C’est un véritable séisme qui secoue actuellement le paysage médiatique féministe français. Deux figures emblématiques de la presse féminine woke sont en proie à de sérieuses difficultés. Le magazine Causette comparaît devant le tribunal de commerce tandis que le site Madmoizelle procède à un licenciement collectif de l’ensemble de ses journalistes. Des événements qui soulèvent de nombreuses interrogations quant à l’avenir de ces médias engagés.
Causette au bord du gouffre financier
Lancé en 2009, Causette s’est imposé comme un magazine féministe de référence avec sa ligne éditoriale décalée et son ton impertinent. Mais derrière son image de marque avant-gardiste, le titre traverse en réalité une passe financière très délicate. Citée à comparaître devant le tribunal de commerce, la société éditrice de Causette doit faire face à d’importants problèmes de trésorerie. Selon nos informations, le chiffre d’affaires et les abonnements seraient en chute libre depuis plusieurs mois.
Pour tenter de redresser la barre, la direction envisagerait un plan de restructuration drastique avec notamment une réduction de la fréquence de parution et une refonte de la maquette. Mais au sein de la rédaction, beaucoup craignent que ces mesures ne suffisent pas à éviter le naufrage. “On navigue à vue depuis trop longtemps, confie une journaliste sous couvert d’anonymat. La crise du Covid nous a mis un coup derrière la tête et on ne s’en est jamais vraiment relevés.” Un constat alarmant qui en dit long sur la fragilité du modèle économique de certains médias féministes.
Madmoizelle contraint de licencier
L’heure est également à l’orage du côté de Madmoizelle. Ce webzine féminin centré sur la pop culture et les sujets de société a annoncé le licenciement de l’intégralité de son équipe de journalistes. Un coup de tonnerre inattendu pour ce pure player qui revendiquait encore récemment 1,5 million de visites mensuelles.
Nous traversons une période économique compliquée qui nous oblige à prendre des décisions douloureuses pour pérenniser l’activité.
– Fabrice Florent, fondateur de Madmoizelle
Si la direction invoque un contexte de marché défavorable, en interne d’autres sources évoquent plutôt des problèmes de management et une perte de cap éditorial. “Le site a voulu surfer sur toutes les vagues militantes et woke ces dernières années, quitte à parfois s’y noyer”, déplore une ex-collaboratrice. Une stratégie qui aurait fini par lasser une partie de la communauté historique de lectrices.
Les raisons d’une crise
Au-delà des cas particuliers de Causette et Madmoizelle, c’est tout un pan de la presse féministe qui semble traverser une zone de turbulences. Avec la baisse des revenus publicitaires et la concurrence accrue des réseaux sociaux, beaucoup de titres éprouvent des difficultés à trouver leur équilibre financier. D’autant que l’engagement militant ne fait pas toujours bon ménage avec les réalités économiques.
- Érosion des revenus publicitaires dans la presse
- Baisse tendancielle des abonnements
- Concurrence des réseaux sociaux et plateformes
- Décalage entre ligne éditoriale woke et attentes du lectorat
Pour s’en sortir, certains médias misent sur le développement de verticales thématiques (parentalité, bien-être, lifestyle…) pour diversifier leur audience et leurs recettes. D’autres explorent des pistes de monétisation innovantes comme les solutions de micropaiement ou les contenus réservés aux abonnés. Mais beaucoup se heurtent aussi aux limites de leur positionnement idéologique, clivant par nature.
L’avenir dira si les médias féministes engagés parviendront à surmonter cette crise existentielle. Une chose est sûre : pour durer, ils devront impérativement réinventer leur modèle et trouver un nouveau souffle sans se renier. Un sacré défi dans un écosystème numérique en perpétuel mouvement où la quête de l’audience à tout prix finit souvent par l’emporter sur la cohérence éditoriale.
En attendant, la douloureuse restructuration de Causette et Madmoizelle envoie un signal alarmant à toute la profession. Et prouve que même les aventures médiatiques les plus enthousiasmantes restent fragiles face aux lois implacables du marché. Le féminisme 2.0 n’échappe pas à la crise de la presse.