le conflit :
- DPP : Parti au pouvoir, pro-indépendance, cherche à limiter l’influence chinoise.
- KMT : Opposition, prône des relations apaisées avec Pékin.
- TPP : Allié du KMT, soutient la coalition majoritaire au Parlement.
- Référendums : Vise à destituer des élus pour modifier l’équilibre politique.
Ce scrutin pourrait donc redéfinir les relations entre Taïwan et la Chine. Une victoire du DPP renforcerait la position de Lai Ching-te face à Pékin, mais risquerait d’attiser les tensions dans le détroit de Taïwan.
Les Défis d’un Parlement Divisé
Le Parlement taïwanais est un champ de bataille politique. Depuis 2024, la coalition KMT-TPP a bloqué plusieurs initiatives du DPP, notamment sur des questions de défense et de budget. Ces référendums révocatoires sont perçus comme une tentative audacieuse de briser cet immobilisme.
Si le DPP parvient à révoquer suffisamment d’élus, il devra encore remporter les élections partielles pour obtenir la majorité. Un défi de taille, mais pas insurmontable, selon les observateurs. Les résultats, attendus dans la soirée du 26 juillet, seront un indicateur clé.
Que Peut-on Attendre des Résultats ?
Les résultats de ces référendums pourraient avoir des répercussions durables. Voici les scénarios possibles :
- Scénario 1 : Le DPP réussit à révoquer au moins 12 élus, ouvrant la voie à des élections partielles et à une possible majorité.
- Scénario 2 : Les référendums échouent, renforçant la position du KMT et du TPP au Parlement.
- Scénario 3 : Un résultat mitigé, avec quelques révocations, mais pas assez pour bouleverser l’équilibre actuel.
Quel que soit le résultat, ce scrutin marquera un tournant. Une victoire du DPP pourrait galvaniser ses partisans, mais aussi provoquer des tensions internes et externes. À l’inverse, un échec pourrait fragiliser le président Lai et compliquer son mandat.
Le Rôle des Citoyens dans ce Moment Décisif
Ce qui rend ce scrutin unique, c’est l’engagement des citoyens. Malgré les critiques sur le coût des référendums, la participation reste forte. Les électeurs, conscients des enjeux, se mobilisent pour exprimer leur vision de l’avenir de Taïwan.
Dans les rues de Taipei, les discussions vont bon train. Certains soutiennent le DPP, voyant dans ces référendums une chance de protéger l’île contre les ingérences chinoises. D’autres, comme Mme Tseng, appellent à plus de pragmatisme et à une meilleure gestion des ressources publiques.
Vers un Avenir Incertain
Alors que les bureaux de vote ferment et que les résultats approchent, Taïwan retient son souffle. Ces référendums ne sont pas seulement une question de politique interne : ils touchent à l’identité même de l’île, à sa place dans le monde et à sa capacité à naviguer dans un environnement géopolitique complexe.
Le président Lai Ching-te, élu sur une plateforme de résistance face à la Chine, joue gros. Une victoire renforcerait son leadership, mais un échec pourrait limiter sa marge de manœuvre pour les années à venir. Dans tous les cas, ce scrutin restera un moment clé dans l’histoire politique taïwanaise.
Et vous, que pensez-vous de ces référendums ? Taïwan doit-il renforcer son autonomie ou chercher un compromis avec Pékin ? Partagez votre avis !