L’Allemagne retient son souffle alors que Björn Höcke, figure de proue du parti d’extrême droite AfD, comparaît une nouvelle fois devant la justice. Son crime ? Avoir scandé un slogan nazi lors d’un meeting politique en décembre dernier. Déjà condamné en mai à une amende de 13 000 euros pour des faits similaires, Höcke clame son innocence. Mais les faits sont têtus.
Un “expert du national-socialisme” qui s’ignore
Lors d’un rassemblement de l’AfD en Thuringe fin 2023, Höcke avait encouragé la foule à scander “Tout pour l’Allemagne”. Une phrase lourde de sens puisqu’il s’agissait autrefois d’une devise des SA, ces chemises brunes qui furent le bras armé d’Hitler. Utiliser un tel slogan est passible de sanctions en Allemagne. Pourtant, à la barre, Höcke prétend ignorer le passé sulfureux de ces mots :
Je ne suis pas un expert du national-socialisme.
Björn Höcke, leader de l’AfD en Thuringe
Une défense qui sonne creux quand on sait que cet ancien professeur d’histoire avait déjà été condamné quelques mois plus tôt pour des faits similaires. Il avait alors affirmé ignorer le lourd passé du slogan, sans convaincre les juges. Aujourd’hui, il persiste et signe, allant jusqu’à qualifier le procès de “farce”.
La banalisation de l’extrémisme
Pour Höcke, les mots incriminés seraient de “simples mots banals utilisés par hasard il y a des années par une organisation criminelle”. Une manière de minimiser la gravité de ses actes qui en dit long sur le glissement de l’AfD vers toujours plus de radicalité. Surveillé de près par les services de renseignement, Höcke n’hésite pas à tenir des propos choquants :
- En 2017, il avait qualifié le Mémorial de la Shoah à Berlin de “monument de la honte”.
- Il a aussi réclamé un “virage à 180 degrés” dans la manière dont l’Allemagne commémore son passé.
Une rhétorique extrême qui ne l’empêche pas d’être populaire en Thuringe, où il rêve de devenir le premier dirigeant régional issu de l’extrême droite.
L’AfD progresse, l’Allemagne s’alarme
Le parti fondé en 2013 surfe sur les peurs liées à l’immigration et à l’islam. Malgré les scandales à répétition, l’AfD ne cesse de progresser dans les urnes. Lors des élections européennes de juin, il a décroché un score record de 16%, devançant même le parti social-démocrate du chancelier Scholz.
Une dynamique inquiétante dans un pays hanté par les démons du nazisme. Face à la menace, les autres partis font front commun et excluent toute alliance avec l’extrême droite. Mais pour combien de temps encore ?
Le procès de Höcke sera scruté de près. S’il est condamné, il risque jusqu’à 3 ans de prison en plus d’une lourde amende. Un signal fort de la justice face à la banalisation de l’extrémisme. Mais quel que soit le verdict, une chose est sûre : l’AfD n’a pas fini de bousculer le paysage politique allemand et européen.