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Côte d’Ivoire : La Justice sous Pression avant la Présidentielle

En Côte d'Ivoire, les arrestations d'opposants se multiplient avant la présidentielle. La justice est-elle au service du pouvoir ? Découvrez les tensions qui menacent la démocratie...

À quelques mois de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire, prévue pour octobre 2025, une ombre plane sur la démocratie du pays. Les arrestations d’opposants politiques se multiplient, ravivant les critiques contre un système judiciaire perçu comme un outil au service du pouvoir. Cette situation, loin d’être nouvelle, interroge sur l’indépendance de la justice et les risques d’une nouvelle crise électorale dans un pays marqué par un passé de violences politiques. Plongeons dans cette réalité complexe où la politique et la justice s’entremêlent dangereusement.

Une Vague d’Arrestations qui Inquiète

Depuis le début de l’année, les interpellations de figures de l’opposition se succèdent à un rythme alarmant. Des cadres du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) et du Parti des Peuples Africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI) sont particulièrement visés. Parmi eux, des responsables de la jeunesse du PDCI, arrêtés pour des motifs comme « troubles à l’ordre public ». Un militant du PPA-CI, condamné pour « diffusion de fausses nouvelles », purge une peine de 18 mois de prison. Ces arrestations, souvent accompagnées de procédures expéditives, soulèvent des questions sur l’impartialité des juges.

Un cas emblématique est celui d’un ancien ministre, incarcéré après avoir critiqué des décisions judiciaires excluant des opposants de la course à la présidentielle. Après trois semaines de détention, il a obtenu une liberté provisoire, mais seulement après des excuses publiques. Cette affaire illustre une tendance : critiquer la justice peut coûter cher, surtout à l’approche d’un scrutin crucial.

« Les opposants sont enlevés à leur domicile par des hommes armés, sans explication, plutôt que d’être simplement convoqués. »

Pulchérie Gbalet, représentante de la société civile

Un Système Judiciaire sous Influence ?

Les accusations de partialité contre la justice ivoirienne ne datent pas d’aujourd’hui. Des observateurs, comme le politologue Geoffroy Kouao, décrivent ces arrestations comme une « constante malheureuse » dans l’histoire politique du pays. Même le président actuel, Alassane Ouattara, avait été victime de persécutions judiciaires lorsqu’il était dans l’opposition. Ironiquement, les réformes pour renforcer l’indépendance de la justice n’ont jamais vu le jour sous son mandat.

Une loi de 2019, qui sanctionne toute critique portant « atteinte à l’autorité de la justice », est souvent invoquée pour justifier les interpellations. Cette législation, dénoncée par des organisations comme Amnesty International, donne aux autorités un levier pour museler les voix dissidentes. Les juges, accusés d’être « inféodés au pouvoir », semblent agir en fonction des intérêts du parti au pouvoir, le RHDP.

« Le pouvoir judiciaire s’est pleinement mobilisé pour soutenir le troisième mandat du président Ouattara et continue de soutenir sa politique. »

– Rapport 2024 d’une ONG internationale

Une Élection sous Haute Tension

L’élection présidentielle d’octobre 2025 est au cœur des préoccupations. Avec Alassane Ouattara, âgé de 83 ans et au pouvoir depuis 2011, qui maintient le suspense sur sa candidature, les tensions politiques s’amplifient. Les exclusions de figures majeures de l’opposition, comme l’ancien président Laurent Gbagbo, attisent les critiques. Ces décisions judiciaires, perçues comme politiquement motivées, alimentent un climat de méfiance.

Le PDCI dénonce des « enlèvements » de ses membres par des « individus non identifiés », tandis que des avocats, comme Maître Emile Suy Bi Gohoré, pointent un lien évident entre ces arrestations et le scrutin à venir. Pourtant, le parti au pouvoir nie toute ingérence, affirmant que la justice agit de manière indépendante.

