Au cœur des affrontements qui déchirent actuellement le Liban, un autre enjeu crucial se joue en coulisses : celui de la sauvegarde du patrimoine culturel exceptionnel de ce pays. Face à l’urgence de la situation, pas moins de 300 professionnels de la culture, archéologues et universitaires en tête, viennent de tirer la sonnette d’alarme. Dans une pétition adressée à l’UNESCO, ils appellent l’institution à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les trésors antiques libanais, et en particulier le site majestueux de Baalbeck, joyau de l’architecture romaine.
Baalbeck et Tyr, des sites millénaires pris entre deux feux
Depuis le 23 septembre dernier, date du début de la guerre ouverte entre Israël et le Hezbollah, les frappes se multiplient dangereusement à proximité des sites antiques classés au patrimoine mondial de l’UNESCO. Le 6 novembre, Baalbeck a ainsi été touchée, un missile s’abattant à quelques mètres seulement des temples romains vieux de plus de 2000 ans. Plus au sud, la cité antique de Tyr est elle aussi menacée par les bombardements.
Une situation intenable pour les 300 signataires de la pétition, qui s’alarment de voir ces “trésors irremplaçables” courir le risque d’être endommagés voire détruits. Tous sont “unis par une même préoccupation, celle de préserver dans son intégralité le patrimoine culturel et archéologique du Liban”, souligne le texte.
Un appel à des “mesures renforcées” et des “sanctions”
Pour tenter d’enrayer la catastrophe qui se profile, les professionnels de la culture demandent à Audrey Azoulay, directrice de l’UNESCO, de “mettre en œuvre tous les moyens” à sa disposition. Cela passe par des “mesures renforcées” pouvant aller “jusqu’aux sanctions” à l’encontre des belligérants qui mettraient en péril ces sites d’exception.
La pétition appelle également “les États disposant de l’influence nécessaire sur les parties belligérantes” à user de “toute leur force diplomatique et militaire” pour obtenir un arrêt immédiat des actions menaçant l’intégrité des lieux. Une urgence absolue alors que la survie même de pans entiers du patrimoine libanais est en jeu.
L’UNESCO mobilisée pour une réunion cruciale
L’appel des 300 professionnels de la culture ne restera pas lettre morte. En effet, il intervient à la veille d’une “session extraordinaire” du Comité pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé, qui doit se tenir ce lundi au siège parisien de l’UNESCO. Une réunion cruciale, initiée à la demande expresse du Liban, et qui pourrait déboucher sur des mesures concrètes pour tenter de sauvegarder ce qui peut encore l’être.
Reste à savoir si les principaux acteurs du conflit, Israël et le Hezbollah, se plieront aux injonctions de la communauté internationale. Les prochains jours s’annoncent déterminants pour l’avenir des merveilles antiques du Liban. Car c’est bien d’un pan essentiel de la mémoire de l’humanité dont il est question, incarnée par des sites comme Baalbeck et ses “vestiges les plus imposants de l’architecture romaine impériale à son apogée”, pour reprendre les mots de l’UNESCO.
Baalbeck, haut-lieu de la culture menacé
Au-delà de sa valeur archéologique inestimable, Baalbeck occupe aussi une place à part dans le paysage culturel libanais contemporain. Depuis 1956, le site accueille en effet chaque été le prestigieux Festival de Baalbeck dans ses ruines antiques. Un événement de renommée internationale qui a vu défiler les plus grands noms de la musique et des arts, de Oum Kalthoum à Ella Fitzgerald en passant par Charles Aznavour.
C’est donc un véritable joyau vivant du patrimoine qui est aujourd’hui en sursis, victime collatérale d’un conflit dont les destructions risquent de s’avérer aussi irrémédiables que tragiques. Face à ce péril, la mobilisation des professionnels de la culture du monde entier apparaît comme le dernier rempart. Leur cri d’alarme résonnera-t-il suffisamment fort pour être entendu des belligérants et de la communauté internationale ? L’avenir de Baalbeck, de Tyr et de tant d’autres trésors en dépend.