Il y a un an, Keir Starmer entrait à Downing Street, porté par l’espoir d’un renouveau pour le Royaume-Uni. Promettant de relancer l’économie, de stabiliser les finances publiques et de redonner une stature internationale au pays, le leader travailliste suscitait l’enthousiasme. Mais aujourd’hui, son bilan est contrasté : 62 % des Britanniques désapprouvent son action, selon une synthèse de sondages. Entre succès diplomatiques, crises internes et revers parlementaires, que retenir de cette première année ?
Un Premier Ministre sous Pression
Keir Starmer avait promis un vent de changement, mais les défis se sont accumulés. Son parti, les travaillistes, a remporté une victoire éclatante en juillet 2024, mettant fin à des années de domination conservatrice. Pourtant, l’euphorie s’est vite dissipée. Des tensions internes, des critiques sur sa gestion économique et une impopularité croissante ont fragilisé sa position. Comment en est-on arrivé là ?
Une Croissance Économique en Demi-Teinte
La relance économique était au cœur du programme de Starmer. Une croissance de 0,7 % au premier trimestre 2025 a surpris les observateurs, mais les analystes restent prudents. Selon eux, ce sursaut pourrait n’être que temporaire. Le gouvernement a misé sur la dérégulation dans des secteurs comme l’intelligence artificielle et l’urbanisme, tout en lançant un ambitieux plan d’investissement de plusieurs dizaines de milliards de livres pour moderniser les infrastructures et le système de santé.
« Ces investissements sont cruciaux, mais leurs effets ne se feront sentir qu’à long terme », explique Nicholas Barr, professeur d’économie à la London School of Economics.
Ces chantiers, bien que prometteurs, peinent à convaincre. Les Britanniques, confrontés à une inflation persistante et à une reprise économique fragile, attendent des résultats concrets. Les projets d’infrastructure, comme les nouvelles lignes ferroviaires ou les hôpitaux modernisés, nécessitent du temps, et le gouvernement semble coincé dans un paradoxe : investir massivement tout en devant gérer des finances publiques sous tension.
Le Casse-Tête des Finances Publiques
Starmer s’est engagé à assainir les finances du Royaume-Uni, un objectif ambitieux après des années de déficit. Dès l’automne 2024, son gouvernement a pris des mesures radicales : suppression d’une aide aux retraités et augmentation des impôts pour les entreprises. Mais ces décisions ont provoqué un tollé. Face à une fronde au sein de son propre parti, le Premier ministre a dû reculer sur des coupes prévues dans les aides aux personnes handicapées et aux malades.
Les chiffres clés des finances publiques :
- Suppression d’une aide aux retraités : automne 2024
- Hausse des impôts pour les entreprises : mesure impopulaire
- Déficit persistant : nouvelles hausses d’impôts probables
Cette reculade a laissé un trou béant dans le budget. Helen Miller, de l’Institut des études budgétaires, avertit : « Des hausses d’impôts semblent inévitables. » Cette perspective est un revers pour Starmer, qui avait juré de ne pas alourdir la pression fiscale. Ce dilemme illustre la difficulté de concilier rigueur budgétaire et promesses électorales.
Succès Commerciaux : un Rayon de Soleil
Sur le front international, Starmer a su tirer parti du Brexit pour redynamiser les relations commerciales du Royaume-Uni. En mai 2025, trois accords majeurs ont été conclus : avec les États-Unis pour réduire les droits de douane, avec l’Union européenne pour resserrer des liens distendus, et avec l’Inde, mettant fin à des années de négociations infructueuses.
« Ces accords modestes créent une dynamique}(-)
Cette stratégie pragmatique, qui privilégie des avancées progressives, est saluée par les experts. David Henig, du Centre européen pour la politique économique internationale, note : « C’est une approche raisonnable, mais l’impact sur la croissance reste limité. » En effet, si ces succès renforcent la crédibilité de Starmer à l’international, ils ne suffisent pas à relancer une économie en difficulté.
Immigration : un Défi Incontrôlable ?