Un Passé de Crises Électorales

L’histoire politique ivoirienne est marquée par des crises violentes, souvent liées aux élections. Les souvenirs des affrontements post-électoraux de 2010-2011, qui ont fait des milliers de morts, restent vifs. Aujourd’hui, des observateurs craignent que les conditions d’une nouvelle crise soient réunies. Les arrestations, les exclusions et l’absence de dialogue politique créent un cocktail explosif.

Pour Pulchérie Gbalet, figure de la société civile, la lutte continue malgré les risques. Arrêtée à deux reprises par le passé, elle reste déterminée à dénoncer les violations des droits humains. Son témoignage reflète une résilience face à un système qui semble vouloir étouffer toute critique.

  • Arrestations ciblées : Des opposants incarcérés pour des motifs vagues comme « troubles à l’ordre public ».
  • Loi controversée : La législation de 2019 limite la liberté d’expression en pénalisant les critiques de la justice.
  • Climat de peur : Les opposants hésitent à s’exprimer, craignant des représailles judiciaires.

Vers une Réforme Impossible ?

La question de l’indépendance judiciaire est centrale. Sans réforme, la justice risque de rester un outil politique, au détriment de la démocratie. Pourtant, les gouvernements successifs, y compris celui d’Alassane Ouattara, n’ont pas réussi à briser ce cycle. Les observateurs s’accordent à dire que sans une volonté politique forte, la situation ne changera pas.

Les organisations internationales, comme Amnesty International, appellent à une révision des lois qui restreignent la liberté d’expression. Elles insistent également sur la nécessité d’un dialogue politique inclusif pour apaiser les tensions avant le scrutin. Mais pour l’instant, le pouvoir reste silencieux face à ces demandes.

Les Défis d’une Démocratie Fragile

La Côte d’Ivoire se trouve à un carrefour. Alors que le pays aspire à consolider sa démocratie, les pratiques actuelles rappellent des périodes plus sombres. Les arrestations d’opposants, l’utilisation de la justice comme arme politique et l’absence de réformes structurelles menacent la stabilité. Les citoyens, eux, oscillent entre espoir et crainte d’une nouvelle crise.

Pour Augustin Yohou Dia Houphouët, vice-président du PDCI, ces interpellations ne visent qu’à étouffer les aspirations démocratiques. « Ce sont des arrestations injustifiées contre des personnes qui demandent juste qu’il y ait une démocratie dans le pays », déclare-t-il. Son appel résonne comme un cri d’alarme dans un contexte où la liberté d’expression semble de plus en plus menacée.

Événement Conséquence
Arrestations d’opposants Climat de peur et méfiance envers la justice
Loi de 2019 Restriction de la liberté d’expression
Exclusions électorales Tensions politiques accrues

Que Faire pour Éviter la Crise ?

Face à ce climat tendu, plusieurs pistes émergent pour éviter une nouvelle crise électorale. D’abord, un dialogue inclusif entre le pouvoir et l’opposition pourrait désamorcer les tensions. Ensuite, une réforme du système judiciaire, garantissant son indépendance, est essentielle pour restaurer la confiance des citoyens. Enfin, la communauté internationale pourrait jouer un rôle de médiateur pour encourager des élections transparentes et équitables.

Mais ces solutions nécessitent une volonté politique qui, pour l’instant, semble absente. Le silence du ministère de la Justice face aux accusations d’ingérence renforce le sentiment d’impunité. Pendant ce temps, la société civile et les opposants continuent de se mobiliser, malgré les risques.

En conclusion, la Côte d’Ivoire se trouve à un tournant décisif. Les mois à venir seront cruciaux pour déterminer si le pays peut éviter une nouvelle crise électorale. La justice, au cœur des tensions, doit devenir un pilier de la démocratie, et non un instrument de répression. La balle est dans le camp des autorités, mais aussi des citoyens, qui aspirent à une démocratie véritablement inclusive.

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