Le 5 juin 1981 marque un tournant décisif dans l’histoire de la médecine moderne. Ce jour-là, un rapport publié par le Centre de contrôle des maladies (CDC) des États-Unis mentionne pour la première fois l’existence d’une maladie mystérieuse et mortelle. Personne ne le sait encore, mais il s’agit des premiers cas officiellement recensés de ce qui sera plus tard nommé le Syndrome d’immunodéficience acquise, ou SIDA.
Cinq cas intrigants à Los Angeles
C’est dans son bulletin hebdomadaire Morbidity and Mortality Weekly Report (MMWR) que le CDC décrit ces cinq cas surprenants. Tous des hommes jeunes, homosexuels, et auparavant en bonne santé, qui souffrent d’une forme rare et sévère de pneumonie. Leurs défenses immunitaires semblent étrangement affaiblies, les rendant vulnérables à des infections opportunistes inhabituelles.
Si le terme “SIDA” n’apparaît pas encore, ces observations cliniques constituent néanmoins la première reconnaissance officielle de la maladie. Les médecins et scientifiques, intrigués par ce mystérieux syndrome, entament alors un long et difficile combat pour l’identifier, le comprendre et le traiter.
L’émergence d’une pandémie mondiale
Dans les mois et années qui suivent, des cas similaires sont rapportés dans d’autres villes américaines, puis à travers le monde. Il devient clair qu’on a affaire à une nouvelle maladie transmissible, d’origine inconnue, qui s’attaque au système immunitaire et contre laquelle la médecine est pour l’instant impuissante.
Nous étions face à un problème totalement nouveau, avec de nombreuses inconnues. Il a fallu repartir de zéro pour caractériser cette maladie.
– Dr Anthony Fauci, immunologiste, sur les débuts de l’épidémie
En 1983, des chercheurs français isolent le virus responsable, baptisé VIH (virus de l’immunodéficience humaine). On commence à mieux cerner les modes de transmission, principalement sexuels et sanguins. Mais en l’absence de traitement, le pronostic reste sombre. Pour les malades, c’est généralement l’issue fatale.
Recherche, traitements et prévention
Face à l’urgence, la recherche s’intensifie. De nombreux essais sont menés pour développer des traitements antirétroviraux capables de stopper la multiplication du virus. Les premiers arrivent à la fin des années 1980, avec une efficacité encore limitée. Il faudra attendre 1996 et l’avènement des trithérapies pour enfin disposer d’une arme réellement efficace.
Parallèlement, d’importants efforts de prévention sont déployés pour limiter la propagation du VIH. Campagnes d’information, dépistage, promotion du préservatif… Les pouvoirs publics et associations se mobilisent. Mais les années 1980-1990 restent marquées par une très forte prévalence, ainsi qu’une lourde stigmatisation des malades.
Un combat toujours d’actualité
Aujourd’hui, plus de 40 ans après la découverte des premiers cas, la lutte contre le VIH/SIDA a considérablement progressé. Les personnes séropositives peuvent vivre longtemps avec les traitements actuels. La transmission de la mère à l’enfant a quasiment disparu. Des outils comme la PrEP permettent de réduire les contaminations.
Néanmoins, le SIDA demeure un problème majeur de santé publique au niveau mondial. Selon l’OMS, 38,4 millions de personnes vivaient avec le VIH fin 2021, dont seulement 28,7 millions sous traitement. Cette même année, le sida a encore causé 650 000 décès. Des inégalités criantes persistent dans l’accès aux soins.
La recherche médicale se poursuit pour développer un vaccin, des traitements plus simples, voire un jour un remède. Les efforts de prévention aussi, pour continuer à contrôler l’épidémie. Avec l’espoir qu’un jour, les générations futures regarderont le SIDA comme une maladie du passé, dont l’émergence a été officiellement attestée un certain 5 juin 1981…