Starmer avait promis de « reprendre le contrôle des frontières », reprenant un slogan cher aux partisans du Brexit. Mais les chiffres racontent une autre histoire : plus de 20 400 migrants ont traversé la Manche au premier semestre 2025, un record. Cette situation alimente les critiques, notamment de Nigel Farage, leader du parti anti-immigration Reform UK, qui gagne du terrain dans les sondages.
Les mesures anti-immigration :
- Coopération avec la France pour intercepter les migrants
- Durcissement des conditions de visas de travail
- Lutte contre les réseaux de passeurs
Le gouvernement insiste sur sa lutte contre les réseaux de passeurs et sur une coopération accrue avec Paris pour intercepter les migrants avant leur départ. Par ailleurs, des mesures pour réduire l’immigration légale, comme le durcissement des visas de travail, commencent à porter leurs fruits, mais les résultats restent modestes. La baisse de l’immigration nette est en grande partie attribuée aux politiques du gouvernement précédent.
Politique Étrangère : une Présence Renforcée
À l’international, Starmer a marqué des points. En juillet 2024, il déclarait que le Royaume-Uni était « de retour » sur la scène mondiale. Un partenariat stratégique avec l’Union européenne, axé sur la défense et le commerce, a vu le jour. Avec la France, Starmer a initié une « coalition des volontaires » pour soutenir un éventuel cessez-le-feu en Ukraine, bien que le projet reste vague.
Sa relation avec le président américain Donald Trump semble également fructueuse, ce qui pourrait renforcer la position du Royaume-Uni. Cependant, ses ambitions de jouer un rôle de pont entre les États-Unis et l’Europe ont été éclipsées par la marginalisation de l’Europe dans le conflit au Moyen-Orient.
Le NHS : une Crise Persistante
Le système de santé public, le NHS, reste une priorité pour les Britanniques, mais il est toujours en crise. Starmer s’est félicité d’avoir libéré 4 millions de rendez-vous supplémentaires, dépassant son objectif de 2 millions. Les listes d’attente pour les traitements hospitaliers ont diminué, atteignant leur plus bas niveau en deux ans. Cependant, 6,23 millions de patients attendent toujours un traitement, un chiffre alarmant.
Secteur Progrès Défis Économie Croissance de 0,7 % au T1 2025 Reprise fragile, effets à long terme Finances Mesures d’assainissement Déficit persistant, hausses d’impôts probables Immigration Baisse de l’immigration nette Record d’arrivées par la Manche Santé 4 millions de rendez-vous 6,23 millions de patients en attente Les efforts pour moderniser le NHS, bien que significatifs, ne répondent pas encore aux attentes. Les Britanniques, confrontés à des délais d’attente interminables, restent frustrés. La crise du système de santé, combinée aux défis économiques et migratoires, alimente un sentiment d’insatisfaction générale.
Un Leadership Fragilisé
Keir Starmer se trouve dans une position délicate. Sa majorité travailliste, bien que solide sur le papier, montre des signes de fracture. Les critiques internes, notamment sur les coupes sociales, ont forcé le Premier ministre à faire des concessions, affaiblissant son autorité. À cela s’ajoute la montée de partis comme Reform UK, qui capitalisent sur le mécontentement populaire.
Pourtant, tout n’est pas sombre. Les succès commerciaux et les avancées en politique étrangère montrent que Starmer peut encore inverser la tendance. Mais pour y parvenir, il devra répondre aux attentes des Britanniques sur des questions clés comme la santé, l’économie et l’immigration. La route vers un second mandat s’annonce semée d’embûches.
Les défis à venir pour Starmer :
- Restaurer la confiance dans le NHS
- Stabiliser les finances publiques sans alourdir les impôts
- Réduire l’immigration illégale
- Consolider les acquis diplomatiques
Le bilan de cette première année est donc mitigé. Si Starmer a su marquer des points sur la scène internationale, les défis internes restent colossaux. Sa capacité à redresser la barre déterminera l’avenir de son leadership et du Royaume-Uni. Une chose est sûre : les mois à venir seront décisifs.