Les rues pavées d’Amiens bruissent d’une effervescence inhabituelle en cette soirée de juin. François Ruffin, député sortant de la Somme et figure emblématique de la France Insoumise, vient de lancer sa campagne locale pour les élections législatives anticipées. Entouré d’une nuée de journalistes avides de déclarations fracassantes, l’électron libre de la gauche radicale affiche une mine grave, conscient des défis qui l’attendent.
Car si Ruffin part favori dans cette circonscription qui l’a propulsé à l’Assemblée nationale en 2017, il sait que la menace du Rassemblement national plane comme une épée de Damoclès au-dessus de sa tête. Face à la candidate mariniste, il se voit tel “la tortue sagace” chère à Jean-Luc Mélenchon, prête à livrer une bataille de longue haleine.
Rassembler la “France des tours et des bourgs”
Mais au-delà des joutes électorales, c’est un véritable projet de société que porte François Ruffin. Celui de réconcilier ce qu’il nomme la “France des tours” et la “France des bourgs”, ces deux visages d’un pays fracturé entre métropoles mondialisées et territoires délaissés. Une gageure dans une Picardie qui a vu déferler la vague bleue marine lors de la présidentielle.
Il nous faut recoudre le tissu social, retisser les liens entre les citoyens. C’est le sens de mon engagement.
François Ruffin
Un “députour” sous les clochers picards
Pour y parvenir, le chantre des “gilets jaunes” mise sur la proximité. Son “députour”, comme il le surnomme, le mènera dans les jours à venir au cœur des bourgs oubliés, là où le sentiment d’abandon nourrit les rancœurs et la défiance envers les élites. Un terrain qu’il connaît bien, lui qui n’a cessé d’arpenter sa circonscription depuis son élection.
Mais si François Ruffin se montre intarissable sur les doléances des habitants, il reste plus que fuyant sur ses ambitions nationales. Les spéculations vont pourtant bon train sur son potentiel leadership à gauche, dans un paysage politique chamboulé par la dissolution surprise de l’Assemblée. Un défi de taille pour celui qui cultive sa singularité au sein même de la galaxie insoumise.
Conjuguer ancrage local et envergure nationale
Interrogé sur ses velléités élyséennes, Ruffin esquive habilement, préférant recentrer le débat sur les enjeux de sa campagne picarde. Une prudence tactique pour ce stratège rompu aux jeux d’appareil, qui sait que son avenir politique se jouera autant dans l’hémicycle que sur le terrain. Car c’est bien là le pari audacieux de François Ruffin : conjuguer ancrage local et envergure nationale, sans jamais sacrifier l’un à l’autre.
Ma boussole, ce sont les gens, leurs problèmes quotidiens, leurs espoirs. C’est ce qui guidera mon action de député, comme mes combats politiques au niveau national.
François Ruffin
Alors que la campagne s’annonce intense et indécise, une certitude demeure : le trublion amiénois n’a pas fini de bousculer le jeu politique français. Avec sa gouaille et sa pugnacité, François Ruffin entend bien porter haut les couleurs de cette gauche populaire qu’il appelle de ses vœux. Une ambition à la mesure des défis immenses qui attendent le pays, dans un monde de plus en plus incertain.
